ALKALOID : The Big Band Theory

Il n’y a pas à dire, chez Alkaloid, chaque nouvel enregistrement est d’une qualité irréprochable. Voilà pourquoi ses membres prennent leur temps pour accoucher d’albums aussi complexes que Liquid Anatomy, ou le petit dernier Numen. Mais n’oublions pas aussi que derrière ce super combo de death metal prog’, se cachent des artistes complets évoluant, ou ayant évolué, dans d’illustres formations (Obscura, Thulcandra, Dark Fortress, Triptykon…). Mais Le truc en plus qui agace, est, outre leur génie musical, que ce sont de gros blagueurs… [Entretien avec Hannes Grossmann (batterie/producteur) par Seigneur Fred – Photos : DR]




Tout d’abord, comment faites-vous pour créer une musique aussi incroyable et hybride avec Alkaloid alors que chacun d’entre vous êtes déjà tous très occupés par vos autres propres groupes (Obscura, Eternity’s End, Triptykon, Dark Fortress, Noneuclid, etc.) et divers projets solo ? Et doit-on considérer Alkaloid comme un énième projet de studio musical ou un vrai groupe live car vous vous faites rares sur scène… ? (sourires)
Nous sommes en effet incroyablement occupés, et cela a pris cinq ans depuis notre dernière sortie Liquid Anatomy. La prochaine fois, nous serons plus rapides que cela. (sourires) Le processus de production de notre nouvel album et la réponse que l’on a reçue jusqu’à présent nous ont définitivement rappelé à quel point il est incroyable d’écrire et d’enregistrer de la nouvelle musique avec Alkaloid. C’est beaucoup de travail, mais ça en vaut vraiment la peine. Nous aimerions aussi jouer en live plus souvent que par le passé.

À propos justement du précédent album Liquid Anatomy, cela donnait dans un metal plus progressif et très ouvert d’esprit. En êtes-vous toujours fier et satisfait ? Quel bilan en tirez-vous aujourd’hui, cinq ans après sa sortie ? (cf. album du mois en 2018)
Eh bien, crois-tu que le nouveau, Numen, en comparaison à Liquid Anatomy, soit plus limité et fermé d’esprit ? Ah ah ! (rires) Je rigole. Autant te dire que le solde que je tire de mon compte bancaire après la sortie de l’album n’a pas augmenté. Mais artistiquement, j’en suis toujours très content, oui.

Numen se compose de deux disques. Est-ce la suite lyrique de Liquid Anathomy peut-être ici ? Et est-ce un album conceptuel ici comme les fans l’adorent dans le rock et le metal progressif généralement ?
Oui, il y a une suite lyrique, surtout pour la partie scientifique. Notre chanteur Morean a écrit toutes les paroles et il pourrait t’en dire plus à ce sujet. Dommage qu’il soit en train de traverser le Groenland en ce moment pendant ses vacances… Il n’y a pas de connexion Internet dans l’arrière-pays arctique, sinon il serait en train de te parler de ça en long et en large, et de t’expliquer en détail de quoi parlent les chansons. Pauvre moi, je ne suis que le batteur de ce groupe ! (rires) Et tant que les paroles sonnent bien, ça me va, ha ha ! (rires) Je suppose donc que nous devrons bientôt faire une vidéo de révision approfondie des paroles pour chaque chanson afin que tout le monde soit au point sur le sujet… (rires) La science réelle en termes de physique astronomique confirme et certifie tous nos textes, puisqu’un vrai médecin a été impliqué dans l’écriture.

Encore une fois, les chansons sont intrinsèquement riches et variées, musicalement mais aussi vocalement, avec même une chorale cette fois. Ne penses-tu pas que ce soit « dangereux » d’explorer autant de facettes dans votre musique rendant l’écoute difficile auprès d’un public néophyte qui pourrait décrocher ? Vous pourriez en perdre quelque part dans le cosmos pendant l’écoute de l’album, en particulier les fans de death metal pur et dur ? (sourires)
Eh bien, je me fiche vraiment que les fans de death metal de la vieille école aient un problème avec le chant. Je pense que les voix claires sont particulièrement bonnes sur cet album. Toute idée préconçue sur la façon dont la musique devrait ressembler est définitivement un moyen d’explorer la musique d’Alkaloid. Il peut être dangereux commercialement de s’en foutre, mais jouer la sécurité est vraiment ennuyeux pour moi. D’autant plus que personne ne se blesse en faisant des expériences musicales. (sourires) Je me demande pourquoi si peu de groupes vont aux extrêmes d’ailleurs ? Techniquement, il n’a jamais été aussi facile qu’aujourd’hui d’expérimenter différents styles. Mais le metal en général est devenu très étroit d’esprit. Nous ne défendons pas cette évolution, nous défendons le contraire.

Il y a de nombreux invités crédits dans Numen (Adam Wallis, Cydney McQuillan-Grace, John Schaffer, Lauren Gill, Sara Robalo, Shannon Bedford). Quelles ont été leurs contributions exactement sur le nouvel album ? Des chœurs en tant qu’invités peut-être ? Il y a notamment un certain John Schaffer. Je présume que ce n’est pas le même Jon Schaffer d’Iced Earth et Demons & Wizards que nous connaissons dans la scène heavy metal, lui qui a participé à la tentative de putsch du Capitole Washington D.C. en janvier 2021…
Eh bien, le gars d’Iced Earth s’appelle Jon, sans « h ». Il fait partie d’une chorale de gospel. Il a chanté sur les chansons « Shades of Shub Nighurath » et « The Cambrian Explosion ». Mais bien sûr, transforme-le en Jon Schaffer (Iced Earth), pourquoi pas ? (rires) C’est bien d’avoir un idéologue du complot sur mon album, lui qui a également envahi le congrès américain. (rires) Je suppose que l’on devrait également inviter Varg Vikerness à faire un solo de guitare sur le prochain album. Tant que ça crée des clics… N’est-ce pas la devise de la médiatisation sur internet ? (sourires)

Au sein d’Alkloid, comment procédez-vous pour composer et écrire de telles chansons comme sur Numen parce que chaque morceau possède sa propre personnalité ? Et vous êtes quatre individus au sein du groupe… Est-ce facile pour vous tous ?
Oui, créer la musique est probablement la partie la plus facile du processus. Une fois que vous avez une idée, les chansons s’écrivent essentiellement d’elles-mêmes. Je ne plaisante pas. Nous écrivons toutes les chansons sur des feuilles de notes avant de les enregistrer. Cela donne un bon aperçu des différentes parties. On est très structuré dans la façon d’aborder les chansons et l’organisation est la clé. (sourires)

Tu as joué dans Hate Eternal en tant que batteur, et fais partie actuellement de Triptykon. Je me souviens que ces artistes ne veulent pas trop écouter autre chose quand ils créent et composent leur musique afin de ne pas être influencés. Par exemple, Tom Gabriel Fischer alias « Tom G. Warrior » de Triptykon (ex-Celtic Frost, Hellhammer) est un peu comme ça, il s’enferme. Pareil pour Erik Rutan (Hate Eternal, Cannibal Corpse). Et de toute façon ils n’ont pas trop de temps libre pour ça, et donc ils sont imperméables à d’autres musiques. Fonctionnes-tu un peu comme ça pour Alkaloid ?
Je ne sais pas comment les autres perçoivent la musique. Pour moi, il est inévitable d’être influencé par quelque chose. Peu importe combien ou peu vous écoutez les autres artistes. Par exemple, je dirais que l’un des plus grands compositeurs de films est John Williams. En écoutant certaines de ses œuvres les meilleures et les plus célèbres, vous reconnaîtrez que la plupart d’entre elles ont été à peu près volées à d’autres compositeurs. Je ne porte pas là d’accusation. C’est brillant! La plupart de ses musiques sonnent même mieux que l’original. Donc, peu importe si l’on est influencé, ou même si l’on prend consciemment d’autres idées, tant que vous savez ce que vous faites à sa manière. Et quelle que soit la méthode qui fonctionne pour soi, elle est correcte. On est le filtre à travers lequel chaque idée doit passer.

Avez-vous prévu tout de même de tourner et de vous produire en live afin d’interpréter intégralement sur scène toutes les nouvelles chansons de Numen, notamment lors d’un concert entièrement dédié à ce nouvel album ? Ça serait génial !
Cette idée m’intrigue… Cependant, pour les futurs concerts, nous jouerons des chansons des trois albums d’Alkaloid, car nous les aimons tous de la même manière. Bien sûr, l’accent sera mis davantage sur Numen.

Avant de se quitter, que voudrais-tu ajouter à propos de Numen et d’Alkaloid en général au public français ?
Numen est notre album le plus sombre et le plus extrême à ce jour. J’espère que notre public sera prêt à relever le défi. Nous sommes assurément prêts à jouer en live très bientôt et à sortir cette bête qui est en nous. Quant au public français en général, nous espérons voir ce nationalisme de droite, qui se développe actuellement non seulement en France mais aussi en Allemagne, décliner et mourir très bientôt. Liberté, égalité, fraternité ! Et fuck M. Le Pen. (sourires)

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