THE HU : A la conquête du monde

Trois mois après la sortie de Rumble of Thunder, second album acclamé par la critique du groupe de Hunnu rock mongol The Hu, nous avons été invités à une soirée à l’Ambassade de Mongolie en France, non pas pour y manger des chocolats Ferrero, mais pour y célébrer l’obtention du titre d’« Artiste pour la paix » à The Hu par l’UNESCO. Toute la Mongolie les connaît déjà, mais à quand le monde entier comme jadis leurs aïeux Attila et les Huns ? [Entretien avec Jaya (chant/flûte), Gala (morin khuur), Enkush (morin khuur) et Temuulen (tovshuur), par Marie Gazal, à l’Ambassade de Mongolie en France]

Fondé à Oulan-Bator (Mongolie) en 2016, The Hu est une formation composée de huit musiciens mongoles qui jouent du Hunnu rock, un genre unique mettant en scène des éléments de musique traditionnelle mongole, inscrits au patrimoine culturel immatériel de l’humanité, comme le chant de gorge (Khöömei), le morin khuur (violon à tête de cheval), le luth à deux cordes (Tovshuur) et la flûte (Tsuur), sur fond de rock et metal plus moderne. The Hu ne promeut pas seulement la culture mongole par le biais de sa musique chantée en dialecte régional, mais également l’égalité des genres (le respect des femmes, des mères, des filles), l’écologie et la protection de notre patrimoine naturel et la tolérance. C’est pourquoi Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO, a nommé le groupe « Artiste pour la Paix » lors d’une cérémonie au siège de l’organisation le 25 novembre 2022. Cette reconnaissance mondiale s’insère dans une série de récompenses prestigieuses : un certificat d’Envoyé culturel de la Mongolie en 2019, et l’Ordre de Gengis Khan, la plus haute distinction de l’Etat de Mongolie, en 2020, leur ont déjà été remis par les autorités de Mongolie.

C’est dans ce contexte, marqué par la célébration récente de l’anniversaire du père de leur nation Gengis Khan et le succès du concert au Casino de Paris (sold-out avec plus de 2000 personnes de tous âges et de tous horizons confondus) que nous avons rencontré quatre des membres de The Hu dans la yourte montée dans le jardin de l’Ambassade française de Mongolie.

THE HU yourte jardin ambassade de Mongolie

Quand vous jouez en France, vous vous trouvez à 8 500 kilomètres d’Oulan-Bator en Mongolie, dont vous êtes originaires. Qu’est-ce que ça vous fait de jouer votre musique si loin de chez vous, à travers le monde ?
Gala : Bien sûr, c’est incroyable. Partager notre musique, notre culture et tout cet héritage qui vit à travers nous dans différents pays du monde, c’est vraiment précieux. Et cette fois-ci, c’est notre troisième tournée en Europe et y jouer notre musique est une expérience fantastique, c’est important et spécial pour nous. En plus, nous avons reçu la distinction « Artiste pour la Paix » de la part de l’UNESCO, c’est un formidable timing pour nous car cela signifie que tout ce que nous avons fait jusqu’ici nous a guidés jusqu’à ce point précis pour obtenir ce prix. Nous sommes très heureux et surtout très reconnaissants.

En 2019, vous avez reçu la médaille de l’ordre de Gengis Khan, hier vous avez reçu donc la gratification d’« Artiste pour la Paix », c’est du jamais vu. Qu’avez-vous ressenti à ce moment ?
Jaya : En 2019, nous avons reçu la médaille de Gengis Khan en Mongolie. Et à ce moment-là, nous portions notre musique à un tout autre niveau : promouvoir notre héritage culturel, notre musique dans différents pays et vraiment devenir les ambassadeurs de notre propre culture, c’était un honneur. C’est pour tout cela, je pense, qu’ils nous ont récompensés de cette très haute récompense de Gengis Khan. La recevoir a été vraiment incroyable pour nous. Comme tu l’as dit, nous sommes loin de chez nous, à 8 500 kilomètres, donc il y a des mauvais côtés, mais beaucoup de bons côtés aussi. On a promu notre bagage culturel, et cette récompense de l’UNESCO « Artiste pour la Paix », je pense que c’est vraiment une récompense à notre accomplissement pour avoir promu l’Hunnu rock dans le monde. L’UNESCO nous a récompensés parce que nous promouvons la paix à travers notre musique. Les prochaines années, nous travaillerons main dans la main avec l’UNESCO. C’est le début d’un partenariat important et très positif.


Hier, vous avez joué au Casino de Paris à guichet fermé. Comment avez-vous trouvé ce concert et quel est votre ressenti par rapport au public français ?
Enkush : Transmettre notre héritage, notre musique et notre culture fait partie de nos objectifs. Hier, je pensais au passé : quand j’étais jeune, je jouais de la musique traditionnelle et il y avait cette compétition de violon à tête de cheval pour les jeunes générations. Cet événement se produisait sous l’égide de l’UNESCO. C’est très spécial pour nous car l’UNESCO nous aide à préserver notre alphabet mongol, nos trésors nationaux et rend tout cela très unique. Si nous regardons en arrière, nous avons travaillé si dur, nous avons travaillé comme un cheval (Ndlr : métaphore mongole pour dire travailler d’arrache-pied) pour en arriver là. Cette récompense de l’UNESCO correspond à ce que nous avons fait jusque-là, c’est pourquoi nous l’avons reçue. Et après avoir reçu cette récompense, jouer un gros concert au Casino de Paris, c’était énorme pour nous. Mais nous avons emmagasiné beaucoup d’expériences depuis tout jeune, dans notre culture, nos traditions… A chaque fois que nous venons en France, le public nous accueille toujours chaleureusement, plein d’énergie. Quand nous les voyons depuis la scène, cela nous recharge.



Pourquoi pensez-vous qu’il est important de préserver la tradition en musique ?
Jaya : C’est essentiel pour nous, même si nous souffrons de l’image d’un pays ennuyeux, d’un relief plat… Même si la globalisation existe, la nôtre est différente des autres. Nous avons notre propre culture en Mongolie, les chants de gorge et tout ce que nous jouons. Nous avons notre propre « touche » en musique donc le message que nous voulons faire passer est d’aimer son environnement, de s’aimer les uns les autres, de protéger la culture mongole, cet héritage et de le transmettre à différents pays, et différentes personnes. Partager ces messages positifs à travers la musique est importante pour nous. C’est en protégeant la culture mongole que nous restons différents des autres pays, plus en paix, plus dans la protection de l’héritage.



Si vous deviez nommer un artiste avec qui vous souhaiteriez collaborer, n’importe lequel, lequel choisiriez-vous ?
Temuulen : Le genre que nous jouons, ce « Hunnu rock », peut s’adapter à plein de styles différents. Donc quand on pense à des collaborations, on veut rester dans un genre, mais explorer les limites de ce genre. Si nous devions choisir des artistes avec qui collaborer, beaucoup de noms viendraient.
Enkush : Si nous faisons des collaborations, nous aimerions commencer avec de gros noms. Les requins de l’industrie.
Gala : Avec Metallica ! (rires)

THE HU photo concert 28-11-22#01

La rencontre s’est terminée par une allocution de Mme l’Ambassadrice de Mongolie en France, Ulambayar Nyamkhuu, et par une représentation live acoustique dûment applaudie de trois morceaux : l’ouverture avec « Bii Biyelgee » (issu du dernier album Rumble of Thunder), suivi des tonitruants, et déjà cultes, « Yuve Yuve Yu » et « Wolf Totem » (avec leur « Hu Hu Hu » scandé par la foule) de The Gereg.
Un moment précieux partagé avec l’étoile montante de la Mongolie !

On nous a soufflés dans l’oreillette qu’un troisième album était déjà en préparation avec un potentiel retour en France en 2023…Affaire à suivre, restez connectés !

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