PAIN : Cogito, ergo sum

Parenthèse nécessaire et jouissive du leader d’Hypocrisy, Pain met régulièrement à l’honneur l’électro-indus, composée d’une main de maître par Peter Tägtgren. Le ponte de la scène death metal suédoise synthétise dans ce neuvième album studio, sobrement appelé I AM, toute la créativité, la discographie et l’audace de son autre projet, sur fond d’introspection personnelle et d’intimité. [Entretien avec Peter Tägtgren (chant/guitares) réalisé via Zoom par Marie Gazal – Photos : DR]



Huit années se sont écoulées depuis le dernier album de Pain, Coming Home. Qu’est-ce que ce temps t’a permis de faire ?
J’ai fait beaucoup de choses, j’étais très occupé ! En onze ans, j’ai fait deux albums d’Hypocrisy, deux avec Lindemann, de la production pour d’autres groupes… J’ai tourné avec chacun des trois groupes sur les routes. J’ai commencé à écrire après le dernier album, puis la tournée avec Lindemann m’a occupé, et on a fait un album avec Lindemann, avec des morceaux qui étaient plutôt prévus pour Pain originellement. J’ai réessayé d’écrire, puis mon ami Horgh (Ndlr : batteur, ex-Immortal, ex-Hypocrisy) m’a demandé si j’avais des morceaux pour lui. Ce fut vraiment un start and stop ! (rires)

Les paroles du nouvel album I Am font écho à ton parcours personnel en fin de compte. De quoi y parles-tu ?
De plein de choses différentes en fonction des morceaux. Il n’y a pas de fil d’Ariane du premier morceau au dernier. Sur « Go With The Flow », je suis un homme pessimiste mais ce morceau est un moyen pour moi de ne pas trop m’énerver quand les choses ne vont pas dans mon sens et plutôt de compter jusqu’à dix ! (rires) C’est thérapeutique. L’écriture est un moyen de se décharger. Par exemple, comment le gouvernement essaie de nous effrayer avec certaines choses. J’ai travaillé sur l’album pendant deux ans, par-ci, par-là, entre des tournées. Donc il représente qui je suis, c’est donc deux années de moi à l’heure actuelle.

Collabores-tu avec d’autres artistes sur I Am ? On entend notamment une voix féminine française sur « My Angel »…
Il s’agit de la voix de Cécile Simeone (Ndlr : animatrice et actrice française, morceau sorti initialement en 2011, mais intégré à l’album I Am en 2024). J’ai aussi collaboré avec Sebastian, mon fil. Il a écrit deux morceaux et quasiment tous les instruments lui-même. Il a écrit « Don’t Wake The Dead ». Il m’a aidé avec le mastering, mais aussi sur « Fair Games », la balade qui se trouve à la fin du nouvel album. La dernière chanson a plutôt un objectif de motivation, de se relever, d’avoir de l’énergie. C’est comme sur « Push The Pusher » où je dis que je ne veux pas grandir, je crois que tout le monde peut s’y identifier, peu importe quel âge tu as. C’est marrant de voir les réactions des gens sur internet vis-à-vis de ces deux chansons. Je n’essaie pas de faire des choses compliquées, tu sais, je veux juste que les gens ressentent le groove dans l’album.

Un mot sur le clip de « Push The Pusher » justement. C’est toi qui l’as voulu dans ce style animé japonais (manga) ? Tu en regardes ou tu lis des mangas toi-même peut-être ?
Non, je vais te décevoir ! Ce n’est pas trop mon truc, les jeux, ce genre de BD… J’aime bien les vieux machins ! C’est une idée de mon manager qui a entendu parler d’un gars qui travaille dans les animés, Dmitry Alekseev, et lui a demandé s’il pouvait nous faire un épisode sous forme de vidéoclip. Il a dit oui, mais que cela prendrait trois mois. Et encore il a utilisé de l’Intelligence artificielle, sinon ça aurait pris plus de temps ! Ils ont fait une véritable histoire pour moi, inédite. (sourires)

J’imagine alors que le petit jeu vidéo sur ton site internet où l’on écoute « Go With The Flow » en collectant des items sur la route n’est pas l’une de tes idées non plus ? (sourires)
Non ! (rires) ! Encore une idée de mon manager !

Peux-tu me parler un peu de l’artwork d’I Am à présent ? Le style me fait penser aux natures mortes dans la peinture.
Ça représente plusieurs facettes de moi, en fait. Pas seulement une face. J’adore le style de Heile (@heilemania sur Instagram). C’est un visuel que j’ai demandé à partir de l’une de mes propres photos. C’est très classe, ce n’est pas juste un travail d’ordinateur.

À propos de Lindemann et ton projet avec lui, as-tu des nouvelles de Till Lindemann (Rammstein) ?
Il n’y a pas de projets. Nous ne sommes plus en contact.

Et du côté d’Hypocrisy, un nouvel album se dessine-t-il ?
J’ai commencé à écrire un petit peu ! J’ai une chanson. Je sais que Mikael (Ndlr : Mikael Hedlund, bassiste d’Hypocrisy) s’y est mis aussi de son côté, en prenant la guitare et en grattant un peu. Là, je termine la promotion de Pain parce que je n’ai pas beaucoup de temps pour m’asseoir et écrire. Quand je serai moins stressé, je prendrai la guitare pour jouer. Il faut écrire dès qu’on peut, parce que cette vie, ces voyages, ces tournées, rend l’inspiration très difficile. Parfois, tu n’es pas à l’abri de trouver une bonne idée non plus !

Tu as parlé de ton fils tout à l’heure. Il joue de la batterie notamment. Qu’est-ce que ça fait de travailler en famille ?
C’est toujours particulier, surtout quand ça devient public. C’est la même chose quand on joue en concert ensemble. C’est unique. Mais maintenant on se côtoie plus comme des amis. Après, bien sûr, je reste son papa et je peux lui dire quand il y a des choses qui ne me plaisent pas. Et ça arrive souvent ! (rires) Il a vingt-cinq ans, mais c’est toujours mon gosse !

Après Pain, va-t-il jouer de la batterie dans Hypocrisy ?
Non, dans Hypocrisy, on a Henrik Axelsson (recruté comme batteur de session en 2022). Sebastian avait fait quelques festivals avec nous il y a quelques années. Mais ce n’était pas quelque chose de prévu à l’origine !

Publicité

Publicité