DØDHEIMSGARD : Black Medium Current

Black Medium Current - DØDHEIMSGARD
DØDHEIMSGARD
Black Medium Current
Black metal/indus
Peaceville Records

Pour s’intéresser à l’avant-garde du black metal, il faut indubitablement s’imprégner de l’œuvre de Dødheimsgard. Le quatuor norvégien tout droit venu de la terre natale du black metal nous gratifie d’un sixième album studio qui poursuit ses expérimentations philosophiques du metal comme des réflexions humaines. Fort de ses origines issues du metal extrême scandinave depuis 1994 (toujours profondément ancrées), le groupe d’Olso se différencie cependant par sa touche avant-gardiste et industrielle, à l’instar d’un Ulver ou plutôt d’un Thorns dans une veine dissonante et bruitiste, voire même électro pop quand on écoute le long morceau d’introduction « Et smelter » qui démarre effectivement comme du BM traditionnel mais qui se termine par de grandes envolées au synthé accompagnées de chœurs harmonieux ! Les atmosphères étayées sont développées sur de longs morceaux variés, à la composition complexe (« Det Tomme Kalde Morke »), et par essence disruptifs. Comme si les Norvégiens ne pouvaient dignement laisser leur auditoire se reposer sur ses deux oreilles, des morceaux débutant sur une note brutale et sombre laissent place à des clairières de paix, se terminant en apothéose de manièrepresque electro pop, sans oublier de traverser une zone de turbulences purement indus. On est frappé par « It Does Not Follow », une plage intéressante dont le beat enlevé, la guitare jazzy et quelques éléments électroniques savamment dosés nous font progressivement entrer en transe. Les parties vocales sont fidèles au black elles aussi, mais retravaillées à l’aune de jours plus modernes. Tantôt gutturales et sinistres, tantôt gémies (« Tankespinnerens Smerte »), ou carrément dissonantes (« Interstellar Nexus »), elles témoignent d’un travail soigneux de traduction des émotions : une tristesse, un désespoir, un spleen dont les chœurs entêtants rehaussent l’ancrage au plus profond de nous. L’interlude au piano « Voyager », ilot de répit, et l’électronique de « Requiem Aeternum » en rajoutent au sentiment général. Comme pour rompre avec ses racines et les assumer à la fois, Vicotnik alterne ici le chant dans sa langue natale et celle de Shakespeare. Il nous plonge dans sa pensée sur l’existence et la liberté, l’art et la servitude. S’inspirant du précédent artwork de l’excellent A Umbra Omega, la pochette elle-même invite à une réflexion platonicienne : les idées sont-elles asservies à la matière ? Ou la matière elle-même ne peut-elle provenir que du monde des idées ? Bref, je vous propose de méditer tout cela en écoutant ce dernier Dødheimsgard ! [Marie Gazal]

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