Second assaut pour nos Germains de Nornír, toujours menés tambour battant par sa leader Lethian (guitare/chant) depuis 2014, date de fondation du clan du côté de Freiberg, en Saxe. C’est donc en plein cœur de l’Allemagne actuelle, bien au-delà du limes que craignaient tant les Romains durant l’Antiquité, qu’évolue cette horde sauvage qui ne donne pour autant dans la facilité d’un pagan metal convenu, mais bel et bien dans black metal brut, puissant, et racé. Succédant au déjà remarqué Verdandi en 2019 (Northern Silence Productions), Skuld affiche une efficacité redoutable, que ce soit dans ces riffs de guitare extrêmement puissants et incisifs, parfois assez classiques (« Krigsrop »), ou plus modernes (« Hel’s Postulate »), que dans ses rythmiques davantage mid-tempo. Ici, ce n’est pas tout le temps des attaques sonores et soniques sous forme de blasts beats (comme sur le rapide et véloce « Dedicated to the Night » ou « Høst, du ville kraft »), non, loin de là. Les fidèles guerriers Angrist, Farliath, et le nouveau venu à la basse, Matunos, aiment à varier leur black metal, sous l’égide de leur cheffe de clan. On ressent d’ailleurs diverses influences heavy et thrash/black très intéressantes, contribuant grandement au façonnage des structures des morceaux et à leur évolution tout au long de leur développement, entrecoupés de breaks efficaces (« Pest », « Høst, du ville kraft »). Bref, rien de linéaire ici, ou alors quand cela peut le paraître, c’est volontaire et relativement hypnotique (encore l’exemple de l’excellent « Hel’s Postulate ») pour un résultat totalement habité et captivant.
Musicalement, on pourrait rapprocher quelque peu le black metal de Nornír aux sonorités sombres et violentes de ses voisins bataves d’Asagraum, même si au-delà du point commun d’avoir chacun une terrible frontwoman (Lethian vs Obscura) et d’évoluer dans un black metal à la fois classique rendant hommage à ses pairs, mais avec un minimum d’innovation et de modernisme, une différence pointe à l’horizon au fur et à mesure de l’écoute de Skuld. En fait, un sentiment de paganisme se détache chez Nornír, chose qui n’a pas lieu dans le style typiquement sataniste de la bande à Obscura (Hanna van den Berg de son vrai nom). En témoignent l’intro de l’album (« Vígr ») ou l’interlude « Galdr », mais aussi, et surtout, la formidable reprise de « Helvegen » (Wardruna) au milieu de l’album, version qu’il serait intéressant de faire écouter à son auteur Einar Selvik (interview Motocultor 2023 à retrouver très bientôt ici !). N’oublions pas que l’artiste norvégien de folk a démarré, hé oui, sur la scène black et doom metal de Bergen avec Sahg mais aussi Gorgoroth (à la batterie sous le pseudonyme de « Kvitrafn » entre 2000 et 2004) et auprès de Gaahl, et côtoie toujours les membres d’Enslaved dont Ivar Bjørnson (les albums Skuggsjá, Hugsjá).
Finalement, les apparences ne trompent pas, et comme nous le présupposions au début de cette chronique, le retour aux racines, à la sauvagerie des temps anciens, mais aussi au respect de la nature et des choses simples, prédomine chez Nornír. Le groupe allemand arrive bien après des batailles car Helrunar ont déjà posé les ponts depuis des lustres dans le genre, mais néanmoins, leur touche pagan/black s’avère intéressante et vraiment sincère, à l’image de l’outro « Valr » qui ponctue avec brio la fin de ce second effort plus que convaincant. Il nous tarde à présent découvrir live Skuld avec Lethian et ses comparses pour vivre toutes ces émotions pures. [Seigneur Fred]
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