KING WITCH
Projection astrale

Avec l’actualité incertaine de ces derniers mois, difficile d’établir des projets à plus ou moins long terme, surtout pour un artiste qui sort un nouvel album de Heavy/Doom Metal puissant et mélodique comme King Witch, et qui trépigne d’impatience de partir en tournée pour le présenter live face à son public, la rage au ventre ! Les Ecossais ont pris leur mal en patience, expérimentant la projection astrale sur leur second effort Body Of Light, à défaut de projections de concerts dans le futur… [Entretien avec Jamie Gilchrist (guitares) et Laura Donnelly (chant) par Seigneur Fred – Photo : Alan Swan Photography]

Êtes-vous toujours satisfaits de votre premier album Under The Mountain avec lequel on vous a découverts en 2018 ? Quelle expérience avez-vous retenu de vos concerts en Europe et ailleurs dans le monde (Amérique…) ?
Jamie : Oui, toujours très fier d’Under The Mountain. J’ai l’impression que ça fait longtemps qu’on l’a enregistré ! Ce n’était pas un album facile à faire car le premier, mais je l’apprécie toujours. Il nous a donné l’opportunité de jouer dans plein d’endroits à travers l’Europe où nous n’avions jamais été auparavant. C’était génial d’aller voir des gens dans d’autres pays chanter tes chansons et porter tes T-shirts ! Pas de tournée américaine pour l’heure mais j’espère un jour.
Laura : Oui, je suis toujours très fière moi aussi d’Under The Mountain. Cela fut fantastique et fun de faire partie de cet album d’un groupe en plein développement et je pense que l’on peut clairement noter notre développement depuis l’EP jusqu’à notre tout nouvel album Body Of Light à présent. L’album Under The Moutain possède en lui une touche de folie, je trouve. À l’époque de sa conception, il y a eu tout un tas d’interruptions liées notamment à des changes de line-up, chose inévitable dans un groupe, et on a dû alors recommencer encore et encore ce qui fait, je pense, que ce disque a un petit quelque chose d’urgent ou de précipité du coup. On a été chanceux d’avoir ensuite un line-up solide dans King Witch pour le nouvel album Body of Light. Et je crois que le résultat donne un son fluide beaucoup plus naturel. Comme dit Jamie, c’était cool car cet album nous a permis de jouer un peu partout dans le monde, notamment en Europe, et on a pris beaucoup de plaisir à jouer sur scène notamment en Grande-Bretagne et en Irlande.

Deux ans après Under The Moutain, comment avez-vous préparé les chansons de ce second album Body Of Light ? Qu’avez-vous essayé d’apporter cette fois et de changer sur ce nouvel album par rapport au précédent selon vous ? Avez-vous tiré des leçons d’Under The Mountain afin d’améliorer divers aspects de votre musique et éviter certains écueils ?
Jamie : Sur Under The Mountain, nous avons dû faire face à quelques changements de line-up lors de l’écriture de l’album comme évoqué précédemment, je l’ai également enregistré dans notre espace de répétion le week-end et le soir entre mon travail et le reste. Sur le nouvel album, je pense que nous avons vraiment profité d’avoir une équipe à présent solide travaillant ensemble sur les chansons depuis le début du processus de composition. On a également eu la chance d’enregistrer l’album dans un magnifique nouveau studio appelé Deep Storm dans la campagne écossaise. Je pense que le fait d’avoir pu rester là et se concentrer uniquement sur l’album a abouti à un album beaucoup plus précis, ciblé. En ce qui concerne l’écriture de chansons, nous n’avons jamais vraiment d’idées prédéfinies, je propose des riffs ou des idées musicales, et nous les assemblons dans notre local d’entraînement jusqu’à ce que nous ayons une chanson. Nous n’avons jamais vraiment essayé de changer cette approche à vrai dire.
Laura : Vocalement, j’ai essayé d’être un peu plus dynamique. Je ne suis pas une chanteuse de formation, donc j’ai toujours juste chanté à fond sur tout ! Pour cet album, je voulais essayer d’apporter un peu plus de contraster, d’apporter à la fois un peu plus d’ombre et de lumière dans ma voix pour aider à compléter la musique du groupe et essayer d’avoir un peu plus de soul, de feeling dans l’interprétation. Je suis vraiment contente du résultat.

Justement Laura, que réponds-tu aux détracteurs qui disent que ta voix puissante a tendance à être omniprésente au détriment de la musique sur les chansons de King Witch en général ?
Laura : Je ne vais pas essayer de sonner d’une manière particulière juste parce que quelqu’un n’aime pas le son de ma voix. C’est ma voix, unique pour moi, et j’en suis satisfaite. Tout le monde a son opinion sur la musique. S’ils n’aiment pas ma voix, rien ne les force à nous écouter ! (rires)

Quelles sont d’ailleurs tes principales influences ? Avec quelles chanteurs/chanteuses as-tu grandi car ton spectre vocal dépasse le Métal : on sent qu’il y a aussi du Blues, du Gospel, et de la Soul dans ta voix…
Laura : Ah ha !! (sourires) Hé ​​bien j’ai grandi avec Led Zeppelin, Black Sabbath, Hendrix, Janis Joplin, Pink Floyd et Deep Purple. Plus tard, j’ai commencé à écouter Dio, Iron Maiden, Candlemass, The Obsessed, etc. Je n’ai jamais vraiment écouté de Soul ni de Gospel, même si j’aime beaucoup le Blues en effet. Etant plus jeune, j’évoluais plutôt dans un registre Folk écossais avec beaucoup de caractère et de cœur, totalement différent cependant de ce que je fais aujourd’hui. J’ai toujours aimé les grands chanteurs naturels comme Janis Joplin, Robert Plant, Messiah Marcolin, et Dio par exemple, car ils sont intensément puissants, passionnants à écouter, mais aussi très dramatiques à regarder ce que j’adore !

Parallèlement à King Witch, tu es aussi graphiste Laura, je crois, et tu as réalisé la pochette de ce nouvel album Body Of Light. Peux-tu expliquer ce qu’elle représente ? On dirait une sorte de projection astrale d’un corps, ou plutôt de l’âme d’une personne…
Laura : Ha ha ! (rires) Bien vu, tu as bien deviné. Je travaille comme graphiste le jour en fait. J’adore pouvoir aider avec mes illustrations pour nos sorties d’albums, affiches, t-shirts, etc., et puis cela permet d’économiser beaucoup d’argent. Nous ne sommes pas opposés à ce que quelqu’un d’autre l’aide si nécessaire cependant. La majorité des chansons de Body of Light explorent l’inconnu, alors les images de l’espace, de la magie et de l’occultisme me sont venues à l’esprit. La chanson-titre « Body of Light » est en fait très vaguement basée sur le livre d’Aleister Crowley « Control of the Astral Body ». J’ai donc pensé qu’une image basée sur la projection astrale d’une femme fonctionnerait très bien pour l’artwork.

KING WITCH Body of Light (artwork by Laura Donnelly)

Et toi, Jamie, comment décrirais-tu ou résumerais-tu tes influences musicales ? Avec King Witch, te sens-tu plus proche des groupes de Heavy Metal ou plutôt de Doom Metal parce que votre musique est très entraînante, en même temps trop intense peut-être presque pour un groupe de Doom Metal, mais d’un autre côté, très blues et lyrique comme nous l’avons généralement dans le Doom ? Par exemple, as-tu grandi avec la légende anglaise de Black Sabbath et les pionniers suédois de Candlemass ? Apprécies-tu un groupe plus récent comme Avatarium (dont le point commun est Leif Edling de Candlemass) qui met des influences Blues et des touches 70’s dans sa musique ?
Jamie : Un peu tout ça, oui. Mais je suppose que chaque groupe est le produit de ses influences, je pense que nous nous situons entre l’influence du Rock classique des années 70 comme Zeppelin et Black Sabbath ainsi que diverses influences de Heavy Metal allant de Candlemass jusqu’à High on Fire par exemple. Les groupes avec lesquels j’ai grandi dans les années 90 étaient plutôt Soundgarden, Kyuss et Alice In Chains. Ceux-ci ont eu également une énorme influence sur moi en tant que musicien en plus des légendes évoquées précédemment bien sûr. Lorsque tu es si proche de la musique et continuellement dedans, il est souvent difficile de voir exactement d’où ces influences proviennent et comment elles marquent ta propre musique ! (sourires)

Sur le quatrième morceau intitulé « Return To Dust », la mélodie de l’introduction à la guitare me fait beaucoup penser à une vieille chanson folk américaine bien connue « The House Of The Rising Sun » reprise par le célèbre groupe anglais The Animals en 1964, puis plus tard par le chanteur français Johnny Hallyday qui lui inspira la chanson « Les Portes du Pénitencier ». Est-ce que cette célèbre chanson a été une source d’inspiration pour ce morceau figurant sur votre nouvel album ?
Jamie : Ha ! Ha !! (rires) C’est une comparaison intéressante, et je peux l’entendre totalement, mais ce n’est pas ce qui me passait par la tête lors de l’écriture de cette partie, navré. Je partais plutôt sur une sorte de musique « Spaghetti Western » si tu vois ce que je veux dire… (sourires) Avec juste des guitares douces et un peu folk en effet, vraiment claires avec une légère distorsion et une mélodie simple et forte, tout simplement, comme quelque chose que l’on pourrait entendre dans le film Pour une poignée de dollars, tu vois ? En espérant qu’Ennio Morricone ne croit pas là que je le copie ! (rires)

Avant de conclure, que voulez-vous ajouter sur ce nouvel album Body Of Light ?
Jamie :
C’est un moment très étrange dans le monde que nous vivons en ce moment, et aucun de nous ne sait comment ni quand les choses vont vraiment revenir à la normale, elles ne le seront peut-être jamais complètement, mais je pense que Body Of Light est une œuvre musicale vraiment puissante. J’espère vraiment que cet album atteindra les gens et qu’ils pourront toujours en profiter dans ce climat fou actuel.
Laura : Nous sommes tous extrêmement fiers de Body of Light et nous espérons que les gens l’apprécieront tout autant que nous. Je pense qu’il y a quelque chose d’intéressant pour chaque Rockeur ou Métalleux, mais pas que. (sourires)

Maintenant, pensez-vous pouvoir partir en tournée après la sortie de Body Of Light afin de le défendre sur scène ? (NDLR : entretien réalisé le 26/03/20) On vous voit bientôt en France ?
Jamie : Ouais, mec ! On adorerait venir jouer en France (surtout que nous sommes sur un label français : Listenable Records !). Malheureusement comme tout le monde, nos concerts ont été annulés à cause du virus… On va pousser l’album à fond en ligne et j’espère que nous pourrons faire un concert live en streaming à un moment donné sur internet. Donc j’espère vraiment que nous pourrons reprendre la route plus tôt que tard et jouer pour vous les gars !
Laura : Nous aimerions nous produire en France et j’espère que lorsque les choses seront un peu plus normales, nous viendrons jouer et espérons vous rencontrer et prendre une bière ! (sourires) Le monde redeviendra très ouvert et fertile lorsque la pandémie sera terminée. Les gens seront demandeurs de musique. La créativité sera au rendez-vous et King Witch aura alors faim de jouer à nouveau sur scène… Merci à toi d’avoir pris le temps d’écouter notre album et pour cet entretien.

KING WITCH
Body Of Light
Heavy/Doom Metal
Listenable Rec.
★★★★☆

Révélé sur la scène Heavy/Doom Metal britannique avec Under The Montain en 2018, King Witch et son impressionnante frontwoman Laura Donnelly persistent et signent même dans leur mélange explosif de Candlemass vs Dio avec Body Of Light malgré les critiques. Si sincèrement on apprécie les belles intros (« Return To Dust » à l’ambiance western), les folles cavalcades (quelles guitares de Jamie !) et les respirations instrumentales (« Solstice II »), la musique du quatuor écossais prend véritablement aux tripes quand on entend la voix de Laura qui s’époumone à se faire décoller les amygdales vous entraînant dans des montagnes russes émotionnelles fantastiques. Alors saluons l’incroyable talent de la chanteuse qui ne fait pas semblant en studio (ni d’ailleurs en live) sur cet épique Body of Light très bodybuildé. Imaginez un peu, c’est comme si Tina Turner se mettait au Doom lyrique ! Assurément heavy, croyez-nous ! [Seigneur Fred]

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