GRAVE CIRCLES
Entre lumière et ténèbres

Eh non ! En Ukraine, il n’y a pas que la centrale de Tchernobyl ou bien la formation de Metalcore Jinjer et sa chanteuse atomique Tatiana, il existe aussi, et cela depuis trois décennies, de l’excellent Black Metal ! Rappelez-vous de Lucifugum ou bien des controversés Nokturnal Mortum dans les années 90, Semargl et son Black/Death Metal transformé en Electro Pop, ou encore les très productifs Drudkh ! Une nouvelle fois le label français Les Acteurs de l’Ombre a eu le nez fin en signant les jeunes musiciens, mais déjà très convaincants, de Grave Circles (ex-Goatflesh) pour la réédition de leur premier album Tome II. [Entretien avec Baal (chant) par Seigneur Fred – Photos : Noizr.com]

Grave Circles est né à l’origine à Vinnytsia en Ukraine sous forme d’un duo à partir des cendres de Goatflesh en 2016, si mes sources sont exactes… Est-ce bien cela ? Comment s’est formé le groupe précisément ?
J’ai rencontré le guitariste Virus un an après avoir créé Goatflesh en fait. En 2013, il a déménagé à Vinnytsia où nous avons fini par enregistrer notre première cassette. Lors de l’enregistrement de notre deuxième démo (EP) avec Goatflesh donc, intitulé Pilgrimage to Icon of Sin, Virus nous a suggéré d’essayer quelque chose de légèrement différent. Un style dans le sens de Plaga, Deathspell Omega, Ascension. C’est ainsi que la chanson « De Laude Flagellorum » est apparue avec Goatflesh. Après cela, nous avons écrit les titres « Predominance » et « Thy Light Returneth » qui figurent sur le nouvel album, ainsi que les trois chansons du premier EP Tome I. En fait, « De Laude Flagellorum » était déjà plus ou moins du Grave Circles. Nous avons créé et interprété les nouvelles chansons en trio. Moi à la batterie, Virus à la guitare et Nocturnal, qui est le co-fondateur de Goatflesh, à la basse. Malheureusement peu de temps après, Nocturnal a fini par partir en raison de problèmes psychiatriques et seulement deux d’entre nous sont restés. Le nom de Goatflesh changea alors pour Grave Circles et notre premier EP Tome I fut enregistré.

Vous avez donc d’abord publié Tome I en 2017. Ce EP est-il sorti en autoproduction uniquement au format numérique à l’époque ou bien via le label suédois Shadow Records en dématérialisé et CD parce que j’ai lu des choses différentes à ce sujet ? De même, votre nouvel album Tome II, qui est en fin de compte votre premier album pour Grave Circles, était déjà sorti l’année dernière mais en indépendant (autoprod.). Bénéficia-t’il d’une sortie physique et sur un label en 2019 avant sa réédition aujourd’hui sur Les Acteurs de l’Ombre ?
Il y a d’abord eu la sortie numérique pour l’EP et ce n’est qu’après que la sortie physique a eu lieu chez Shadow Records. Tout comme notre premier enregistrement longue durée Tome II sorti en effet en téléchargement fin 2019 mais sans pressage de disque (vinyle ou CD). Tome II n’est publié physiquement qu’à partir de mai 2020 par Les Acteurs de l’Ombre.

Merci pour ces précisions. Au passage, comment êtes-vous rentrés en contact avec le label français Les Acteurs de l’Ombre qui publie donc votre album Tome II aujourd’hui en 2020 pour une sortie digne de ce nom ? Vous connaissiez déjà ce label et les artistes Black Metal de leur catalogue ?
Pour te dire la vérité, je ne m’en souviens pas… Avant d’entrer en contact, je ne connaissais pas le nom du label, ça ne me disait rien. Peut-être l’avais-je rencontré auparavant indirectement (en écoutant un de leurs groupes), mais étant donné que je parle russe et que le français n’est pas une langue facile pour nous, je ne m’en souvenais tout simplement pas. Je me souviens avoir écouté les albums de leurs groupes Au-Dessus, Monolithe et Arkhon Infaustus, du moins ce sont ceux qui me viennent à l’esprit…

De votre pays l’Ukraine, on a tendance à résumer la scène Métal à une poignée de groupes comme certaines formations solides de Black Metal réputées telles que Drudkh, les controversés de Nokturnal Mortum, Lucifugum, Semargl bien sûr devenu plus Electro/Métal que Black. Je pense également à Jinjer qui explose actuellement sur la scène Djent/Metalcore très populaire que nous avons découvert très tôt à Metal Obs. Alors, comment se porte la scène Metal ukrainienne selon toi de nos jours car ces quelques groupes ne constituent peut-être que la partie visible de l’iceberg de votre scène Metal nationale, je présume ? (sourires)
Pour moi, Jinjer n’est pas vraiment du Métal ou du moins juste une partie de la scène Métal. À vrai dire, je trouve ce groupe assez répugnant… Malheureusement, compte tenu de la taille de l’Ukraine, je pense que notre scène Métal est plutôt faible par rapport à d’autres pays européens. Il y a cependant beaucoup de groupes ukrainiens que j’aime : Hate Forest / Precambrian, Lutomysl, et les premiers enregistrements de Lucifugum. Kzohh est un groupe aussi intéressant à voir en live. Mais on a aussi du sang frais qui apparaît sur la scène locale, comme Do Skonu, Nahemoth, Kaosophia, Goat Sperm. J’aime aussi le projet nommé Ieschure. Côté plutôt Death Metal : il y a les titans de la scène Datura et leur nouveau projet Etsykh, ainsi que Fleshgore, Ezophagothomia. Le nouveau projet de notre bassiste nommé Temple of Torment semble également très prometteur. Ils sortiront bientôt leur premier album d’ailleurs…

En tant que membres de Grave Circles, êtes-vous proches de Drudkh ou Nokturnal Mortum personnellement ou bien sur le plan artistique, ou au contraire assez éloignés d’eux sur la scène Black Metal ? Ont-ils été une source d’inspiration ou d’une quelconque aide à un moment donné peut-être ?
Pas du tout. Notre chanteur Virus et moi avons grandi dans le Thrash Metal old school, le Death Metal et le Black Metal d’obédience satanique. Aucun de nous ne comprend d’ailleurs Nokturnal Mortum ou ne s’en fait écho. Pour Drudkh, c’est sans aucun doute un projet intéressant, mais nous apprécions davantage tous les deux Hate Forest. Ils forment un monolithe au milieu d’arbres petits et faibles épars dans notre pays. Ils sont des leaders. Cela dit, notre bassiste KGD est un grand fan de Nokturnal Mortum et Drudkh en particulier.

Selon vous, quelles sont les principales influences musicales qui vous ont inspirés pour créer le groupe Grave Circles en 2017 après Goatflesh ?
Nous nous sommes inspirés de formations telles que Katharsis, Funeral Mist, Mgla, Deathspell Omega, Ascension, Svartidauði… Je pense que cela se retrouve dans notre EP Tome I en particulier. Nous avons commencé à créer du matériel en 2015. Pour autant que je me souvienne, le nom du groupe est donc né en 2017 avec la première sortie.

Eh bien, en écoutant votre musique et surtout ce premier album Tome II, on constate que votre Black Metal possède une approche assez singulière car Grave Circles combien deux aspects en un seul finalement. Vous êtes à la fois bruts et mélodiques… Je m’explique : les guitares sont parfois très mélodiques, avec de belles parties d’arpège et de beaux soli, des chœurs grégoriens, etc. et en même temps ou juste après : des riffs féroces et très froids à la Marduk, des blast beats à la batterie et des cris déchirants de Black Metal. C’est un peu comme Marduk jouait un Black Metal mélodique plus raffiné avec Katatonia, avec beaucoup de colère bien sûr mais une certaine mélancolie… !! (sourires) Alors, qu’est-ce qui t’a inspiré pour créer ses nouvelles chansons de Grave Circles sur cet album Tome II ? Quel genre de sentiments ou de sujets t’ont inspiré sur ce premier album très impressionnant et mature peut-être du fait des racines nées de l’expérience Goatflesh ?
Merci, sans aucun doute Goatlfesh a été une grande expérience sur le chemin de la musique menant à Grave Circles. Je n’ai jamais vraiment pensé à quoi ni comment je devais jouer ou chanter. Tout découle de mon inspiration dans mes genres préférés décrits précédemment et cela ne comprend pas seulement la musique. Tu ressens, puis créées des choses… Il n’y a donc pas de formules courantes de création artistique, cependant le lien entre la musique et les paroles constitue une partie très importante du travail chez moi. Pour transmettre quelque chose de significatif aux gens, il faut avoir de l’expérience. De plus, il doit s’agir d’une expérience qui n’est pas facilement accessible à l’individu moyen, je veux dire au premier venu. Cela pourrait être l’expérience de quelqu’un qui a vu la guerre de ses propres yeux et ses horreurs au premier plan, ou peut-être quelqu’un qui a visité les coins les plus reculés du monde. Cela peut-être aussi une personne qui a parcouru un chemin de transformation spirituelle dans sa vie. Étant donné que je n’ai réalisé aucun des objectifs ci-dessus, je m’inspire donc des livres, de l’art en général, du cinéma avec des films underground et mes connaissances. Bien sûr, on peut voir d’autres mondes à l’aide de substances plus ou moins prohibées – mais c’est de la triche là. (rires) Ecouter un autre type de musique peut également inspirer certaines réflexions et ambiances, dans mon cas comme le Post Punk/Hardcore ou le projet danois SOL par exemple.

Sur la pochette très sombre et mystérieuse de ce Tome II, on distingue comme une statue d’une femme avec une clé dans sa bouche qu’on lui ferait avaler ou bien retirer… C’est bizarre et tellement étrange… Peux-tu nous la décrire plus en détail et expliquer votre choix artistique et le sens de cette illustration ?
La combinaison d’une forme humaine vivante et d’une statue était exactement ce qui était prévu, donc je suis très heureux que notre volonté ait été accomplie. La couverture a été réalisée par Alexander Held (Ubertragic Art). C’est un grand artiste russe et fan de Black Metal. Le thème ici pourrait se résumer à la dualité de la lumière et de l’obscurité. L’homme et la femme. Le Bien et le Mal. L’artwork dépeint le principe toujours présent du dualisme. Les deux opposés forment un tout et l’un découle de l’autre. L’un donne une signification ou foi à l’autre (clé). On peut y voir la remise des clés, ou bien le Christ donnant les clés à Saint-Pierre de la fresque du peintre italien de la Renaissance Pietro Perugino. Mais il y a aussi des nuances de violence, imposant son système de volonté établie ou de croyance imposée à l’autre. Les mains qui transfèrent la clé sont couvertes de symboles sur leurs doigts, comme des tatouages : le signe du Mercure – référence aux gnostiques, le fouet – référence aux Khlysts (une secte clandestine qui se sépara de l’Église orthodoxe russe au début du XVIIe siècle), Ouroboros (un ancienne symbole représentant un serpent ou un dragon mangeant sa propre queue), le Graal et enfin l’œil qui voit tout…

Les religions monothéistes telles que le Catholicisme ou bien le christianisme de l’Eglise orthodoxe semblent très présentes dans votre culture slave et imprègnent donc votre musique et tes paroles. On évoquait en détail la pochette, mais aussi le titre de certaines chansons (« Faith That Fades » par exemple), les chœurs parfois (comme sur « Faith That Fades » justement.). Quelle est votre position sur la ou les religions en général ? Êtes-vous évidemment contre la chrétienté comme en général dans la scène Black Metal ? Considères-tu Grave Circles comme un groupe satanique ou païen ?
J’ai une vision plutôt positive de la religion et de la spiritualité. Je me fais un devoir de visiter des temples et des églises historiques lors de mes divers voyages. Bien qu’il existe de nombreux fans de Black Metal qui admirent grandement l’esthétique de l’architecture européenne médiévale par exemple, ils oublient souvent que la majorité de ces magnifiques structures ont été construites par les mains de chrétiens si méprisés par de nombreux groupes de Métal. Plus on va dans l’étude de la théosophie (NDLR : Doctrine ésotérique du divin, fondée sur la contemplation de l’univers et l’illumination intérieure.), plus on va à la source du christianisme pour des réponses et je trouve la démarche intéressante. Cela ne signifie pas que les principes du christianisme sont proches de moi ou représentent mes propres opinions. Ce n’est d’ailleurs pas le cas. Cela dit, parler à un chrétien ouvert et alerte qui est prêt à avoir une discussion ou un débat intellectuel est une conversation beaucoup plus intéressante que celle avec, par exemple, un festivalier de Métal habituellement ivre dont l’étendue de la rhétorique « intellectuelle » commence et se termine par « Je vous salue, Satan ». (rires) Après c’est plus une question d’ordre privé. En ce qui concerne ma foi personnelle : il y a certaines choses que j’ai déjà trouvées pour moi-même, d’autres que je recherche toujours… Peut-être finirai-je par pouvoir répondre plus complètement à cette question dans quelques années durant ou à l’issue de ma vie. Je pense que la chose qui unit les générations des années 90 et 2000 des artistes de Black Metal est le fait qu’ils sont de simples headbangers dans l’âme et que leurs paroles ne quittent généralement pas les normes acceptées du genre. Il y a bien sûr des exceptions à la règle. Certains groupes comme Deathspell Omega, Acherontas, Ofermod et d’autres encore dont les paroles sont le fruit de la contemplation et de l’expérience et tirées de nombreuses sources, tissées dans leur musique, possèdent une démarche intéressante. Je n’accepte ni l’adoration aveugle ni le satanisme libéral qui commence et se termine par l’abaissement de soi pour soi-disant mettre un soi en opposition avec le monde. Dans les temps modernes, de nombreux soi-disant cultes ont vu le jour et de nombreux groupes de Black Metal sont au moins quelque peu impliqués dans ces mouvements, mais peu sont réellement actifs. Lorsque ces groupes occultes naissants qui sont pour ainsi dire un méli-mélo « d’hommes, de chevaux et de chars » qui vont en guerre sont créés sans la tradition et le développement historique organique, c’est simplement du syncrétisme finalement (en mélangeant des éléments ici ou là empruntés à différentes philosophies et religions). Par exemple le culte du dieu Pan, du Baphomet ou du mouvement anti-cosmique. Un exemple d’anti-syncrétisme peut être quelque chose comme un culte solaire qui se trouve dans de nombreuses cultures anciennes, ou un paganisme plus traditionnel où les ancêtres croyaient aux principes du dualisme de la lumière et des ténèbres et ont fait de leur mieux pour apaiser les deux côtés avec le temps…

La littérature constitue donc une énorme source d’inspiration étant donné les titres de vos deux premiers enregistrements : Tome I et Tome II, constituant ainsi les 2 premières parties d’un ouvrage ?
Oui en effet. L’association avec les livres s’avère tout à fait correcte. Mais pour être honnête, j’ai lu beaucoup de choses différentes et il est difficile de comparer cela thématiquement avec le contenu de notre musique et des paroles. Parce qu’habituellement, ils sont totalement opposés ! (rires) Par exemple, je lis actuellement deux livres – « Enoch » et « General Racology » de Walter Steidt.

Pour conclure : quels sont vos projets pour 2020/21 ? Êtes-vous en capacité de partir en tournée en Europe et de venir jouer jusqu’ en France après cette pandémie actuelle (comme Celtic Frost l’annonça en 1987 dans son album Into The Pandemonium) ? Pouvons-nous espérer vous voir bientôt live en France car le Black Metal de Grave Circles est clairement taillé pour la scène ?!
Pour l’instant, notre plan immédiat est lié au travail en studio et il s’agit de terminer le travail sur le prochain EP et du prochain album. Ce matériel a été écrit en 2015-2017, il est donc temps de le réaliser. Et oui, nous avons des membres de session live donc le groupe est prêt à jouer. Je pense qu’après la folie actuelle, nous commencerons à travailler sur les tournées. Ce serait incroyable de visiter la France. Pour ma part, j’aime la vieille France et son histoire… Merci beaucoup pour l’interview Fred !

CHRONIQUE ALBUM

GRAVE CIRCLES
Tome II
Black Metal
Les Acteurs de l’Ombre Prod.
★★★★☆

Formé en 2016 par deux anciens membres de Goatflesh qui splitta un beau jour de l’an 2018 en Ukraine, à savoir son chanteur Baal, et le guitariste Virus (qui a quitté les rangs depuis et, on l’espère, changé de pseudo en ces temps de pandémie…), Grave Circles dégage déjà d’emblée une forte impression de maturité et un réel professionnalisme à l’écoute de ce premier effort longue durée. Suite lyrique directe de son premier EP, Tome II donne dans un Black Metal à la fois cru et mélodique paradoxalement, relativement soigné (arpèges de guitares, chœurs). Et c’est là que réside justement le principal atout de ce quatuor slave (quintet en live). L’intro d’un titre comme « Prédominance » tout en arpèges sous fond de trompettes pourrait presque évoquer un court instant le dernier Katatonia mais le chant de Baal fait alors brusquement changer d’idée. Sa voix convaincra les plus sceptiques d’entre vous, puissante et extrêmement menaçante, ses growls étant plus proches du Death que du Black en fin de compte (comme un certain Legion (ex-Devian et ex-Opthalamia) à l’apogée de Marduk). Musicalement, Marduk et ses œuvres plus Dark et expérimentales comme Rom 5 :12 ou Plague Angel ont visiblement d’ailleurs marqué la formation slave. Dynamiques, les sept morceaux de ce Tome II sont ponctués de breaks et relativement variés (par exemple « Both of Me »). Mais il  y a surtout ici un important travail sur les riffs de guitares avec des mélodies réussies contribuant à une certaine dualité permanente dans l’atmosphère des chansons, à la fois sombre mais aussi lumineuse tout au long de l’album (« Both of Me », « Faith That Fades »). Un peu à la manière des Français de Deathspell Omega, on est même surpris voire carrément captivé par des passages à l’ambiance religieuse ou occulte  (« Faith That Fades et son intro avec chœurs grégoriens orthodoxes). Grave Circles n’oublie pas pour autant ses premiers amours Black Metal (Mayhem, Marduk, mais aussi Lucifugum, Funeral Mist, Mgla…) comme en témoigne le riff glacial introduisant le titre « Thy Light Returneth » ou le rapide « When Birthgivers Recognize the Atrocity » aux influences Black/Death mélodique suédoises. Le plus lourd et oppressant « The Unspoken Curse » offre également une facette plus mystérieuse de Grave Circles, très Dark, à l’image du superbe artwork de Tome II et ses divers symboles et interprétation. Enfin « Abstract Life, Abstract Death » conclue de manière sinueuse, presque progressive, un second ouvrage plus qu’intéressant et annonciateur de nouveaux chapitres, on l’espère… [Seigneur Fred]

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