S’il avait fallu rajouter un illustre membre et agrandir le Big Four of Thrash (metal) pour en faire un Big Five, alors très certainement Testament aurait mérité cette 5ème place du podium, au côté des grands noms que sont Metallica, Megadeth, Slayer, et Anthrax. Bien sûr, d’autres noms se bousculèrent dès les années 1980 au côté de ces fameux groupes, comme Exodus, Forbidden, Overkill, ou feu Sanctuary. Mais Testament a toujours été l’un des titans et leaders du genre, et a connu, et connaît encore, une incroyable carrière musicale. Pour preuve, ce Para Bellum, quatorzième album studio du groupe de la Bay Area !! Et quel album encore ! Cette nouvelle offrande de thrash belliqueuse se veut carrément mousse costaud, à l’instar des violents The New Order ou Demonic qui firent sensation à leur époque. Testament apparaît d’emblée en grande forme, en brutalisant son propos, sans pour autant sonner carrément death metal comme en 1997, mais en mettant de côté les mélodies qui furent le succès de ces derniers méfaits, Dark Roots of Earth (2012), Brotherhood of The Snake (2016), et du correct Titans Of Creation (2020).
Mais Testament continue son chemin, coûte que coute, conjurant les coups du sort, les changements de line-up , alignant les disques jusqu’à e nouveau brûlot thrash dont le titre guerrier ne laisse donc aucune ambiguïté quand à sa volonté d’en découdre, quitte à dérouter son public premier. Ainsi la présence de blasts beats sur « Infanticide IA » , premier clip de l’album, en a marqué plus d’un lors de sa diffusion en avant première de l’album il y a quelques mois. Et si on pouvait se dire que cela ne serait qu’un seul moment de brutalité quasi death metal sur tout le disque, l’écoute complète va plutôt dans le sens inverse : Testament a ici décidé de durcir sa musique, aidé en cela par le batteur Chris Dovas qui laisse loin derrière lui les passages mid tempos qui caractérisaient souvent le gang californien. D’entrée Testament frappe très fort avec « For the Love of Pain » et on sent vite que Para Bellum ne sera pas qu’un disque de plus, mais plutôt une nouvelle étape dans la carrière du groupe, à l’instar d’un terrible Demonic. La voix de Chuck Billy se teinte de tons bien plus graves, les riffs caractéristiques sont soutenus par une batterie ultra agressive et très très rapides, mais n’excluant pas la mélodie. La puissance du mixage de l’incontournable Suédois Jens Bogren, parfaite, enfonce le clou. A partir de « Infanticide IA », Billy retrouve néanmoins des timbres plus familiers mais en aucun cas la musique ne va se calmer, blasts obligent, y compris sur une partie du solo. Non, vraiment, Testament prépare bien la guerre, même si « Shadow People » et surtout « Mean to Be » , qui rappelle « The Ballad « présent sur Practise What You Preach, calment quelque peu ces velléités guerrières. Répit qui ne dure qu’à travers ces deux morceaux. Le nouveau single façon western « High Noon » et « Witch Hunt » remettent une pièce dans le cochon, relançant la machine thrash.
L’un des aspects les plus intéressants est l’utilisation des timbres de voix de Billy qui, lorsqu’il se doubles sur certains passages mêle sa voix « normale » avec une autre bien plus agressive. Testament a toujours été connu par son travail sur les solos. Au côté d’Eric Peterson, Alex Skolnick ne déroge pas à sa réputation offrant tout au long des dix titres des leads puissants, mélodiques et parfaitement en phase avec le reste de la musique et son temps. A une époque où le solo de guitare n’est pas forcément une obligation, cela fait du bien de voir que certains grands « anciens » perpétuent cette tradition. Quant à la basse, l’incontournable mercenaire Steve Di Giorgio demeure impérial sur son instrument, quelques mois après la publication de son projet solo Quadvium (notre interview à retrouver ici). Par conséquent, Para Bellum va donc dérouler son mix entre l’ancien et le moderne, clôturant l’album par le morceau qui lui donne son titre de manière magistrale, parfait résumé du disque que cela soit sa longue introduction, le chant hargneux de Billy, les solos ou les riffs puissants. Six minutes et demie de puissance thrash qui s’inscrivent, mine de rien, dans le renouveau de ce style qui balaie la planète depuis une bonne quinzaine d’années. Les réactions lues sur les réseaux sociaux montrent que l’album ne laisse pas indifférent, et que si une partie du public ne parvient pas à faire le deuil des tous débuts, surtout des deux premiers classiques du groupe que sont à jamais The Legacy et The New Order, une autre est ravie de voir nos vétérans d’Oakland prendre des risques, ne pas se contenter de faire du surplace, d’aseptiser sa musique ou ses thèmes, mais au contraire d’aller de l’avant et d’aller au charbon avec la violence de ses débuts. La tournée avec Kreator , autre poulain de l’écurie Nuclear Blast, prouve que Testament entend s’inscrire dans une optique radicale ! A vous de faire votre choix, mais seule une écoute attentive et ouverte d’esprit, comme ce fut le cas à l’arrivée du diptyque Demonic/The Gathering, vous permettra de savoir dans quel camp vous vous situez. Pour notre part, la note générale donnée vous donnera de quel côté penche notre balance… [David St Amour]

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