FESTIVAL BEAUREGARD : LIVE REPORT @HEROUVILLE-ST-CLAIR (FR) DU 06/07/2023 AU 09/07/2023

C’est sous un soleil de plomb que la nouvelle édition 2023 du festival normand Beauregard s’est déroulée. Un festival toujours aussi éclectique même si certes moins « métallique » que l’année dernière. Nous avons tout de même eu droit à quelques prestations rock et post-punk réjouissantes, et un final explosif le dimanche avec d’abord les Australiens d’Airbourne puis nos Frenchies de Shaka Ponk, survoltés et à l’imagerie saisissante, en pleine tournée d’adieu. [Live report : interviews, textes et photos par Norman « Sergent » GARCIA]

Jeudi 06 juillet


dEUS
Le quintette belge de rock alternatif emmené par Tom Barman, nous rappelle aux bons souvenirs des 90’s, tout en promouvant son nouvel album How to Replace It. Une prestation en somme sobre et efficace en ce jour ensoleillé.

Royal Republic

Le rock survitaminé des suédois, à la manière de leurs compatriotes de The Hives qui avaient enflammé Beauregard en 2019 et en 2013 (!), va retourner Beauregard. Emmené par son charismatique chanteur-guitariste Adam Grahn, le quatuor livre un show millimétré, dansant et communicatif, qui débutera par « Fireman Dancer », en passant par les autres hits « Full Straem Spacemachine » ou « Rata Rata ». Bardé de ses guitares « ‘Heavy metal » ou « Acoustic, made for love » comme il aime à les définir, Adam G. et ses comparses qui ne sont pas en reste (Per Andreasson, le batteur, jouant plusieurs fois debout), font le spectacle de bout en bout, s’autorisant même un petit intermède acoustique à quatre voix et harmonica, avec la revisite de leur titre « Boomerang ». Assurément la bonne surprise du festival, alors que le groupe vient de sortir un double EP vinyle (Hits & Pieces / Live At l’Olympia), et tarde à donner un successeur à Club Majesty sorti en 2019.

Royal Blood

Royal Blood remplace au pied levé le très attendu Blur, qui a déclaré forfait quelques jours avant le début des festivités. Et force est d’avouer qu’on ne va pas bouder notre plaisir devant l’excellente prestation du duo britannique qui enchaîne ses hits « Figure It Out », « Come On Over »…devant des lights remarquables. Le set proposé est carré, énergique et comblera aussi bien les fans que les déçus par l’annulation de Blur.


Vendredi 07 Juillet

Cemented Minds

Les régionales de l’étape (avec le bassiste Pierre Goubard ayant œuvré chez feu le groupe screamo Amanda Woodward) sont les premiers à investir la scène de Beauregard ce vendredi. Après une belle release party le 25 mai au Big Band Café d’Hérouville, les Caennais, qui ont déjà foulé les planches du Bataclan (!), sont ravis de pouvoir jouer à domicile sur un si grand site et livrent une belle prestation. Leur post-punk qui tire ses influences aussi bien de The Cure ou des Eagulls (illustre groupe de post-punk britannique) en passant par Beastmilk (sur les cendres duquel est né Grave Pleasures), mérite le détour et semble promis à un bel avenir. Leur premier album The Future is The End vient tout juste de sortir chez Floral Records

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En bonus, petite interview avec l’ensemble du groupe caennais, extraits :

Alors quelles sont vos impressions suite à votre passage sur la scène John, vous avez ouvert la journée, pas trop difficile de commencer si tôt ?

Camille : C’était vraiment cool, et vu notre heure de passage (16h30, ouverture des portes, ndlr), on pensait vraiment qu’il y aurait moins de monde, avec cette chaleur, les gens présents avaient l’air d’apprécier en tout cas, et puis on a vu du monde qui arrivait en cours de set. 

Arnaud : Peu importe l’horaire en fait, nous on est juste content d’être là

Antoine : Sur un espace assez impressionnant, une grosse scène en plus. Et puis pour nous Beauregard ça représente quand même quelque-chose de spécial, étant en majorité originaires du coin ou y habitant.

Arnaud : Enfin sauf Camille (le guitariste et principal compositeur, ndlr), qui vit maintenant en Autriche depuis trois ans et demi !

En Autriche ? Du coup comment se sont passées vos cessions d’enregistrement de votre premier album Tomorrow is the End ?

Camille : Et bien difficilement, j’ai fait plusieurs allers-retours entre l’Autriche et la France, en essayant d’arriver avec des choses plus ou moins préparées. En fait comme sur ce projet c’est moi qui propose et compose, j’envoie des maquettes aux autres membres du groupe, puis en répette on teste ce qui a été pensé, puis on valid…ou pas. Après on n’a pas besoin de se voir toutes les semaines pour tout ce travail d’écriture préalable.

Vous avez aussi d’autres groupes que Cemented Minds pour la plupart d’entre-vous ?

Pierre : moi perso c’est mon seul groupe actuellement.

Camille : moi j’ai arrêté trois autres groupes pour me consacrer à Cemented Minds, qui est un peu « mon » projet.

Arnaud : pour ma part j’ai choisi l’intermittence, ce qui me permets d’avoir notamment un autre groupe à côté, Troublon, qui fait dans le chaotic hardcore. Et je fais également partie de l’équipe de montage et de démontage des scènes de Beauregard !

Pierre : et tu joues entre les deux ! non en fait c’est « Marsoin » (Antoine, ndlr) qui a trente-six-mille groupes !

Geminii - EP

(Geminii notamment, notrechronique à retrouver ici  )

Et du coup comment s’est monté Cemented Minds ?

Arnaud : avec Camille on était à un petit festival ou chacun de nous jouait avec son groupe et puis en discutant on s’est rendu compte qu’on écoutait pas mal de post-punk à cette période, du genre Eagulls, et de fil en aiguille on s’est dit pourquoi ne pas faire un truc ensemble. Camille c’est un peu un « cinglé » du travail, il avait déjà mille maquettes dans son coin alors…

Camille : nan en fait je me suis mis à travailler une fois qu’on s’est dit qu’on allait monter ce projet…

Arnaud : oui mai tu as fais ça plutôt rapidement…

Camille : on a en fait démarré le projet à l’été 2016 et on a commencé à répeter réellement à partir de janvier 2018…sinon on se connaissait tous par le biais d’anciens groupes punk hardcore de la scène caennaise mais on n’avait jamais joué tous ensemble, sauf Pierre et moi avec End It (grindcore).

Vos derniers clips sont comme un hommage aux films des années 50/60, pouvez-vous nous en dire plus…

Camille : oui on utilise des morceaux d’un seul film pour en faire quelquechose de cohérent. Le dernier film en question (pour le clip de « A Hooded Witness », ndlr) est Carnival of Souls, un film fantastique américain de Herk Harvey, sorti en 1962 et qui à l’époque est passé inaperçu. Mais qui est maintenant culte pour les cinéphiles, est libre de droits. Le film n’a pas forcément un rapport direct avec les paroles, c’est ce qui est cool avec un film car tu peux en faire une relecture, il y a un dialogue qui s’opère où tu peux créer plus ou moins des ponts ou carrément donner un autre angle de vision…mais en soi ce n’était pas le but de trouver un film qui collait forcément aux paroles de la chanson.

Antoine : après l’ambiance visuelle de ces vieux films évoque aussi assez bien tout ce côté coldwave et post-punk propre à Cemented Minds…

Perturbator

Il fallait être armé de patience pour pouvoir assister à la prestation de James Kent, puisque son set a démarré peu après 2 heure du matin ! Malgré une audience qui s’est quelque peu étiolée, Perturbator livre une prestation solide mais sans réelle surprise, tandis que le batteur (Dylan Yard ?) permet de donner encore plus de relief aux morceaux, le tout dans une ambiance synthwave/coldwave/gothique bien pesante. Artiste atypique et aux multiples facettes, l’une des dernières productions de Pertubator s’appelle Final Lignt, paru en 2022 avec la collaboration de Johanness Persson de Cult of Luna !

Samedi 8 Juillet

Anna Calvi

Un début de concert peut-être un peu trop calme de la part de l’auteur-compositrice-interprète anglaise, tout en douceur et délicatesse, avant de faire étalage d’une belle symbiose avec sa guitare. Une prestation digne de la virtuose britannique qui avait déjà foulé les planches de Beauregard en 2011. Le véritable dernier album de la charismatique artiste, Hunter, date déjà de 2018 et une suite ravira sans aucun doute les fans de la première heure.

Setlist :
Hunter, Indies, Rider, Wish, Wolf like me/sing to me, Desire, Suzanne, I’ll be your man, Don’t beat the girl, Ghost rider

Nothing but Thieves

C’est la seconde apparition des anglais sur la scène de Beauregard après leur performance déjà remarquée en 2018. Et la principale différence cette année est que le groupe n’est plus un inconnu, les fans reprenant les paroles sur plusieurs titres. Les Britanniques étaient vraiment attendus et ont largement répondu aux attentes du public. Le set se terminera par leur tubesque et puissant « Amsterdam », devant des fans ravis et conquis.

Entretien exclusif avec Conor Mason, le chanteur de Nothing but Thieves, juste avant de monter sur scène :

C’est la seconde fois que vous venez au festival après 2018, peut-on dire que vous êtes tombé amoureux du festival Beauregard ?
Oui c’est vraiment un beau festival, surprenant, je me rappelle très bien de la dernière fois car c’était pendant la coupe du monde de football ! ça reste donc un événement mémorable pour nous.

Dead City Club, votre nouvel album, vient tout juste de sortir. As-tu des premières infos sur son classement dans les ventes et quelles sont les premières critiques à son égard ?
Eh bien l’album est déjà numéro 1 en Angleterre, ce qui est une grande fierté ! En nous avons déjà bien fêté ça ! Ce n’est pas tous les jours que ça arrive. Nous avons reçu également de bons premiers retours, et c’est aussi un album qui ne se cantonne pas qu’au rock, qui nous permet d’ouvrir d’autres portes et d’atteindre d’autres personnes. On s’est vraiment sentis libres sur cet album.

Le groupe a maintenant environ dix ans d’existence, comment mesures-tu le chemin parcouru depuis vos débuts ?
Oh et bien c’est presque arrivé par accident à vrai dire, on était jeune, au début on se cherchait et on ne savait pas trop ou tout ça allait nous mener, on s’est peut-être trop focalisé sur ma voix alors que l’essentiel était de s’attarder aux fondements du groupe. On a parfois fait machine arrière. C’est pour ça que notre premier album était un peu « touche à tout », il y avait du rock, du funk, du punk, ce qui paradoxalement nous a permis d’arriver où nous en sommes, d’avoir confiance en ce que nous faisons, et de proposer des choses que l’on a pas encore faites. Pas seulement pour le plaisir de dire que l’on est éclectique mais pour pouvoir continuer à expérimenter. On prend vraiment du plaisir et j’aime penser qu’on est un groupe de rock qui peut se permettre autant de choses. On est vraiment ouvert, on s’intéresse à tellement de choses…Et puis nous sommes aussi liés par une forte amitié, la communication est super fluide…

… Oui et vous avez un line-up qui n’a jamais changé aussi….
Effectivement, ça compte. Et on se connaît depuis qu’on a 14/15 ans. (ndlr : aux prémices du groupe c’était un autre batteur qui officiait derrière les fûts, en la personne de Dave Dickinson).

Te rends tu comptes que tu as l’une des voix les plus belles du rock en général ?
Vraiment ? Cela me rend heureux d’entendre ça, mais j’essaie juste de faire de mon mieux. Je sais que j’ai une bonne voix, mais de là à dire que je suis l’un des meilleurs. J’aime chante, transmettre des émotions et capter l’auditeur. En tous cas merci pour le compliment !

Quelles sont tes principales influences d’ailleurs ?
J’ai grandi en écoutant avec Nina Simone, Aretha Franklin, Sam Cooke, Ray Charles et aussi Bon Scott quand je me suis mis à la guitare. Plus proche de nous, il y a aussi Jeff Buckley et Thom Yorke évidemment.

Dans beaucoup de festival, peu de groupes jouent le jeu de l’interview avant ou après leur prestation. Malgré votre notoriété grandissante, tu es là, toute en simplicité, à répondre à mes questions, c’est plutôt cool…
Je trouve ça plutôt normal, on aime le faire de toute façon et c’est important pour le groupe, la musique, et pour rester connectés !

Alt-J

Sept ans après sa première visite à Beauregard, le groupe britannique originaire de Leeds nous livre une prestation toute en douceur et mélodique, avec une setlist généreuse.

Setlist : Ferckle, The Actor, In Cold Blood, Deadcrush, Tessellate, U&Me, Matilda, Chicago, Something Good, Philadelphia, John Hurt, Taro, Dissolve Me, Fitzpleasure, Hard Drive Gold, Left Hand Free, Breezeblocks

Dimanche 09 Juillet

Airbourne

Du rock n’roll, de la bière (distribuée au public) et pléthores de riffs pour un groupe en super forme et à la bonne humeur contagieuse. Les australiens enchaînent les titres comme leur fameux « Ready to Rock » ou l’un de leur tout premier morceau « Runnuni’Wild », avec un Joel O’Keefe (guitariste-chanteur) qui n’hésitera pas à prendre un bain de foule dès le troisième titre du concert ! Pour leur retour à Beauregard après 2017, c’est avec une grosse débauche d’énergie et une joie communicative que Airbourne nous offre un excellent apéritif avant les très attendus Shaka Ponk.

Shaka Ponk

Shaka Ponk ! Un final en forme d’adieu époustouflant. Le groupe emmené par leurs duettistes Sam et Frah a totalement renversé Beauregard et même les non-connaisseurs. La mise en scène, les lights et l’apport des choristes, entre autres, apportent une touche originale au show et permettent aux musiciens d’en mettre plein la vue (et aux oreilles) au public qui se régale. Quel chemin parcouru depuis la venue du groupe en 2014 ! Les Shaka Ponk manqueront certainement à la scène française, mais n’ont a pas encore terminé puisque de nombreuses dates sont annoncées jusqu’en 2024.

Ont également joué cette année au festival : Interpol, Animal Triste, The Hauting Youth, The Murder Capital…


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