WITCHFINDER : Claque manoriale

Le quatuor doom/stoner psychédélique Witchfinder n’en est pas à son premier coup d’essai et revient sur le devant de la scène française avec Forgotten Mansion, un troisième LP plutôt réussi. C’est sans tabou et avec enthousiasme que tous les membres du groupe clermontois se sont prêtés à l’exercice de l’interview à l’occasion de la sortie de leur nouvelle galette sur le label Mrs Red Sound. [Entretien réalisé avec Tom (batterie), Kevyn Raecke (claviers), Clément (basse/chant), et Stan (guitare) par Norman Garcia – Photos : DR]


Votre nouvel album Forgotten Mansion a été précédé par la sortie de votre EP Endless Garden en juin dernier, qui coïncide avec l’arrivée dans le groupe de Kevyn Raecke au clavier. Pouvez-vous revenir sur ce choix d’intégrer Kevyn à Witchfinder et sur la plus-value engendrée ?
Tom : Tout est parti d’un morceau présent à la toute fin de notre second LP Hazy Rites « Dans l’instant ». Pour sa version studio, on avait intégré un orgue, ça nous a beaucoup plu, et la composition allant dans cette direction, ça nous a paru logique d’intégrer Kevyn pour assurer ce poste.

Le titre de l’album est illustré par un artwork particulièrement réussi. Ce manoir (« mansion ») auquel vous faites référence sort-il de votre imagination ou existe-t-il vraiment ? Et plus généralement, d’où vous vient cette attirance pour cet univers mêlant fantômes, ésotérisme, ambiances lugubres, etc. ?
Kevyn : On voulait une représentation de l’esprit dans son sens général. Étant une notion assez large, le manoir c’est présenté comme une image assez évidente. Les pièces représentent les différentes émotions/sensations comme la nostalgie, la sérénité, la mélancolie… Donc non, il n’existe pas réellement.
Clément : Entre attirance spirituelle, émotions fortes, héritage infantile des films d’horreur et d’épouvante et plus globalement expériences ésotériques ; nous nous retrouvions tous dans ce thème qui en plus représente bien le doom.

Vous avez décidé de bosser une nouvelle fois avec  Haldor Grunberg au Satanic Studio en Pologne. Comment vous êtes-vous rencontrés et qu’est-ce qui vous a amenés à collaborer ensemble ? Haldor apparaît même en featuring (chant) sur le titre « Marijuana ».  Était-ce prémédité ?
Tom :
Haldor produit en fait des groupes qu’on adore (Dopelord, Weedpecker, Belzebong)… Tout remonte à la préparation de Hazy Rites, on l’a contacté pour lui présenter notre projet et il a accepté de travailler sur l’album. Il nous est donc paru évident de travailler encore avec lui sur Endless Garden et Forgotten Mansion.
Clément : Pour ce qui concerne le featuring, on avait dans l’idée d’en faire un depuis assez longtemps mais nos recherches étaient dirigées vers des chanteurs de groupes de hardcore. Haldor fait du clavier et occasionnellement du chant dans THAW, sa voix collant parfaitement à ce passage, on lui a demandé et il a adoré l’idée.

Toujours à propos de ce titre « Marijuana », les points de vue divergent concernant cette l’utilisation de cette « substance ». Et aborder cette thématique reste encore délicat en 2022 en France. Quel est donc votre point de vue sur ce sujet ?
Tom : On ne trouve pas ce sujet délicat. C’est pour cela qu’on l’aborde dans ce morceau du point de vue d’une personne s’étant retrouvée piégée par son propre vice.  Cependant, nous ne sommes pas contre l’utilisation de cette substance, regardez nos voisins européens !

Quel regard portez-vous sur l’évolution du groupe et votre musique depuis vos débuts, où l’on a notamment pu vous découvrir lors de la nuit du métal à Clermont en septembre 2017 ?
Tom et Clem : On est très content du travail accompli, on maîtrise mieux ce qu’on joue et on souhaite désormais élargir encore plus nos horizons tout en se faisant plaisir.

Parmi les groupes qui vous ont influencés, on cite évidemment Black Sabbath, mais aussi Sleep et Monolord par exemple. Vous arrive-t-il dans votre quotidien d’écouter d’autres genres de musiques, qui à leur manière, peuvent également vous influencer d’une façon ou d’une autre ?
Tom :
Principalement les groupes que tu as cités nous influencent, mais au quotidien j’écoute beaucoup de hardcore, ça va de King Nine en passant par Converge, Code orange, Jesus piece, Trail of Lies… Ce n’est pas évident de faire le lien avec Witchfinder mais j’essaye d’insérer des grooves de ce genre dans ce qu’on fait. Sinon j’écoute beaucoup de rap, là encore ça passe par des légendes comme Mobb Deep ou encore Wu Tang.  Mis à part ça, j’aime beaucoup le post rock et le math rock.
Clem : Oui, Sabbath c’est sûr, et les autres aussi, d’ailleurs moi je me nourris de beaucoup de styles différents mêmes si j’écoute principalement du stoner, doom et black metal. J’aime tout quand je trouve cela bien fait et que cela me parle émotionnellement que je ressens quelque chose de fort en fait. En dehors de ce style, j’écoute de l’électro (Carpenter Brut, Justice, Bore Gore) ou encore de la funk de temps en temps. Je trouve cela important de diversifier ses écoutes déjà pour ne pas se lasser du style de prédilection que tu aimes plus que tout et aussi pour s’inspirer de tout ce qui se fait ailleurs même, pourquoi pas, pour en insérer dans le groupe ! 
Stan : Monolord est le groupe qui m’a fait découvrir cette scène donc forcément c’est une influence. Après mes influences hors doom ou stoner sont surtout portées vers le grunge avec des groupes comme Alice In Chains ou Smashing Pumpkins. Je m’intéresse récemment à la scène gothique et alternative voire indus. Comme Nine Inch Nails ou Type O Negative. Et hors métal, j’écoute beaucoup de post-rock , LO-FI, et de la country/gospel/bluegrass.

Tous les membres du groupe participent-ils à la composition des morceaux ? De manière plus générale, comment se déroule le processus de composition d’un titre chez Witchfinder ? 
Tom : Donc oui et non. Stan, le guitariste, est le compositeur principal, mais nous apportons tous notre pierre à l’édifice en incorporant nos influences respectives.
Stan : La première étape de la composition, c’est l’inspiration, ensuite s’en vient un processus d’analyse structurelle et émotionnelle des morceaux inspirants. Riff après riff, la construction de nos morceaux se fait de bouts assemblés et arrangés pour produire ce que nous voulons tous. Le feeling de Stan se fait sur son humeur actuelle, au moment T de la composition car c’est bon de rappeler que la musique est un exutoire nécessaire pour les musiciens.

Pour les amateurs que ça peut intéresser, quel matos utilisez-vous pour jouer (grattes, amplis, etc.) ?
Guitare : Gibson Flying V Amplis Orange OR50 Cab Orange PPC412 et Green Matamp 412/or100. 
Basse : Sanberg Bullet booster custom cab amped 610hlf et svt 3 pro et ashdown mag300 + cabinet 810.
Batterie : Mapex Pro M 5 fûts en kit (médium, treble, floor, snare et kick), cymbales Sabian en kit classique, ride crash Sultan charley.
Claviers : clavier midi Maudio + Expender ferrofish b4000+. On gardera les pédales secrètes ! Mais on utilise majoritairement des pédales de chez Earthquakes Devices.

Pouvez-vous nous raconter une anecdote particulière, curieuse ou marquante concernant le groupe depuis sa création ? Un truc « fou » qui vous serait arrivé ?
Clément : Houla ! Alors des anecdotes, il y en a à foison entre tous les kilomètres que nous avons faits… On ne peut pas tout citer mais si on devait en retenir que quelques-unes : on a joué avec beaucoup trop de matos dans un pub à Tours ou les amplis touchaient le plafond et où ils devaient scotcher les bières au bar… Un endroit perdu à la frontière luxembourgeoise où le patron crache du feu et où l’électricité n’a pas tenu plus de deux chansons. Ou bien encore la police venant suite à des plaintes de voisins en tournée pour nous dire que nous jouions trop fort et on en passe !

Quel est votre meilleur souvenir en concert, et quel est le groupe avec qui vous avez partagé la scène qui vous a le plus impressionné ?
Kevyn : On en a beaucoup partagé la scène avec les Red Fang, jouer au Red Smoke Festival en Pologne ou encore le festival Macumba. Avec des amis, c’est pareil, on pourrait en parler des heures ! Techniquement parlant : Elder. Et scéniquement parlant : Red Fang, ce sont les patrons !

On parle souvent de Witchfinder comme un excellent groupe de l’underground français… Ce statut vous convient-il ?
Stan : Ce statut nous convient bien parce que si un jour on arrive à devenir des patrons de l’underground international, on dirait pas non ! Même si c’est tentant de sortir de notre niche pour toucher un public plus large, nous nous sommes faits grâce à notre public et nous sommes fiers d’eux et l’élargir pour être fier d’avoir encore plus de personnes, nous trouvons cela honorable. Après, nous aimerions vivre de notre musique et s’il faut toucher d’autres sphères pour pouvoir juste vivre de notre passion, nous ne sommes pas fermés. Mais pour rassurer tout le monde, on ne se vendra pas pour faire ce que nous n’aimons pas. 

Merci les gars et bonne release party (Ndlr : le 18 novembre 2022)!!
Tout le monde : Merci et à bientôt sur la route !



Publicité

Publicité