IN CAUDA VENENUM
G.O.H.E.
Post-Black Metal
Les Acteurs de l’Ombre Prod.
Quel ambitieux projet d’extrapoler la biographie de James Ellroy à travers seulement deux plages musicales ! Cette histoire basée sur des faits réels, à savoir l’assassinat de la mère du célèbre romancier américain (Le Dahlia Noir, L.A. Confidential, etc.) durant sa jeunesse en 1958 aux Etats-Unis aux abords du lycée Arroyo à Los Angeles (Californie), constitue le point de départ d’inspiration sur ce second album d’In Cauda Venenum, duo français de Post-Black Metal composé de Romain Lupino alias « Ictus » aux guitares, à la basse et chant, ainsi qu’un certain Nicolas Deléchenault alias « N.K.L.S. » à la batterie, récemment invité sur le premier album de Crépuscule d’Hiver qui vient de paraître. Si l’idée semble intéressante, elle peut aussi être très risquée, un peu à la manière Quentin Tarantino dans le septième art qui revisita avec plus ou moins de succès l’affaire Polanski et l’assassinat manqué de Sharon Tate dans son film Once Upon a Time… in Hollywood… On s’attaque donc à du lourd ici et cela s’annonce à vrai dire passionnant. Dès l‘intro mélancolique de « Malédiction » où l’on entend a priori un sample de la voix du roi du polar noir américain à propos de ses relations à jamais brisées avec les femmes durant sa vie du fait de cette tragédie maternelle vécue en plein complexe d’Œdipe chez le futur écrivain, on rentre dans le vif du sujet. Les guitares arrivent et une rage se fait entendre exprimée par un Black Metal véhément et rapide, avec des instruments et un chant surtout volontairement assez lointain. De temps à autre, de nouveaux samples de James Ellroy surviennent pour agrémenter cette longue première plage musicale mouvementée d’une vingtaine de minutes. « Malédiction » décrit les déboires du héros, alors jeune et qui sombrera rapidement dans la délinquance car livré à lui-même (père inexistant puis décès, drogue, alcool, réformé de l’armée, etc.). C’est la descente aux enfers. La fin de ce premier morceau devient plus lancinante, sombre… Mais comme dans les romans pourtant noirs de l’auteur à succès, il y a toujours une certaine rédemption ou un salut possible dans ses histoires, inspirée de sa propre prise de conscience et décision de changement de vie à la fin des années 70 où il arrêtera tous ses abus afin de se consacrer pleinement à l’écriture. Nous sommes alors passés à la seconde et dernière chanson « Délivrance ». Les guitares sont plus énervées, le rythme est plus dynamique, du violoncelle survient avant un nouvel élan musical débouchant sur une certaine délibération. La pluie tombe, la voix de James Ellroy raconte, un regain de violence définitif surgit où les démons exultent et laissent place à une nouvelle vie plus brillante. James Ellroy connaîtra alors son premier succès international et la célébrité avec son célèbre roman du Dahlia Noir en 1987, début d’une certaine délivrance thérapeutique telle une catharsis sur le meurtre de sa mère. Cinq ans après son album éponyme, In Cauda Venenum propose donc G.O.H.E. sur un format non pas d’un EP mais bien d’un LP comprenant deux malheureux titres (« Malédiction » et « Délivrance » donc) à l’artwork léché signé d’une toile de Jeff Grimal (The Great Old Ones). Ce disque prenant, difficile d’approche, comblera les doubles fans de polars et de Black Metal avant-gardiste et torturé qui cherche la rédemption dans l’une des deux voies artistiques, quitte à s’y perdre. On peut aussi rester hermétique à G.O.H.E. si l’on ne rentre pas dans cette histoire revisitée avec audace avec parfois des influences Post Rock intéressantes mais qui auraient méritées plus de développement dans cette approche musicale originale, peut-être pour mieux en saisir toutes les subtilités même s’il faut saluer le travail de composition et d’écriture des deux Français accompagnés du violoncelliste Raphaël Verguin. [Seigneur Fred]
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