FM : Ondes de choc

Un anniversaire, un nouvel album qui a déjà conquis les amateurs de rock A.O.R. et une tournée démarrant en Amérique du Sud ! il fallait bien cela aux musiciens de FM, déjà fort éprouvés en 2023 par les problèmes de santé du claviériste Jem Davis, et surtout le décès de Chris Overland, guitariste et membre historique… [Entretien avec Steve Overland (chant/guitare) par Philippe Saintes – Photos : Paul Stewart Hollingsworth]

Steve, 2023 a été une année particulièrement éprouvante pour toi et le groupe…
Ce fut terrible, Philippe. Nous étions en pleine préparation du nouvel album quand Jem s’est vu diagnostiquer un cancer de la gorge lors d’une visite de routine chez son médecin. Il n’a pourtant pas perdu sa bonne humeur, c’est un vrai superman. Deux mois plus tard, il était déjà en rémission et il a pu nous accompagner sur la tournée d’été. Je suis rentré à la maison un dimanche et le lendemain (22 août), mon frère décédait d’un infarctus. Je me rappelle de la première chanson écrite ensemble, « Sunlight », imaginée avant même la formation de Wildlife et de FM. J’ai récemment interprété une version acoustique de ce titre lors d’une série de concerts intimistes en duo avec Jim Kirkpatrick. Chris était un guitariste à la fois technique et mélodique. Il a été influencé par des artistes comme Peter Green, Gary Moore et plus tard Neal Schon. Son souvenir restera toujours présent, pour continuer à avancer malgré notre chagrin.

Comment s’est déroulée la toute première et récente tournée de FM en Amérique du Sud ?
Je n’ai qu’un seul mot : grandiose ! Le public nous a réservé un accueil chaleureux et l’ambiance était excellente. On a pu vivre cette expérience grâce à l’obstination d’un tourneur brésilien qui tenait absolument à ce que l’on vienne jouer là-bas. Honnêtement, on n’avait aucune idée de la popularité de FM en Amérique du Sud. Des fans nous attendaient à l’aéroport pour faire signer des albums et des guitares. Tous les concerts se sont déroulés à guichets fermés avec chaque fois un public survolté. C’est un moment particulier dans notre carrière. Cette tournée m’a fait aussi réaliser qu’il reste encore de nombreux endroits où j’aimerais aller jouer.

Peux-tu nous parler de l’importance de votre premier album, Indiscreet, quarante ans après sa sortie ?
C’est simplement un album à part dans notre discographie. On avait signé un gros contrat avec le label CBS et on nous considérait à l’époque comme le Bon Jovi britannique. (sourire) FM n’a pas obtenu le même statut (rires), mais les planètes étaient alignées à cette période. Indiscreet est devenu un album culte dans de nombreux pays. On y trouve d’excellents titres qui ont passé l’épreuve du temps. Les gens veulent toujours entendre ces anciennes chansons. Lorsque j’ai composé la ballade « Frozen Heart » avec Chris, on a tout de suite eu le sentiment, disons l’intuition, que cela allait fonctionner. Nos deux premiers albums, Indiscreet et Tough It Out renvoient à une période de nos vies qui nous a profondément marqués.

Le titre du nouvel opus Old Habits Die Hard (« Les vieilles habitudes ont la vie dure ») fait justement référence à cette longévité, non ?
Absolument. On est une bande de vieux résistants (rires), comme en témoigne la pochette de l’album (Ndlr : un squelette avec un sombrero et une guitare). Dans les années ’90 avec l’émergence du grunge, les radios et la presse spécialisée ne voulaient plus de nous. On a donc décidé de faire une pause, peut-être a-t-elle été trop longue mais lorsque le rock mélodique est redevenu à la mode, on a repris la route. Le line-up actuel a déjà quinze ans. Jem en est à sa vingt-troisième année chez nous. Le fait que l’on s’entende si bien tous ensemble est notre force. Nous avons eu une carrière incroyable et je suis fier de notre parcours. Et puis on a toujours la même passion et la même énergie qu’il y a quarante ans. C’est ça qui est génial ! Les gros refrains et les harmonies donnent la texture à notre musique et c’est ce que les fans attendent de nous. On retrouve ces fondations sur Old Habits Die Hard. Réaliser de nouveaux albums est vraiment l’élément principal qui fait durer FM dans le temps. Le quinzième est déjà en chantier, à vrai dire… (sourires)

Que penses-tu de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la musique de nos jours, notamment sur la chanson « Now And Then » des Beatles ?
Je trouve ça génial ce qu’ils ont fait avec la vidéo. C’est triste mais il n’y a plus que deux membres en vie alors avoir pu recréer le son si caractéristique des Beatles est vraiment un tour de force. On a l’impression qu’ils sont encore tous là. C’est la même chose pour la chanson « Face It Alone » de Queen avec la voix de Freddy Mercury. Je pense que l’on ne doit pas imposer des règles sur ce qui est possible, ou non, de réaliser grâce aux nouvelles technologies. Il y a une part de nostalgie derrière ces projets, bien sûr, mais les gens aiment cela car ils n’ont jamais cessé d’aimer ces groupes.

Plusieurs grands groupes de rock continuent de se produire sans aucun membre d’origine (Foreigner, Lynyrd Skynyrd,…). Qu’en penses-tu ?
C’est une bonne chose car en fin de compte, c’est la musique qui est importante. Si le groupe arrête, alors il n’y plus de concert. Mick Jones (dernier membre fondateur) a recruté les membres qui composent aujourd’hui Foreigner. Kelly (Hansen) et Jeff (Pilson) sont formidables et le line-up actuel interprète les chansons à la perfection. Une fois de plus, c’est une aubaine pour les fans de voir le groupe se produire sur scène en 2024. Si Mick a donné sa bénédiction, alors il y a une légitimité à continuer. On a ouvert pour Foreigner à plusieurs reprises et on a énormément de respect pour les musiciens actuels.

Quels souvenirs gardes-tu du premier concert de FM au célèbre Marquee Club de Londres en 1985 ?
C’était une petite salle mais on était très nerveux car des monstres sacrés comme les Rolling Stones, les Who ou Pink Floyd, avaient joué avant nous. Les gens faisaient la queue sur le trottoir en attendant l’ouverture des portes. L’ambiance était torride à l’intérieur. J’ai compris ce jour-là que le rock, c’était surtout une communion entre le public et les musiciens. Jouer dans un endroit mythique comme le Marquee devant une foule en liesse fut un moment inoubliable vécu par la formation originelle.

Vous avez aussi eu la chance d’ouvrir pour la seule et unique Tina Turner lors de la tournée Private Dancer. Là aussi encore un souvenir impérissable, je présume ?
Oui, c’était juste après la tournée Bad Attitude avec Meat Loaf. On a eu beaucoup de chance. Bryan Adams ouvrait pour Tina mais en raison du succès de son album Reckless aux États-Unis (N°1), il a quitté la tournée européenne. On nous a alors proposés d’assurer quelques dates. On a joué dans des stades remplis et la courbe d’apprentissage a été rapide en compagnie d’une telle légende. Tina Turner était entourée de musiciens exceptionnels. On a vraiment été verni d’ouvrir pour elle, puis par la suite également pour Bon Jovi, Santana, Gary Moore à trois reprises, Journey, Whitesnake, Kiss ou Def Leppard. Et nous avons eu des affinités humaines et musicales avec chacun de ces icônes du rock.

Tu as sorti ton sixième album solo l’année passée (2023), Sixth avec l’aide de Robert Sahl (Work of Heart). Peut-on parler d’une collaboration fructueuse.
J’avais déjà travaillé avec Rob sur l’album Groundbreaker sorti chez Frontiers il y a deux ans. Il s’est énormément investi et a donné de sa personne à 100% sur Sixth. Tu te sens tout petit à ses côtés car c’est un musicien et un auteur-compositeur de classe mondiale. Je voulais faire un album dans le style de Toto à la fois commercial, mélodique et techniquement orienté rock, et la première personne à qui j’ai pensé pour m’aider, c’était Robert. Il a directement composé quelques chansons qui correspondaient exactement à ce que je voulais. Notre volonté est de continuer à travailler ensemble de toute façon, car nous avons développé une telle relation fusionnelle et amicale si intense.

Outre le prochain FM déjà en cours de travail comme tu le disais précédemment, as-tu d’autres sorties prévues dans les prochains mois de ton côté encore ?
Oui, le troisième album de Lonerider est terminé. On retrouve le même line-up, Chris Childs (Thunder) à la basse, mon compère Steve Morris (Gillan, Shawdowman) aux guitares, Simon Kirke (Free, Bad Company, Wildlife) à la batterie, et moi au chant.

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