
Depuis 32 ans que l’on attendait un nouvel album studio de la part de CORONER, le fameux trio helvète culte de thrash metal progressif !!!! CORONER est bel et bien de retour sur disque avec Dissonance Theory ( @centurymedia ), son 6ème album, 32 ans donc après Grin (1993). Bien sûr, c’est notre album du mois d’octobre 2025, voire de l’année 2025 !! Cela sera à vous d’en juger en lui accordant l’accueil qu’il se doit. Dans tous les cas, Dissonance Theory constitue à lui seul un véritable évènement sur la scène metal !! Si la bande à Tommy Vetterli s’était reformée en 2010 et se produisait régulièrement live à droite à gauche, ils effctuent sérieusement un superbe retour avec cet album énorme, et déjà plusieurs singles fascinants à la clé (« Renewal », « Symmetry »). En plus, de nombreux concerts arrivent, comme nous l’a gentiment confié son guitariste et principal compositeur, mais aussi producteur bien connu, Tommy Vetterli Baron (ex-KREATOR). Un grand merci à lui, ce fut un honneur de l’avoir en invité pour cette interview sur METAL OBS, car c’est pas tous les jours !! [Entretien réalisé par Zoom avec Tommy Vetterli Baron (guitares, production) par Seigneur Fred – Photos : DR]
->> Single « Symmetry » par CORONER, extrait de l’album Dissonance Theory (Century Media Records)

Si les nostalgiques que nous sommes tous un peu finalement vis-à-vis du groupe culte de thrash metal CORONER peuvent aujourd’hui s’exclamer en disant : « Trente-deux ans, putain, trente-deux ans !! », tout comme Jacques Chirac s’écriait à son époque en 1995 dans Les Guignols de l’Info sur Canal + : « Deux ans, putain, deux ans ! », soit deux ans après la parution du désormais avant-dernier album des Suisses, Grin, paru en 1993, que l’attente fut longue !! Mais ne dit-on pas souvent que plus c’est long, plus c’est bon ? Enfin, ça dépend pourquoi… Bref, cessons les comparaisons passéistes et expressions douteuses. Penchons-nous sur la bête baptisée Dissonance Theory que le trio de Zurich, reformé en 2010, a pris le temps de composer avec minutie et d’enregistrer tranquillement, tels des orfèvres de l’horlogerie helvète, experts ici en techno thrash metal (ou thrash metal technique ou progressif comme on dit de nos jours). La raison toute de même quant à ce long silence discographique, son guitariste et d’ailleurs producteur Tommy Vetterli Baron (ex-KREATOR de 1996 à 2001, 69 CHAMBERS avec son épouse ) ? Accomplir l’album parfait en studio, sans aucun regret, sans pression, et sans personne ou autre producteur pour entraver leur travail, afin d’atteindre la perfection absolue dans leur art, tout en se faisant plaisir. Eh bien, c’est chose faite avec ce sixième chef d’œuvre !! Oui, oui, CORONER atteint la perfection ici, alors que Tommy, mais aussi son incontournable bassiste/chanteur originel Ron Royce (qui n’a plus un cheveu sur le cailloux), et leur incroyable « nouveau » batteur Diego Rapacchietti (60 CHAMBERS) arrivé en 2014 et qui eut la lourde tâche de succéder à Marquis Marky (désormais dans la formation doom metal TAR POND), n’ont pourtant plus grand-chose à prouver à leur âge en 2025…
Telle une lumière noire, Dissonance Theory commence par l’intro « Oxymoron », à la fois sombre et lumineuse, autrement dit un oxymore justement, intelligemment choisi en ouverture par nos trois amis suisses. On en frissonne déjà et se croirait dans le dernier film de la saga Alien : Romulus. Pourtant ce n’est pas de la (science)fiction ici, on ne rêve pas car on assiste bien à l’écoute du nouveau CORONER, quitte à se pincer par instant ! S’enchaîne immédiatement « Consequence », troisième single issu de l’album qui vient de paraitre le 16 octobre 2025 en vidéo clip à travers une classique « lyric video ». Musicalement, on perçoit quelques légers claviers, façon orgue Hammond, en arrière-plan, puis le thrash metal véloce et lourd est lâché. Au micro, on reconnaît immédiatement la voix de Ron Royce, féroce et bien vivante. Les riffs de Tommy Vetterli Baron sont énormes, et d’une redoutable précision, lui qui a dû à se remettre sérieusement à la pratique de la guitare qu’il avait un peu délaisser du fait de son travail à plein temps de producteur à Zurich et son besoin de déconnexion et de se ressourcer durant ces dernière années (voir notre interview). Un premier refrain survient avec des arrangements synthétiques derrière (comme un vocodeur sur des chœurs), puis quelques arpèges formant un pont, ça se calme un peu, et un premier solo de guitare nous est offert sur la seconde moitié du morceau, et ce riff complexe, entre VOIVOD et… CORONER. La fin reprend le début et boucle la boucle. Classique mais efficace comme entrée en matière.
Puis « Sacrificial Lamb » se veut plus lourd, avec toujours ce travail groovy de la basse du chanteur. Les riffs de guitares deviennent de plus en plus dissonant, on se régale alors que la section rythmique nous fait headbanguer et le batteur Diego délivre un travail énorme, à la fois technique et groovy là aussi, derrière ses fûts. Les prestations de CORONER live de ces dernières années ainsi que son rôle au sein de 69 CHAMBERS nous avaient de toute manière rassurées depuis longtemps : c’est un grand batteur qui coche toutes les cases, réunissant à la fois le groove d’un Dave Lombardo et la technicité d’un Paul Bostaph ou Gene Hoglan, mais avec sa propre patte (italienne !). Quant au solo final de l’ex-KREATOR, c’est du grand art, même s’il même un peu de temps à arriver. Sur « Crisium Bound », une atmosphère froide et inquiétante s’installe rappelant un album comme le plus dark/gothic et progressif Endorama de KREATOR à l’époque où Tommy V. Baron rejoignant la horde de Mille Petrozza (1996-2001). Là, on lorgne vers le thrash metal progressif moderne dont CORONER se veut le précurseur et avant-gardiste, mais passées les trois minutes, le ton devient plus rageur et direct. Un autre excellent exemple est certainement le single « Symmetry » d’une fluidité remarquable aux riffs en béton armé boosté par une rythmique sur les chapeaux de roue. Cette chanson passe alors comme une lettre à la Poste helvète sans la douane. L’ambiance de son vidéo clip nous rappelle d’ailleurs étrangement leur chanson « Masked Jackal » de l’album Punishment For Decadence paru en 1988 ce qui ne nous rajeunit pas, mais CORONER reste indémodable, intemporel, et ce, même si son guitariste Tommy ne partagera toute à fait ce point de vue, certes, nostalgique de notre part, durant l’entretien que nous avons eu avec lui… (rires).
En effet, Dissonance Theory se veut extrêmement contemporain, tant dans le sens des compositions que sa production sonore, avec notamment ses arrangements subtils apportés en studio comme sur le plus lancinant et ténébreux « The Law », avec presque des relents à la TRIPTYKON, autre formation culte suisse avec Tom G. Warrior (en préparation d’un nouvel album studio), sans jamais en faire trop non plus (c’est parfois le risque quand il s’agit d’un seul homme aux manettes de son propre studio sans limite de temps). Tout est dosé, subtil, savamment équilibré et pensé. Et les apparences parfois trompeuses car la seconde partie de « The Law » se veut d’une vélocité à toute épreuve et très prenante. Si « Transparent Eye » rappelle le groove de leurs voisins transalpins de KLOGR entre groove et indus metal, mais aussi 69 CHAMBERS (sans bien sûr le chant féminin), il démontre aussi cette volonté d’innover et de ne pas stagner, ni regarder systématiquement dans le rétroviseur de la discographie finalement peu conséquente mais uniquement faite d’albums majeurs chez CORONER. A l’époque du remplissage à tout va sur les albums de metal contemporain, que ça fait du bien ! Et l’expérience acquise dernièrement avec le projet 69 CHAMBERS de son ex-femme Nina Treml, lui a permis de toujours resté dans le move, ou bien les récentes productions des albums d’ELUVEITIE, font de Tommy Vetterli un producteur hors paire et à l’écoute.
Alors on pourrait continuer à explorer une par une les dix plages sonores que nous offre le formidable trio de thrash metal technique, comme l’ultime « Prolonging » aux claviers très progressifs, l’atmosphérique « Trinity », ou les attaques thrash typiques sur un morceau comme « Renewal » rappelant la proximité entre KREATOR et CORONER. C’est bien simple, chaque chanson peut être redécouverte à chaque fois et vue avec un autre angle, et que dire de la prestation vocale encore du frontman Ron Royce au poste de bassiste/chanteur apportant lui aussi son savoir-faire et sa pierre à l’édifice qu’a construit là CORONER avec Dissonance Theory. Si on dit généralement que les Suisses sont lents à l’action et pour parler, et bien on leur pardonne volontiers. L’attente fut longue, mais elle en valait la peine. Tommy Vetterli Baron et sa bande peuvent être fiers du travail accompli quand il regarde derrière, et surtout devant eux, car ils sont libres et n’ont aucune pression en proposant ce nouvel album, si ce ne n’est le sens du devoir accompli pour eux-mêmes, puis vis-à-vis des fans, comme nous l’a expliqué le grand guitariste et sympathique Tommy. Leur cahier des charges est rempli et nous, on l’accepte et valide sans aucune hésitant tant respire la perfection artistique, chose rare quand on fait un disque, ou simplement qu’on l’écoute. Du travail d’orfèvre donc de la part des maîtres du techno thrash encore en 2025. [Seigneur Fred]

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