C’est à l’occasion de la release party du troisième album studio Black Moon Falls des Tourangeaux de Drakwald que nous avons rendez-vous au Bateau Ivre (salle qui fut longtemps fermée et a enfin rouvert l’an passé pour le plus grand bonheur de notre culture) avec trois formations du cru local dont ces nouveaux acteurs de la scène pagan death metal française. Les deux équipages en charge de chauffer le peuple nombreux ce soir ne sont autres que nos amis pirates de Toter Fisch, bien connus en cette contrée et à Metal Obs (lire notre précédente interview), et un jeune trio qui donne là son deuxième concert : Toungouska. Merci à l’asso Riipost pour l’orga, au poil comme d’hab’, même si nous eûmes droit à une petite surprise technique de la part de la fée électricité… [Live report : texte et photos par Seigneur Fred]

L’honneur revient à Toungouska, lui-même acteur de sa propre release party à Tours il y a quelques mois à peine pour son premier EP Dark Woods (autoproduction), que certains qualifieront d’album, c’est comme vous voudrez, leurs 4 titres étant relativement longs. Vers 20h30, ce trio monte sur scène, encapuchés en noir comme c’est la mode, et c’est parti pour un petit set d’environ 40 mn donnant dans un stoner bien lourd, assez lent, qui va monter en puissance progressivement. Annoncé sur l’affiche dans un genre post black metal, nos trois gaillards de Toungouska sont tout de même plus proches du stoner que du black. Leurs riffs de l’unique guitariste (également chanteur) et rythmiques n’ont pas grand-chose de black, d’où cette qualification de post black, bien entendu, même si une certaine noirceur et oppression se ressentent un peu, bien plus sur disque à l’écoute de Dark Woods. Quasiment dénuée de lumières, et malgré quelques fumigènes, l’ambiance reste timide côté public, plutôt observateur et respectueux, se lâchant seulement sur la fin. En effet, la sauce commence à peine à prendre malheureusement que leur concert s’achève déjà. Un trio tourangeau intéressant et prometteur, qui ne demande qu’à s’exprimer davantage pour s’affirmer totalement.

À présent, place à Toter Fisch qui passe à l’abordage du Bateau Ivre (elle était facile celle-là) plein dans sa petite configuration (env. 200 personnes) ! L’ambiance va franchement d’office monter d’un cran, le pirate metal des Tourangeaux étant toujours aussi diaboliquement efficace et festif. Basé sur un metal plutôt typé death tout à fait accessible et du folklore (présence d’accordéon chromatique joué par Jérémy derrière sa barre de navire, mais aucun autre instrument traditionnel hormis ça), le tout agrémenté de quelques samples et diverses nappes de claviers, leur musique se veut toujours aussi entraînante. Absents pendant ces dernières années après une tournée acoustique il y a trois ans, et passée une pandémie qui leur a permis d’écrire tranquillement un prochain album à paraître courant 2023, nos cinq gaillards sont vraiment ravis d’être de retour sur scène et de retrouver leur public qui mange dans la main de leur capitaine Romain, alias « Horgoth LordToad ». Leur set-list de ce soir reprend des chansons de leur premier LP, Yemaya, agrémenté ce soir en avant-première de deux nouveaux morceaux, l’une plus mélodique notamment dans son intro appliquée à la guitare, et une second très heavy et rythmé, baptisé pour le moment « The Tongue, The Saver »… C’est aussi l’occasion pour nous de mieux faire connaissance en aparté avec leur nouveau guitariste, Tanguy, arrivé déjà dans l’équipage en 2019, après le départ de David. Celui-ci nous confiera être de retour d’une tournée européenne en tant que guitariste de session live pour le groupe écossais Sahor (lire notre interview de son leader multi-instrumentiste Andy Marschall en p. 10 dans notre magazine de septembre 2022) en ouverture de Gaahl’s Wyrd. Pas mal pour un jeune guitariste breton ! Il faut dire qu’il impressionne par sa carrure et son déguisement. On dirait le sosie du célèbre pirate ottoman Barberousse ! Coiffé sous son chapeau de pirate, il enchaîne les riffs bien heavy et catchy sur sa guitare Solar 7 cordes (marque d’instrument du guitariste suédois Ola Englund de The Haunted). Véritable atout désormais pour notre joyeuse bande de musiciens qui se donne à fond, on espère qu’il contribuera au succès croissant du groupe (rappelez-vous notre coup de cœur au Festival Motocultor en 2017) et qui mériterait tellement plus (comme une signature sur un gros label indépendant, c’est tout le mal qu’on leur souhaite). On attend maintenant de pied ferme leur second album dont la touche finale (mastering) a été apportée ce jour-même ! D’ailleurs, à bientôt les amis !

Enfin, c’est au tour de la tête d’affiche Drakwald de monter sur scène pour nous présenter son troisième et nouvel opus Black Moon Falls (autoproduction), sept ans après Riven Earth. Alors que l’audience est fournie et avait été bien chauffé précédemment par Toter Fisch, le show musclé de Drakwald, qui joue ici à la maison, ne va guère durer longtemps cependant. Passé environ deux titres, une coupure électrique nette suivie d’une alerte à l’incendie suspendront leur concert pendant environ une bonne vingtaine de minutes. Si cela interrompit naturellement quelque peu l’atmosphère naissante du concert, c’est cependant mal connaître la détermination et le professionnalisme de nos cinq musiciens, qui reprendront tant bien que mal, avec une chanson introduite à la flûte par Bertrand après un petit interlude improvisé par leur excellent batteur Maxime sur son kit acoustique (l’avantage par rapport à une batterie électronique). Alternant flûte donc et cornemuse, le Berruyer apporte cette touche folk et mélodieuse aux compos death metal. Leur frontman expérimenté depuis la participation du groupe au festival Hellfest en 2018 remplit son rôle comme il se doit en termes de communication, comme en lançant « Under A Rain Of Soot », single extrait de leur nouvel album.

Le son fut bon, les lumières nettement meilleures que sur le set de Toungouska. Les fans de formations telles qu’Eluveitie, Insomnium ou Wolfheart sont ravis ce samedi soir. Malgré cet incident technique, Drakwald s’en tire avec les honneurs, et on espère les revoir dans de meilleures conditions, eux qui sont capable de se produire, comme leurs compagnons de Toter Fisch, aussi bien dans de petites salles et des clubs comme ce soir au Bateau Ivre, ou sur de grandes scènes de concerts notamment en plein air comme en festival. Souhaitons leur bonne chance avec cette troisième galette Black Moon Falls à présent disponible et pour laquelle nous manquons de recul à cette heure.

Dans tous les cas, la soirée fut bonne, la bière coula à flot, et tout le monde repartit avec le sourire, de même que les organisateurs, heureux de voir revenir les spectateurs dans les salles de concerts après quelques années très compliquées pour la culture et les petits concerts pour cause de covid-19. Alors soutenez les scènes locales et les assos organisatrices de ce genre d’évènements, rendez-vous très bientôt pour voir Year Of No Light (post metal-Bordeaux) le 05/02/2023 au Bateau Ivre, ou Lunar Tombfields (interview à retrouver ici) le 28/01/2023 au bar Le Canadian Café, pour les amateurs là de black metal… [Seigneur Fred]