Pour une fois, c’est un livre dont nous allons parler aujourd’hui. Et pas n’importe quel livre puisqu’il s’agit du recueil d’une vie d’artiste, celle de Jeff Grimal (Citadel, Spectrale, ex-The Great Old Ones…). Si ses talents de musiciens sont déjà reconnus, vous aurez maintenant tout le loisir de découvrir la seconde passion de Jeff. Au programme de ce livre une présentation de ses nombreuses compositions, collaborations, le tout expliqué en détails. Ne cherchez plus, vous avez trouvé le cadeau de Noël idéal ! [Extraits d’entretien avec Jeff Grimal, musicien, par Julien Meurot – Photo : DR]
Peux-tu nous résumer le parcours qui t’a conduit à prendre les pinceaux ?
Ma famille achetait des toiles et des sculptures. J’ai baigné très jeune dans cette ambiance et j’ai commencé le dessin très tôt. On allait voir des expositions, et j’avais aussi à ma disposition des livres d’art. Je me souviens qu’à l’école, je gribouillais toujours des petits dessins en cours. Je détestais l’école et en classe j’étais toujours dans la rêverie. Je n’arrivais pas à m’intéresser vraiment au monde matériel et très tôt j’ai eu ce décalage qu’ont beaucoup d’artistes. Mais je pense que mon amour pour l’art a vraiment commencé à partir du collège. Je suis rentré dans une école catho et c’est vraiment à cette période que mon envie d’avoir un cursus différent est apparue. J’ai aussi commencé à m’intéresser au metal et aux musiques extrêmes par le biais d’un élève qui était fan de hard rock et de Lovecraft. Après, mes parents on décidé de me faire rentrer dans une école d’art, le Centre de Formation Artistique à Bordeaux. Là, j’ai appris la plupart des techniques que j’utilise actuellement. Il y avait des cours d’histoire de l’art, de dessin, et de la peinture classique. J’ai eu un prof vraiment talentueux capable en une heure de faire dix croquis à la Rembrandt, j’ai beaucoup appris avec lui.
H.R. Giger est au centre de tes influences. Comment décrirais-tu la première fois ou tu as été exposé à son art ? Déjà, est-ce par le biais des films Alien ou as-tu découvert son travail autrement ?
Dans mes souvenirs, je pense que c’est avec une couverture d’un bouquin de Lovecraft évoquant Le Necronomicon, ou alors avec le magazine Mad Movies. Cela remonte à loin, mes souvenirs sont un peu flous. Je me souviens en tout cas d’avoir loué la cassette du premier film Alien et je fus subjugué par l’horreur que je voyais à l’écran. C’est pour moi un des films les plus angoissants que j’ai pu voir dans ma vie. Giger a fait preuve d’une grande inventivité dans la conception de l’Alien et du vaisseau. C’est une totale réussite ! Les décors sont stupéfiants de réalisme. Le film date de 1979 et je le trouve encore bluffant par rapport aux effets spéciaux actuels. La représentation de l’Alien en lui-même reste pour la plupart du temps caché, et c’est ça qui donne cette atmosphère si redoutable. Je pense que ce film m’a grandement influencé dans certains de mes tableaux, surtout avec mon travail sur les verts et les bleus. J’ai essayé de retrouver ce côté brumeux et inquiétant sur certaines toiles.
Comment se passe le travail sur une série ? Est-ce que chaque toile est une itération où tu pousses le travail jusqu’à être satisfait à cent pour cent, ou bien chaque toile est différente et montre un aspect particulier du thème ?
C’est souvent un travail qui se répète mais ce n’est pas le même concept de série en série. Pour la série Citadel par exemple, je vais être dans un concept de verticalité : du ciel à la terre. Cette série m’aide à m’ancrer dans la matière. Je suis une personne très aérienne et la peinture me permet de retrouver ce côté humain que j’ai tendance à oublier, parce que je suis souvent plongé dans un imaginaire débordant. Les couches épaisses du tableau sont synonymes de matière dans le vrai sens du terme. Les couleurs sont très importantes aussi, elles sont choisies sur le moment, de façon instinctive comme pour guérir une part de moi. Il y a aussi un côté spirituel dans mon travail. Le travail sur Citadel peut aussi parler d’énergie, de chakras. Les couleurs que je vais choisir peuvent avoir une signification avec une partie de mon corps. Le travail est fini quand il est fini, c’est une chose que je ressens rapidement et si je suis toujours satisfait à cent pour cent.
Tout cela nous amène à la sortie de ton livre qui regroupe tes œuvres ? Quel a été le point de départ de cette aventure ?
Cela fait un moment que j’avais en tête d’éditer mes œuvres en artbook, mais le manque de budget et de contacts pour aboutir à ce projet était un sacré frein. A l’été 2020, j’ai reçu un message d’Emilien (Editions des Flammes Noires) sur mon compte Twitter me proposant de publier mon travail. J’ai en premier halluciné parce que c’est une chose que j’avais en rêve depuis très longtemps du fait de mon amour pour les livres d’art. J’ai tout de suite dit oui et nous nous sommes appelés. Le courant est passé tout de suite, j’ai senti en lui vraiment la passion pour mon art et la passion de sortir de beaux ouvrages. Au début, Emilien m’a proposé de rédiger les textes, mais j’ai toujours du mal à écrire sur mes œuvres. J’ai des idées sur certains tableaux et séries, mais trouver les mots justes, la bonne syntaxe est pour moi, pour le moment, un grand stress. J’ai tout de suite pensé à Raphaël Verguin pour rédiger les textes qui a alors accepté.
Pour finir, quelle va être ton actualité pour les mois à venir ?
Je suis en train de composer un autre disque pour mon projet Kesys. C’est un projet folk un peu psyché. J’ai sorti un EP et un album en 2020 et je compte faire du live seul, ou avec des musiciens.
Si vous gravitez dans les sphères du métal extrême, vous avez surement déjà été exposé à l’art de Jeff Grimal. En effet, ce dernier a œuvré pour de nombreux combos, dont son propre (et ancien) groupe The Great Old Ones. Il a également fait les pochettes pour Gorod, Përl ou encore In Cauda Venenum. Mais parlons de ce livre qui regroupe l’ensemble des créations graphiques de Jeff. Préfacé par Gérald Milani (Les Acteurs de l’Ombre) et accompagné par Raphaël Verguin à la plume (Spectrale, Rïcïnn, Psygnosis…), ce livre regroupe tout le travail de Jeff illustré par le principal intéressé. Ainsi, vous aurez tout le loisir d’apprécier ses séries, telle que « Citadel », « Nature » ou encore « Lovevraft ». Evolution, retravaill, finalisation, toutes les étapes vous y sont dépeintes avec une passion non dissimulée. Fait des plus intéressants, le livre est aussi bien disponible en anglais qu’en français, cadeau idéal pour votre correspondant à l’étranger. Un superbe ouvrage illustré qui retrace la carrière d’un artiste multifonctions bourré de talents !! [Julien Meurot]
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