SVART CROWN : Les Terres Brûlées

Les Terres Brûlées (EP) - SVART CROWN
SVART CROWN
Les Terres Brûlées (EP)
Black/Death metal
Nova Lux Production/Les Acteurs de l’Ombre Productions

La sortie de cet ultime EP de Svart Crown est étrange. Elle s’inscrit deux ans après la sortie du dernier album Wolves Among The Ashes sur le label allemand Century Media en 2020, et paraît sur un autre label plus underground bien connu des amateurs : Les Acteurs de l’Ombre Productions, en collaboration avec celui du groupe Nova Lux Production. Cela survient également alors que la bande à JB Le Bail vient de jouer cet été au Hellfest 2022 (reporté deux ans de suite), mais il marque surtout la fin d’un règne de presque vingt ans pour nos Français sur la scène black/death metal européenne… En effet, si leur précédent effort longue durée donnait de nouvelles perspectives intéressantes, presque progressives, dans la musique sombre et si heavy du puissant quatuor méridional, tous les fans n’adhèrent pas forcément. Pendant ce temps-là, malgré la reprise des concerts et leur habituelle intensité (à chaque fois que nous voyions Svart Crown se produire quelque part, on avait l’impression qu’il s’agissait de leur dernière acte scénique), la passion s’amoindrit, et la flamme qui animait tant nos quatre musiciens si redoutables en live (et si sympathiques en interview) commença à s’essouffler, notamment chez son frontman. Le guitariste/chanteur JB Le Bail a bien d’autres projets dans la tête, et c’est normal et tant mieux dans un sens pour un artiste, à commencer par sa collaboration comme guitariste déjà dans Igorrr. Mais alors que vaut Les Terres Brûlées et où réside l’intérêt de cet EP à présent, vous direz-vous ? Plus qu’un dernier cri, Svart Crown a décidé d’offrir en épitaphe cinq ultimes morceaux aux fans, qui retrouveront là la rage et la noirceur habituelle des Niçois, et en même temps des passages plus inhabituelles, comme Wolves Among The Ashes en fit apparaître il y a deux ans déjà…  : des ambiances plus mélodieuses (la fin du premier titre  » Geoulah « ), des breaks plus digestes pour les néophytes, guitares un chouilla moins agressives, chœurs presque clairs, avec des riffs et rythmiques rappelant parfois leurs confrères de Gojira ( » Les Terres Brûlées  » et son riff d’intro puis son pont). Sur  » Digitalis Purpurea ”, il s’agit d’un voyage astral à travers les limbes de l’inconscient. Bref, un peu de lumière dans ce feu ardent qui allait s’éteindre quelques mois après son enregistrement en studio dans divers lieux du sud du pays. L’auditeur sera agréablement surpris également par la reprise francisée de Converge (Hardcore/Boston (USA)  » Cavalier Noir « , totalement réappropriée par Svart Crown. Enfin, c’est le cœur lourd et serré que ce dernier nous quitte sur  » An Open Heart  » et ses longues huit minutes de descente au purgatoire, voire encore un plus bas, dans ces flammes de l’enfer, où finalement nous nous plaisions en compagnie de nos gaillards. Ce cinquième morceau donnant un bon condensé de ce que S.C. a pu nous offrir par le passé. Côté production sonore, une fois n’est pas coutume, c’est Francis Caste qui a mixé l’ensemble au studio parisiens Sainte-Marthe pour un résultat aux petits oignons, puissant, propre, mais organique. Cette couronne noire (=  » Svart Crown  » en norvégien) va sacrément nous manquer dans tous les cas, alors que la scène française n’a jamais été aussi riche, variée, et imposante en Europe, voire à l’échelle mondiale. Ces musiciens dévoués et si passionnés qui nous avaient conquis dès le départ avec leur black/death metal organique et sombre sur ces deux premiers brûlots Ages of Decay (Rupture Music/2006) et l’incontournable Witnessing The Fall (Listenable Rec./2010) vont nous manquer, mais nous les recroiserons à coup sûr dans d’autres projets. Souvenez-vous d’ailleurs tout récemment d’Hyrgal et son album éponyme paru plus tôt dans l’année, projet black fort réussi de son autre guitariste/chanteur Clément Flandrois. Toute vie a une mort, et si celle-ci passe par le feu, alors, de ses cendres, peut renaitre la vie telle le phénix. Le roi est mort, vive le roi ! Malheureusement, il n’a actuellement pas d’héritier et laisse une scène métal extrême française orpheline, perdant l’un de ses superbes ambassadeurs contemporains. [Seigneur Fred]

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