Il y a deux ans, Betraying The Martyrs défrayait la chronique avec Phantom, un album très – trop ? – produit, qui reçut un accueil des plus mitigés. Aujourd’hui, le groupe a pris de l’ampleur, de l’assurance, et The Resilient, plus épuré, revient à l’essentiel. Le cap du troisième album est toujours délicat, mais il faut dire que les Français emmenés par Aaron Matts, fers de lance de la scène Metalcore française à l’international – on a la fâcheuse tendance à l’oublier – ont fait très fort, délivrant un album mature et percutant.
[Entretien avec Lucas D’Angelo (guitare) et Aaron Matts (chant) par Loïc Cormery]
On a vu votre page Facebook se couvrir de noir le 13 novembre de l’année dernière. Comment les événements de cette funeste journée vous ont marqués ?
Ça a été un véritable choc pour nous étant donné que le monde du « rock » de manière générale a été ciblé ce soir-là, dans notre capitale, dans notre ville, en plein cœur de notre pays. Nous avions de très bons amis sur place, et pas mal de connaissances, qui ont été prises pour cible. Je peux d’ores et déjà t’annoncer qu’un de nos nouveaux morceaux parlera de cela… Évidemment, ces tristes événements marqueront nos cœurs et notre mémoire à jamais, mais nous ne sommes pas non plus le genre de personnes à se laisser abattre. Il faut aller de l’avant et continuer à vivre, à profiter des personnes qui sont encore à nos côtés, à ne pas rentrer dans le jeu des terroristes et ne pas succomber à la peur. Le Bataclan est une superbe salle dans laquelle je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de jouer moi-même, mais j’ai été voir de nombreux concerts là-bas (Lamb Of God, August Burns Red, Dagoba, Bring Me The Horizon, Architects et bien d’autres…). J’en garde évidemment un excellent souvenir et ne laisserai pas quelques extrémistes ternir les bons moments que j’ai pu passer dans cet endroit magique.
Peux-tu revenir sur Phantom en 2014 ? Quelle a été l’accueil de cet album et les tournées qui ont suivi ?
Phantom est un album qui nous a marqués. Je pense que cet album nous a permis d’avancer malgré quelques erreurs commises. Finalement, l’accueil de Phantom reste bon mais mitigé. The Resilient, notre nouvel album, nous a permis de gommer les failles et de repartir sur de bons rails. Il représente assez justement notre évolution, aussi bien en tant qu’individus que musiciens. Grâce à la promo de HIM Media, nous pouvons mieux assurer les espoirs pour cet album. Nous avons donné énormément de concerts depuis 2014, ce qui nous a évidemment apporté une expérience non négligeable, à tous niveaux ! Nous avons toujours voulu jouer la musique que nous aimerions entendre. Avec les années, les goûts de chacun évoluent, et c’est pour cela que notre musique change également. Dans BTM, nous avons toujours voulu faire participer tous les membres de la formation lors de l’écriture musicale, et ce depuis le début du groupe, il est donc normal que les sonorités changent lorsque de nouveaux membres arrivent et donnent leur touche/signature aux morceaux. C’est vraiment notre définition du « groupe » de musique : une entité formée de plusieurs personnalités, travaillant ensemble sur plein d’idées d’horizons divers et variées.
Comment s’est passé le processus cette fois-ci ? Différent des autres albums ? Qui l’a produit et mixé ?
Cette fois-ci, nous voulions vraiment aller nous enfermer en studio avec un producteur. Par le passé, nous avons toujours beaucoup fait les choses seuls, étant ingé-son, j’ai énormément travaillé pour le projet, à n’en plus dormir pendant des mois, m’enfermant en studio 6 jours sur 7. Ce coup-ci, nous voulions nous concentrer sur la musique et avoir une oreille extérieure capable de nous diriger sur la production et le mixage de nos titres. Nous sommes entrés en studio en Angleterre fin février, pour un mois. Les batteries seront enregistrées à Londres, et le reste à Reading (UK). C’est Justin Hill (ex-Sikth) qui nous a produit et je peux te dire que son travail est redoutable. Il a fait d’excellent album ces derniers temps et il est vrai qu’il est de bon conseil. Pour le mix, c’est moi qui en pris la charge cette fois-ci sans même le dire à personne. J’ai fait ça dans mon coin et les gars ont super bien vécu le résultat (rires) !
Aaron, Lucas me parlait du processus de composition qui s’est faite différemment pour The Resilient, comment as-tu imaginé tes textes, cette fois-ci, des événements récents, es-tu dans le mode concept et quel est le thème en particulier ?
Cette fois-ci, nous voulions clairement travailler autour d’un « thème » , non pas pour l’album dans son intégralité, mais chanson par chanson : chaque morceau a été construit à partir d’une idée directrice (ambiance, etc), puis tous les membres du groupe ont travaillé à partir de cette base. Ça n’a été qu’à la fin du processus que nous avons réalisé que les morceaux, ensemble, représentaient tout ce que nous avions vécu et surmonté en tant que groupe, ce qui nous a amenés au concept de résilience, qui représente parfaitement l’album. C’est quelque chose dont nous sommes très fiers.
Le travail avec Victor a-t-il été plus complexe ou au contraire tout a été comme prévu ?
Pour la première fois depuis la création du groupe, Victor et moi-même nous sommes retrouvés dans une position ou la construction des morceaux nous laissait vraiment la place pour nous exprimer vocalement. En mettant l’accent sur les voix comme instrument clé, les chansons ont été construites autour de celles-ci, comme un tout ou chaque partie est à sa place. Grâce à ceci, le processus d’écriture et d’enregistrement a été plus simple et agréable pour nous, et je pense que tu seras d’accord sur le fait que le résultat n’en est que plus fluide et cohérent.
Vous êtes très gros à l’étranger, mais ici on a l’impression qu’on vous boude un peu. Tu penses que c’est dû au style ? Jalousie qu’un groupe français réussisse…
Certes, il y a des critiques faut savoir prendre celles qui sont constructives et faire la part des choses. On ne peut pas plaire à tout le monde, mais ça c‘est un sport assez français de cracher sur les groupes qui marchent à l’étranger. Je trouve qu’en France, nous avons une bonne fan base et l’important, c’est que nous puissions faire plaisir à ces gens-là en venant venir jouer très bientôt ici ! Il y a plein de bons groupes français qui vont réussir à percer à l’étranger, c’est certain.
Y a-t-il un concert qui t’a particulièrement marqué durant ces dernières années ?
Chaque concert est unique, et c’est ce qui fait le charme de tourner autant, mais si je devais en garder seulement deux… je dirais : lors du Mayhem Festival, à Chicago, en ouverture de Slipknot. C’était vraiment la première fois où nous jouions devant un océan de personnes jusqu’à l’horizon… C’était très impressionnant ! Le deuxième serait en première partie d’Asking Alexandria à Londres, devant une Brixton Academy sold-out à craquer. Les gens criaient tellement fort lorsque nous sommes montés sur scène qu’il nous était impossible d’entendre notre propre intro et on a failli se planter sur le départ ! (rires)
Vous avez mis trois singles en avant avec des clips vidéos fantastique…
Il est important à ce jour que le groupe ait un bon visuel et surtout une cohérence avec nos propos. Nous avons eu d’excellents retours sur nos singles et les fans réagissent très bien à l’évolution du groupe surtout sur « Lost For Words ». Je pense qu’avec cet album, nous pouvons gravir des échelons supplémentaires.
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