« Ça va, ça vient » chantait le duo Vitaa & Slimane il y a quelques années, pour les oreilles les plus tolérantes d’entre nous qui s’en souviennent encore… Bon, OK, cessons là le massacre sonore, mais mine de rien, ce titre de chanson pourrait être le leitmotiv du groupe américain durant sa longue carrière qui fut entrecoupée de nombreux splits et retours, alors que ce vétéran de la scène Death Metal de Tampa existe tout de même depuis 1984 ! Après un come back correct mais sans plus avec l’album Back From Beyond en 2014 (Century Media Rec.) pour lequel nous nous étions entretenus à l’époque avec le principal intéressé, à savoir le bassiste Terry Butler (actuel Obituary), Massacre redisparut après de la circulation, et ce, malgré diverses tentatives de retours scéniques (mais jamais discographiques) sous différentes formes. Tapi dans l’ombre, l’ancien chanteur Kam Lee resta motivé, et c’est avec une détermination sans faille qu’il a enfin reconquis la propriété légale du nom du fameux groupe Massacre (un peu comme un certain Dino Cazares et Fear Factory dernièrement). Une mise au point s’imposait avec la sortie cette année de leur quatrième galette studio : Resurgence. [Entretien avec Kam Lee (chant) par Seigneur Fred – Photo : DR]


Dans le passé, Massacre a déjà splitté à plusieurs reprises. Cela semble être devenu une fâcheuse habitude chez vous ! (rires) Plus sérieusement, pourquoi le groupe s’est-il séparé juste après la sortie de l’album Back From Beyond en 2014 ? Que s’est-il passé avec Terry Butler, Rick Rozz, Mike Mazzonetto et Edwin Webb ?
Aucune putain d’idée, mec… Je n’étais alors pas dans le groupe pendant cette itération. Il faudrait contacter l’un d’eux pour lui demander, mais étant donné que je n’étais même pas dans le groupe pendant cette période et que cela a toujours échoué, cela pourrait être un « indice » pour savoir qui a été le problème pendant toutes ces années.
Y a-t-il eu des problèmes juridiques avec le nom de Massacre car le groupe a donc tenté de se reformer encore après ce split, et renaîtra d’ailleurs en 2017 sous le nom de « Massacre X », puis « Gods of Death » entre 2017 et 2019. Mais il se séparera à nouveau, pour enfin revenir à présent avec toi comme chanteur. Les fans risquent de s’y perdre à force…
Pendant tout ce temps, j’étais de retour dans l’ombre du groupe… Et il y avait en effet une guerre de nom parce que Terry prétendait à tort détenir la marque sur le nom. C’était du mensonge, et du bluff. Nous avions réservé des concerts en Allemagne pendant cette période et les promoteurs ont été arrêtés et ont renoncé aux ordres qui leur étaient envoyés par le manager de Terry. C’était aussi du bluff…, bref. Mais cela a effrayé et fait craindre aux promoteurs des poursuites judiciaires à leur encontre, ils n’ont donc pas voulu nous réserver pour les shows en tant que Massacre. Donc, au début, un “X” a été ajouté au nom pour devenir simplement Massacre X (car le “X” représentait le chiffre romain pour 10 – et c’était la dixième itération du groupe), mais les promoteurs ne voulaient toujours pas réserver de spectacles avec ce surnom pour nous. Le nom a donc été changé par les promoteurs pour s’appeler « Gods of Death ». Peu de temps après cependant, nous ne recevions plus de réservations et le nom a donc été totalement abandonné. Nous ne nous sommes plus jamais séparés. J’ai demandé à mon avocat d’examiner la marque du nom, et il a été découvert qu’elle n’appartenait pas à Terry Butler. J’ai donc demandé à mon avocat de rédiger les documents juridiques et de m’inscrire pour le nom par les voies légales appropriées. Nous avons dû arrêter de fumer pendant le processus juridique qui a pris environ une année complète à cause de tant de procédures judiciaires et des milliers de dollars dépensés en frais d’avocat et de justice pour obtenir la marque complète du nom “Massacre”. Fin 2018, j’ai enfin obtenu les droits légaux de la marque et ainsi nous avons pu commencer à être officiellement Massacre. Nous avons fini ça en novembre 2018 pour enfin pouvoir recommencer à booker des spectacles, et il a donc fallu attendre 2019 pour recommencer à jouer sur scène. Cependant, seulement environ six à sept mois après, notre guitariste Rick Rozz a décidé de démissionner et il a emmené avec lui le batteur Mike Mazzonetto avec lui. Du coup, cela nous a retardés à nouveau car nous avions d’autres réservations de concerts prévues en Amérique du Sud et en Allemagne. Alors Mike Borders (basse) et moi avons dû trouver des membres de remplacement pour venir jouer et finir ces shows. Des remplaçants ont été recrutés et les concerts ont été reprogrammés. Nous les avons faits, cependant les remplaçants pensaient qu’ils allaient avoir des positions plus importantes dans le groupe qu’ils n’avaient gagné – alors je les ai mis à leur place et ils n’ont pas aimé ça. Ils ont fini par stopper et partir. J’ai finalement décidé de contacter les membres actuels du groupe Massacre, avec qui j’ai tout fait les projets d’enregistrement. Il y a par exemple certains musiciens comme Rogga Johansson avec qui je travaille depuis plus de quinze ans maintenant.
Par conséquent, qu’est-ce qui vous a remotivé, toi, Kam Lee, et les nouveaux membres, pour maintenir votre détermination ? Qu’est-ce qui vous a donc stimulé pour reformer et relancer le groupe Massacre depuis 2019 après toutes ces affaires ?
Comme je l’ai dit, nous n’avons pas reformé véritablement Massacre en 2019. En fait, nous avons juste ajouté de nouveaux membres. Moi-même et Mike Borders demeurent les « membres principaux » à partir de maintenant… Et différents membres de session, de studio, d’enregistrement et même de performance live, interviendront, changeront et alterneront de temps à autre selon les plannings et impératifs de chacun. Le simple fait de reprendre le nom et se battre en justice et l’envie de continuer notre musique ont dépassé notre simple motivation.
Le nouveau line-up de Massacre est somme toute très différent du line-up américain d’origine, avec une majorité de musiciens européens désormais. A l’exception de toi, Kam, ancien chanteur, et Mike Borders donc, ancien bassiste, tous les membres sont scandinaves ou britanniques ??! Par exemple en détail : on a Brynjar Helgetun à la batterie qui est norvégien ; Jonny Pettersson et Rogga Johansson, tous deux à la guitare, qui sont suédois ; et enfin le troisième guitariste britannique Scott Fairfax qui joue dans Memoriam and Benediction (live). C’est un peu surprenant et bizarre pour les fans, tu ne crois pas, non ?
Non, je ne pense pas que ce soit bizarre du tout. Qu’importe, ça c’est juste quelques hypothèses et accusation louches… Tu ne penses pas ? (rires)
Alors, comme toi, Kam Lee, tu es maintenant le propriétaire du nom Massacre et le leader du nouveau groupe Massacre maintenant en 2021, est-ce quoi le principal auteur et compositeur du nouvel album intitulé Resurgence qui sort cet automne chez Nuclear Blast ?
Oui, je suis propriétaire exclusif de la marque du nom Massacre. Quant à la musique, elle a été écrite par Rogga Johansson et Jonny Pettersson, en étroite collaboration et coopération entre Scott et Mike. Moi, j’ai écrit l’intégralité des paroles, des arrangements et des voix. Tous les concepts et esthétiques de Massacre, les visuels, l’artwork du nouvel album, sont créés et formulés par mes soins.
Penses-tu que le fait que le groupe ait de nouveaux membres européens au sein de son line-up ait pu affecter ou affecte le style musical de Massacre sur ce quatrième album Resurgence, avec plus de touches de Death Metal européen à présent, en particulier dans le son des guitares ? On note des influences suédoises par exemple ou britanniques dans votre son Death Metal US made in Tampa ? (sourires)
Si l’on demande si cela ressemble à un certain personnage jouant de la guitare avec un certain style… La réponse est : « non »… car ce personnage ne fait plus partie de ce groupe. Cependant, j’ai été particulièrement clair dès le départ en continuant le projet avec Massacre, et j’ai souligné auprès des autres nouveaux membres que la musique devait être écrite dans une formule pour capturer à la fois l’ambiance classique de Massacre tout en restant dans l’esthétique du Death Metal à l’ancienne. Je sentais que le groupe pouvait évoluer et sachant que deux des principaux auteurs étaient des musiciens suédois de Death Metal, très accomplis au demeurant dans leurs propres groupes et projets respectifs en Europe, j’ai encouragé l’utilisation de certains styles et sons dans le matériel. J’étais, et d’ailleurs je suis très conscient encore des choix que nous avons faits dans le nouveau matériel présent sur Resurgence que nous avons écrit ensemble malgré la distance.
Avec les confinements successifs liés à cette satanée pandémie en 2020 et 2021, comment avez-vous travaillé ensemble justement pour l’écriture, la composition et les répétitions pour Resurgence, entre les USA et l’Europe : par internet ? Par échange de fichiers numériques ? Par « tape trading » comme au bon vieux temps ? (rires) En voyageant par avion quand cela était possible ? A-t-il été facile de rassembler honnêtement ces dix nouvelles chansons ?
Ah ! La technologie… tue la technologie… L’avenir est là, et il n’a pas besoin d’une bande de branleurs assis dans un garage avec des culs en sueur qui empestent la pièce comme une bande de sportifs de lycée. (rires) Pourquoi s’en tenir à des concepts dépassés selon lesquels les groupes ne sont qu’une bande de crétins qui ont grandi ensemble. La technologie des stations de travail numériques (DWS 9) et le partage de fichiers par internet permettent à n’importe qui, partout dans le monde, de travailler ensemble sur de la musique, ou d’autres domaines artistiques. Tant que les musiciens savent jouer dans le temps, lire de la musique ou des tablatures et peuvent jouer sur des fichiers téléchargés sur leur DWS ou leur home studio… c’est possible de le faire ! J’ai fait tous mes projets d’enregistrement au cours des quinze dernières années de cette façon : Bone Gnawer ; The Grotesquery ; Broken Gravestones ; Gravewax ; The Skeletal ; Akatharta ; Nattravnen. Donc vraiment, ce n’est pas si difficile de nos jours…
Au passage, peux-tu nous en dire davantage sur le super groupe, ou plutôt le projet parallèle collectif, qualifierons-nous, appelé Metal Against Coronavirus, s’il-te-plaît ? Pourquoi ces retrouvailles de nombreux artistes et quel était et est peut-être encore le but ? Était-ce un seul projet en studio ou allez-vous tourner en live maintenant que la crise sanitaire décroît ? Quels sont les fonds que vous avez gagné/obtenu pour ce projet exactement et quelle va être leur utilisation concrète ?
Je n’en ai aucune idée… ce n’est pas de nous au départ ce projet… On m’a demandé de participer sur un morceau tout comme Mike Borders, notre bassiste, qui figure sur un autre morceau. D’après ce que j’ai compris, c’est un groupe comptant d’autres groupes provenant d’Amérique du Sud. Pour plus d’informations, il faudrait donc mieux les contacter directement pour savoir ce qui se passe. Je n’ai fait qu’une apparition sur une chanson, une fois qu’ils l’ont reçu de ma part après mon enregistrement… Je n’ai vraiment pas beaucoup entendu parler d’eux en fait après. Mike Borders est plus en contact avec eux. Il faudrait lui demander éventuellement.
Qui a produit ce nouvel album Resurgence ? Comment s’est passé l’enregistrement en studio ? Tout le monde a enregistré ses parties en home studio derrière son ordinateur par exemple ?
Dan Swanö a mixé et masterisé l’album avec l’aide de l’un de nos guitaristes, Jonny Pettersson, pour l’ingénierie sonore. Tout le monde a enregistré sur son propre DWS et a envoyé des fichiers à Jonny qui les a organisés, édités, et les a transmis à Dan pour le mixage en Suède.
Suis-tu toujours la scène Death Metal et Métal en général dans le monde, en particulier les nouvelles scènes européennes (suédoise, britannique, française) et celle américaine avec de nouveaux groupes ou bien tu restes nostalgique et concentré vers le passé, n’écoutant que des vieux trucs et des classiques des enregistrements cultes de formations comme la tienne, Massacre, mais aussi les incontournables Death, Deicide, Obituary, Cannibal Corpse, Morbid Angel, Bolt Thrower, etc. ?
J’écoute de nouveaux groupes qui ont certaines saveurs que j’apprécie en fait, mais honnêtement, je n’écoute plus beaucoup de Death Metal. Cela devient trop dérivé (Deathcore, etc.) et réalisé vite-fait. J’écoute principalement des groupes sinon dans des genres tels que le Funeral Doom, Horror Punk, Dark Industrial (allemand pour l’essentiel).
Revenons à Massacre pour conclure cet entretien, Kam. Quels sont vos objectifs et vos projets pour cette fin d’année 2021 autour de la sortie de ce quatrième album studio, et quels sont vos autres projets plus tard ? Allez-vous partir en tournée à travers le monde quand ce foutu virus s’arrêtera pour soutenir en live sur scène ce nouvel album de Massacre comme il se doit ?
Nous continuerons à faire de la nouvelle musique, nous travaillons déjà sur des idées pour un prochain album actuellement, et nous avons de nouvelles sorties en provenance directement du groupe lui-même. Consultez notre page Bandcamp pour plus de détails à ce sujet : massacre3@bandcamp.com. Nous ferons des spectacles et des festivals dès que cela sera autorisé, mais les différents pays et régions du monde ont maintenant des règles différentes, nous devons donc respecter leurs normes lorsque vient le temps de partir tourner. Pas évident d’harmoniser tout ça pour nous artistes. Pour l’heure, nous attendons et créons encore de la musique.
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