WARREL DANE
Shadow Work

 

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Les albums post mortem semblent visiblement à la mode ces derniers temps, entre celui de notre Johnny national par exemple qui se vend comme des petits pains, et en ce qui nous concerne davantage ici, celui de l’ancien chanteur de Sanctuary et Nevermore, j’ai nommé le défunt et regretté Warrel Dane (R.I.P.) disparu en décembre 2017. Si les dernières prestations live de l’Américain firent peine à voir parfois dans le passé, notamment déjà avant le split de Nevermore de 2011 (cf. Hellfest 2010 dont on peut encore voir un extrait sur le DVD du festival), nous préférons retenir aujourd’hui le meilleur en studio et live de ce formidable chanteur de son vivant, et nous focaliser à présent sur son dernier testament studio. Ironiquement, ce dernier ouvrage en solo paraît en cette période de fête des morts, et se compose de huit morceaux dont une intro « Ethereal Blessing », sorte de court rite initiatique avec quelques percussions et vocalises, six chansons originales, et une reprise de The Cure « The Hanging Garden », comme on avait l’habitude déjà sur Praises To The War Machines (Century Media/2008) où figuraient deux covers : une des Sisters Of Mercy, et une autre de Simon & Garfunkel. Si à l’époque du premier album justement il y a dix ans, le chanteur présentait une approche plus Heavy/Rock en termes de format de chanson et était alors accompagné de musiciens de renom (le batteur belge Dirk Verbeuren (ex-Artsonic, ex-Headline, ex-Soilwork, ex-Aborted, Megadeth) ; le guitariste/bassiste Peter Wichers (ex-Soilwork)), tel un super groupe, pour ce second album studio il en est tout d’autre. Il s’agit de musiciens de session brésiliens méconnus tous issus d’un groupe commun de Heavy Metal : Addicted To Pain. Attention, cela n’enlève rien au talent des compagnons de disque de Warrel Dane car dès le second titre, « Madame Satan », on plonge en plein dans le Nevermore très Heavy et mélodique de l’excellente période Dead Heart In A Dead World (Century Media/2000). Refrain captivants et couplets entraînants, même si le chanteur a probablement dû s’y reprendre à plusieurs reprises pour chanter juste en studio, le résultat est splendide. Survient ensuite le très Heavy mais plus nerveux « Disconnection System » avec son riff Thrashy et moderne. Là encore, on pense au Nevermore de la belle époque où Warrel Dane et le guitariste Jeff Loomis s’entendaient alors au diapason… Sur « As Fast As The Others » dont l’intro se compose d’un solo en tapping, l’ambiance est plus apaisée, avec un rythme mid-tempo et un refrain aux chœurs particulièrement entraînants qui jalonne ce morceau ponctué d’un court solo de guitare à la fin avant de laisser place de nouveau aux chœurs. Mais la chanson-titre « Shadow Work » se veut plus virulente et martiale par son riff et sa batterie très saccadée. Là encore, l’ombre de Nevermore guette l’auditeur nous renvoyant à des breaks très Heavy et des riffs plus dissonants comme sur This Godless Endeavour (Century Media/2005) ou bien tout simplement au classique Dead Heart In A Dead World de par son aspect très propre et carré. La reprise de The Cure « Hanging Garden » offre une relecture très speed de l’original de Robert Smith qui peut-être appréciera, lui qui a déjà travaillé sur disque avec un célèbre producteur Métal (Ross Robinson). Le chant de Warrel est soutenu et plaintif, relativement varié. Lorsque survient le refrain, on est bluffé par l’ex-Sanctuary. Survient alors la pluie, élément météorologique omniprésent à Seattle, sa ville d’origine avec le superbe et mélancolique « Rain ». L’air de guitare en arpège (probablement samplé en studio) contient une mélodie entêtante presque orientale, nippone par exemple, aux sonorités aigues, arrangée de quelques cordes (violoncelle), ponctue tout du long ce formidable titre poignant qui s’énerve quelque peu sur la fin avant de finir de la même manière qu’il a commencé, c’est-à-dire par quelques gouttes de pluie avec en fond l’orage. En outro, le producteur a sorti les violons sur « Mother Is The Word For God » histoire de rester dans le pathos après « Rain » dans le track-listing de l’album. Très orchestré (ce sont probablement des samples de violons là encore), Warrel Dane y chante de manière dramatique comme il savait si bien le faire, avec d’abord une guitare acoustique qui laisse place progressivement à un chanteur colérique et qui explose au bout de deux minutes sur le second et puissant couplet avant de laisser place à des guitares électriques énervées grâce aux riffs appuyés par les musiciens brésiliens et deux ou trois soli intéressants jusqu’à une fin très Heavy et atmosphérique. Cette huitième et longue plage de plus de neuf minutes conclut une œuvre posthume finalement assez cohérente et relativement variée, sombre, tourmentée, à l’image du talent de Warrel Dane, un chanteur disparu bien trop tôt comme tant d’autres… [Seigneur Fred]

 

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