On pourrait se dire : « tiens, on prend les mêmes et on recommence » à l’écoute de ce nouvel et tout de même douzième album studio (!!) des Suédois de The Crown. Eh bien, on pourrait répondre à la fois oui, et non, comme dans un sujet de dissertation en français (thèse/antithèse/synthèse). Tout d’abord oui, car ils se font un clin d’œil à eux-mêmes ici sur le titre Crown of Thorns, puisqu’il s’agit de leur ancien patronyme à leur fondation en 1990 du côté de Trollhättan, et ce jusqu’en 1998 où ils furent contraints pour des raisons juridiques de changer de nom à cause d’un tiers identique mais d’origine américaine. Outre cette private joke interne toute simple, on retrouve sur ce nouveau disque tous les ingrédients qui ont forgé le son suédois et le style de The Crown depuis toutes ces années, à savoir : des riffs en béton armé construit sur une section rythmique pachydermique et implaccable, avec des soli de guitares d’une vélocité imparable signés la plupart du temps Marcus Sunesson, l’autre gratteux et principal compositeur Marko Tervonen se chargeant de jouer la rythmique en général (comme il nous l’a expliqués d’entrée dans notre interview). Côté rythmique justement, un nouveau cogneur a pris place derrière les fûts : Mikael Norén. Celui-ci n’est pas vraiment un inconnu car on l’a longtemps entendu chez les excellents Impious (actuellement en arrêt), groupe de thrash/death originaire du même coin. Et bien entendu, quel plaisir d’avoir Johan Lindstrand au micro depuis son retour au bercail en 2011. Trop souvent sous-estimé chanteur et parti un temps mener son side project One Man Army and the Undead Quartet (entre 2004 et 2012 durant le split de The Crown devenant alors Dobermann), ce dernier impression toujours autant à s’époumoner comme un diable. Le parfait exemple de ce come back parfaitement assumé et réussi ici pourrait être la chanson « Churchburner », premier extrait de l’album Crown of Thorns.
Clairement, l’objectif était donc de revenir à la formule originale de The Crown, c’est-à-dire le death/thrash metal d’antan sans les digressions trop mélodiques des derniers enregistrements, comme Royal Destroyer (2021) ou Death Is Not Dead (2015), ou une certaine redodance commençait à se faire sentir. Sur ce nouvel effort, outre le très efficace « Churchburner » donc, on pourrait tout autant citer d’autres morceaux comme le très heavy et introductif « I Hunt with the Devil », le très speed « The Agitator », ou le furieux « God-King ». Et l’objectif de revenir à cette formule est donc aujourd’hui atteint ! The Crown semble intemporel, lui qui a influencé d’autres groupes contemporains scandinaves dans ce même genre. Mais à la question existentielle initiale si le groupe revenait à ses débuts et reproduisait la même formule qu’auparavant « en reprenant les mêmes et on recommence », eh bien on note aussi des surprises qui pourraient séduire un autre public, peut-être plus large et qui n’aime pas que du bourrin, car mine de rien, chez The Crown, il y a toujours cette recherche mélodique. Par exemple sur le nouveau single « Gone to Hell », le quintet suédois s’essaie presque au groove metal (voir clip vidéo ci-dessus).
Sur « Martyrian, le jeu se calme et laisse place à des mélodies scandinaves typiques qui prennent le temps de respirer. Sur les précédents albums de The Crown, c’était parfois presque pompeux tellement à force de trop vouloir en faire, les chansons perdant alors de leur mordant et de leur spontanéité. Après tout, il en faut pour tous les goûts au sein du groupe. Les musiciens savent donc ralentir la cadence et ne pas aller toujours à 250 bpm, voire 300. Il y a toujours aussi cette touche speed’n roll et sombre, comme sur « The Night Is Now ». Enfin, nos cinq Suédois sont généreux car ils offrent trois titres bonus d’excellente facture en fin d’album : « Eternally Infernal », « No Fuel For God », et « Mind Collapse ». Par contre, pour les fans qui apprécièrent aussi la parenthèse heavy/gothic metal avec le projet parallèle Angel Blake de certains d’entre eux l’espace de deux albums (Angel Blake (2006) et The Descended (2008), visiblement, ce n’est pas au programme quand on a posé la question au guitariste Marko Tervonen qui a alors répondu : « We never know ! ». Dommage. En attendant, contentons-nous déjà de cet excellent cru 2024 de The Crown (of Thorns ;-)) qui parvient à perpétuer leur style légendaire avec un minimum d’innovations plutôt accrocheuses. [Seigneur Fred]
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