La détermination au service de la musique

Entretien avec Eugene (basse) suite à leur concert au Transbordeur à Lyon le 10 février 2019 par Aline Moiny

Vous êtes en tournée depuis début janvier avec Amorphis et celle-ci se finit dans une semaine. Quels sont vos ressentis ?

Tout d’abord, cette tournée est différente de celle que nous avons faite précédemment. Les groupes sont différents et l’atmosphère l’est aussi. On commence par contre, à vouloir changer d’objectif. Nous avons été bookés pour cette tournée il y a un an. Et nous étions sûrs que c’était la bonne marche à suivre. Mais nous sommes un peu fatigués d’être un groupe de première partie. Nous voulons vraiment faire une tournée en tant que tête d’affiche. Cela restera toutefois une belle expérience.

 

En effet, le set est très court et vous n’avez pas vraiment d’espace pour exprimer votre musique…

C’est exactement ce que je voulais dire… Je suis un peu triste car les fans sont venus et ne reçoivent pas vraiment ce qu’ils devraient… 45 min, c’est trop court… Et il y a beaucoup de choses que nous ne pouvons pas faire. Des fois, nous n’avons même pas assez de place sur la scène. Aujourd’hui, c’est génial. Il y a de la place. Hier à Barcelone, par exemple, nous avons dû jouer avec la batterie à côté de la scène. On n’avait pas de place pour bouger sur scène. On était juste debout, là, à jouer. Cela nous limite beaucoup. Et je pense qu’on ne peut pas vraiment montrer tout ce qu’on peut faire. Il est temps d’avancer.

 

Vous avez 10 ans de carrière, vous avez connu des hauts et des bas au sein du groupe et vous semblez avoir une vraie volonté de vous faire connaitre de savoir relever des défis, à faire face à toutes épreuves. Vous jouez de plus en plus en France. C’est incroyable.

Merci. Tout le monde nous dit qu’on grandit. Mais ce n’est pas vraiment une priorité pour nous de devenir un gros groupe. La première chose, c’est que nous voulions jouer dans différentes endroits, devant des gens différents pour leur montrer ce que nous avions. Pour leur faire écouter notre musique en live. Nous voulions aussi voir le monde. Nous étions fascinés de voir ce que l’on voyait et nous voulions en voir plus. Après que la guerre ait commencé chez nous, nous avons dû déménager, nous n’avions pas d’autres jobs… nous n’avions pas d’autre choix que de jouer plus pour pouvoir, par exemple, manger. Nous avons ainsi décidés de prendre tous les shows possibles même en prenant juste 50 euros, pour tout le groupe…  Et nous étions heureux même juste avec ça.

 

Comment les personnes de votre pays perçoivent votre musique… parce qu’en France, par exemple, le public semble subjugué par votre musique…

Je dois dire que je n’ai jamais espéré que Jinjer devienne populaire en France. Parce que vous avez tellement de groupes extraordinaires. Et j’ai, moi-même, des groupes français qui font partie de mes groupes favoris. D’ailleurs, toute la scène européenne est vraiment très très folle. Mais c’est super cool de se dire que des français écoutent notre musique.

 

Mais dans votre pays ?

Nous sommes loin d’ici. Et la situation de la scène heavy est vraiment différente de celle que l’on rencontre partout ailleurs en Europe. Je dois d’ailleurs dire qu’il n’y a pas vraiment de scène. Il y a quelques groupes, et certains jouent dans des caves dans la capitale. Mais dans les autres villes, c’est plutôt amateur. Il y a des groupes, oui, et même des très bons mais il n’y a pas de public. C’est le plus grand problème dans notre pays.

 

J’ai pu voir que votre EP recevait un certain succès sur les plateformes comme Youtube. Et votre succès ne se dément pas. Vous avez jouer avec Arch Enemy l’an dernier… 

Oui, c’est vraiment cool mais pour les musiciens, ce n’est pas si important d’être populaire. C’est plutôt comment ils apprécient la musique qu’ils font, comment ils la créent, comment ils la jouent en live, combien d’auto-satisfaction ils obtiennent par ce biais… Mais être populaire n’est vraiment pas la chose la plus importante. J’ai d’ailleurs deux exemples de groupes extraordinaires voire légendaires : Gojira et Dillinger Escape Plan. Gojira fait des concerts devant des milliers de personnes. Et Dillinger n’a jamais joué devant le même public ou dans les même endroits que Gojira. Mais personne, absolument personne, ne dira que Dillinger est moins bien que Gojira. Avoir du succès n’est vraiment pas la chose la plus importante. La plus importante est de faire de la musique qui est différente, qui est innovante, qui a de l’influence sur les gens,… Ça, c’est important !

 

Vous êtes sincères dans votre démarche donc…

Bien sûr ! Regarde l’EP que nous avons fait. On aurait pu faire un album qui ressemble aux autres, un album plus soft, un album plus pop…Avec Tatiana, cela aurait été très facile de faire des chansons plus entraînantes, avec des mélodies plus entêtantes… Mais nous avons pris exactement le sens inverse. Car on fait exactement ce qu’on veut. Et c’est le résultat de notre vision à tous. Notre expression.

 

Et comment faites-vous pour écrire vos titres…

Je n’ai jamais eu la démarche de m’asseoir et de me dire : « Je vais écrire ». Passer des journées comme ça. Jamais ! Souvent, je me dis « Allez, essaie ça ou essaie ça ». Et si cela ne fonctionne pas et que rien ne se passe, j’arrête. Peut-être cela marchera la prochaine fois ou demain ou la semaine prochaine. Des choses arriveront éventuellement. C’est notre approche.

 

En tout cas, le concert était cool…

Oui, le public était génial et il y avait du monde devant la scène… Ça fait vraiment plaisir.

 

Jinjer

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