BURNING WITCHES : Tour d’horizon (Motocultor 2023)

En mai dernier, les Suissesses de Burning Witches ont probablement livré leur album le plus solide et abouti à ce jour avec le ténébreux The Dark Tower (Napalm Records), concept album basé sur la vie et mort de la célèbre comtesse hongroise Bathory qui tua et but, soi-disant, le sang de jeunes femmes à la fin du XVIème-début XVIIème siècle. Malheureusement, l’histoire finit mal pour elle car elle fut condamnée à être emmurée dans son propre château de Čachtice… Écumant quasiment tous les festivals d’été dont le Motocultor, nous en avons profité pour revoir nos sorcières bien-aimées afin de mener un speed dating en-tête-à-tête à chaud, après leur concert au festival breton. [Entretien réalisé avec Romana Kalkuhl (guitare) et Jeanine Grob (basse) par Seigneur Fred – Photos live Motocultor : Seigneur Fred ; autres photos : DR]

Romana & Jeanine : Salut mec ! (rires)
Salut les filles !

Quel bilan pouvez-vous déjà dresser de votre dernier album The Dark Tower pour lequel vous tournez beaucoup et vous produisez dans de nombreux festivals à travers le monde car il s’agit certainement là de votre album le plus solide à ce jour ? Quelles ont été les premières réactions en concert ?

Romana : Merci. On en est contente !
Jeanine : Oui, on est vraiment très contentes de l’album car on a obtenu de très bonnes réactions des gens à sa sortie. C’est toujours intéressant d’avoir les réactions rapidement ensuite en concert car on a enchaîné rapidement les tournées après. Cela fut un dur travail, tu sais.
Romana : Oui, et on n’a pas toujours le temps de prendre du recul. On a peu de temps en général. L’an dernier, on a même effectué une tournée sud-américaine avec Destruction. C’était la folie. Le public était incroyable. Puis on a fini l’album et là, dès le mois de mai, on a joué un peu partout en Europe : Espagne, Allemagne, Grande-Bretagne, Belgique, Autriche, Bosnie-Herzégovine… (Ndlr : Et aussi une croisière, Monsters of Rock Cruise 2023, dans les Caraïbes en mai en partant de Floride)

Où avez-vous joué précisément l’an dernier en Amérique du Sud ?
Romana :
Colombie, Argentine, Brésil, et d’autres, je n’en souviens plus de tous… (rires)
Jeanine : On a également joué au Mexique, souviens-toi ! (Ndlr : à Romana) On était même en retard et avons dû nous préparer et se maquiller dans l’avion. Quand on a atterri, on a filé directement au concert et on est montée sur scène ! (rires)

Pas de problème de perte ou vol de matériel durant tous ces voyages ?
Jeanine :
Non, ça va de ce côté-là.

Car il y a quelques années ici, au festival Motocultor, les instruments et matériels de scène (pyrotechnie, lights) de Behemoth et Testament avaient été perdus à l’aéroport d’Amsterdam, et n’étaient pas là à temps pour leur concert. Les autres artistes (Benighted, Kreator…) prêtèrent alors ce jour-là leur matériel qu’ils pouvaient…
Jeanine & Romana :
Oh ! Mince. C’est triste…
Romana : Ce n’est pas une chose facile quand on est en tournée pour que tout le reste du matériel suive.
Jeanine : Tiens, par exemple, tu veux une anecdote ? Quand on tournait en Amérique latine, l’an dernier, on checkait tous les jours tout notre matériel. Et la chose vraiment pas marrante, quand on est revenue à la maison, en Suisse donc, après notre tournée, les instruments n’étaient plus là et n’avaient pas suivi. Alors quand on dit parfois qu’il y a des vols en Amérique du Sud en tournée, et bien en Europe, ce n’est pas mieux…

BURNING WITCHES live@Motocultor Festival 2023 (photo : Seigneur Fred)

Sur quel type de matériel justement jouez-vous chacune ? Êtes-vous sponsorisée par certaines marques ?
Jeanine :
Comme ampli, je joue sur Orange qui est mon fournisseur officiel, et ma basse est de la marque Fender, mais pas d’endorsment ou sponsoring.
Romana : Moi, je joue sur ampli Peavy. Et pour les guitares, c’est Jackson USA. J’ai un contrat de sponsoring avec eux.

D’ailleurs Romana, quel est ton accordage en général à la guitare avec Burning Witches ? Standard (Mi) ?
Romana :
Non, je suis accordé en Do (C#). (sourires)

En live, pourquoi ne jouez-vous plus la célèbre reprise de Dio « Holy Diver » comme vous le faisiez souvent à la fin de chacun de vos shows sur scène ?
Romana :
Oh là, non. Ça fait déjà quelques années qu’on ne le fait plus car on n’a pas forcément le temps, comme ici en festival, même si on jouait 50 mn aujourd’hui au festival Motocultor, ce qui est bien. C’était devenu un peu un rituel, on aimait bien la jouer, tu sais. Mais depuis, on a aussi développé notre propre répertoire grâce aux sorties successives de nos albums…

C’est drôle car le public était plutôt circonspect au début de votre set ici au Motocultor. Sur les deux premières chansons, on va dire, alors que vous êtes quand même connus à présent. Après bien sûr, votre chanteuse Laura a fait le boulot et s’est mise la foule dans la poche, mais ce ne fut pas immédiat. À votre avis, pourquoi ?
Romana :
Oui, ils regardaient et vérifiaient, nous testaient en quelque sorte. Et puis certains nous découvraient en fait et ne nous connaissent pas encore. On existe que depuis sept ans, tu sais.

Oui, mais tout de même, vous avez déjà publié cinq albums sur de gros labels bien distribués : Napalm Records, Nuclear Blast… ?!
Romana :
Oui, bien sûr. Mais il y aussi encore des gens qui se disent en nous voyant pour la première fois : « ce sont des femmes, que peuvent-elles bien faire sur scène ici ? Elles ne jouent pas du metal tout de même ? » (rires) (Ndlr : d’un air masculin et prétentieux avec une voix grave) Et du coup ils sont surpris… (rires)
Jeanine : Ouais, et après généralement ils adhèrent dès qu’il y a les mosh-parts. Ils écoutent, et assez vite c’est OK. Ils aiment et commencent à bouger la tête sur les chansons suivantes… (sourires)

En plus, vous aviez le soleil en pleine figure, et jouez sans lunettes de soleil comme les stars de rock ? (rires)
Romana :
Ouais, c’était pas évident, je dois dire, mais on ne va pas se plaindre. On a eu beau temps ce qui est bon quand on joue en plein air.
Jeanine : On s’adapte en fait. L’autre fois, on jouait en Espagne aux Leyendas Del Rock, et il faisait 37 degrés. C’est sûr que ça nous change un peu de nos montagnes suisses… (rires)

Au niveau de la set-list, votre concert fut essentiellement axé sur le dernier album, The Dark Tower, forcément, et aussi la chanson-titre « Hexenhammer », très heavy et catchy…
Romana :
On a joué de nombreuses chansons essentiellement tirées de notre nouvel album, The Dark Tower, oui, et aussi quelques autres, dont « Hexenhammer » qui plaît toujours. Le public a bien réagi cependant dans l’ensemble. Ils attendaient aussi les mosh parts et les morceaux plus heavy de notre répertoire.

Sinon, est-ce que Schmier de Destruction est toujours le manager de Burning Witches ou bien il vous a simplement donné un coup de main au lancement auprès de Nuclear Blast ?
Romana :
Oui, c’est toujours notre manager. On tourne avec Destruction aussi parfois ce qui est bien.
Jeanine : Ouais, on l’appelle même « Big Daddy » ! (rires) Il nous entoure, nous conseille, tous comme nos maris respectifs qui nous entourent bien.

Maintenant, une question tabou…
Romana & Jeanine : Ouha… !! (rires)

Non, c’est une question sérieuse mais tabou très souvent dans le monde professionnel de la musique… Arrivez-vous à gagner suffisamment votre vie à présent avec la musique de Burning Witches ou bien vous avez toutes un day job à côté, comme Lala, votre batteuse, qui enseigne la pratique de la batterie aux enfants ?
Romana :
Oui, on arrive à gagner notre vie. En fait, on gagne pas mal d’argent donc ça va mais comme on vit en Suisse, c’est un peu difficile car la vie y est chère. On a envie d’avoir notre chez soi quand on rentre de concerts. Mais à côté, je donne des cours de musique comme tu le sais déjà. Par semaine, j’ai environ une quarantaine de cours, dans tous les styles, pas que le metal. À distance ou sur place à l’école, dans quatre écoles en Suisse. Et je donne aussi des cours en privé, et là mes élèves jouent ce qu’ils veulent.
Jeanine : Quant à moi, c’est moi qui prend des leçons encore avec Romana car c’est elle qui m’enseigne ! (rires)

Dans ce cas, venez emménager en France, de l’autre côté de la frontière, et placez votre argent en Suisse pour le laisser fructifier dans une banque ? (rires)
Romana & Jeanine :
(éclats de rires)
Jeanine : Ce serait possible, mais on veut avoir notre voiture, notre logement, par chez nous près de nos proches…

Plus sérieusement, est-ce plus difficile selon vous de faire des concerts et gagner sa vie en tant que musicienne dans le metal plutôt que d’un groupe masculin ?
(Ndlr : Jeanine traduit en allemand à Romana qui ne comprend et ne parle pas bien l’anglais)
Romana : Eh bien, ce n’est pas évident à répondre, car on a toujours été que des filles dans Burning Witches. L’essentiel réside cependant dans le plaisir que l’on a joué ensemble, tu sais.

Au départ, Romana, comment as-tu appris la guitare électrique : directement à jouer du metal ?
Romana :
Non, j’ai débuté en prenant des cours à la guitare en jazz, en blues, et aussi en rock.

Sur scène, qui est votre seconde guitariste actuellement ? J’ai cru voir l’Américaine Courtney Cox mais à l’origine, elle faisait juste quelques duos de guitare sur votre nouvel album, et c’est tout (exemple : « Unleash The Beast). Où est donc passée Larissa Ernst ? Ce n’est pas trop compliqué à gérer ?
Romana :
Tu n’as pas rêvé, c’est bien elle, Courtney. Elle nous accompagne depuis déjà quelques mois en tournée. Mais Larissa fait toujours partie du groupe néanmoins.
Jeanine :
Oui, Larissa étant enceinte, en fait Courtney la remplace. Elle est américaine mais voyage beaucoup, tu sais, donc pas de problème pour elle.

À son retour, envisagez-vous d’évoluer avec trois guitaristes dans Burning Witches, un peu comme Iron Maiden qui possède trois guitaristes en son sein… ? (sourires)
Romana & Jeanine :
Faut voir… ! (rires)
Romana : Oui, il faut voir en effet ce qui va se passer à ce moment-là, car Larissa, et c’est bien normal, va prioriser sa vie de mère avec son enfant. Pour l’heure, c’est Courtney et moi aux guitares sur scène de toute façon.

Pourquoi votre précédente guitariste Sonia Nusselder
a-t’elle quitté le groupe au fait en 2020 ?
Romana :
Hum… (Ndlr : d’un air un peu gêné) C’est du passé, tu sais ! (rires)
Jeanine : Ouais, nous on vit dans le présent.

Elle a rejoint Crypta ensuite mais finalement n’est pas restée. Les filles de Crypta m’ont avoué qu’elle voulait jouer plutôt du vieux hard rock avec Cobra Spell…
Romana :
Elle voulait en effet faire son propre truc, ce qui se comprend. Après on ne sait pas trop… On n’est plus en contact avec elle. Mais je crois qu’elle vit encore aux Pays-Bas.
Jeanine : Mais c’est Ok pour nous. Elle voulait faire son propre groupe et jouer sa musique, ça nous va. On est encore jeunes, donc forcément, on évolue et on multiplie les projets, on essaie toutes de nouvelles choses. C’est normal, l’essentiel est d’avoir du plaisir dans ce qu’elle fait. C’est essentiel.

Revenons sur le thème de The Dark Tower… Vous êtes donc inspirées de l’histoire vraie dramatique de la comtesse hongroise Elisabeth Bathory (fin XVI-début XVIIème siècle). Pourquoi ce choix très sombre fréquemment utilisé dans le black metal ? (Bathory, Cradle Of Filth…)
Jeanine :
Car c’est une histoire vraiment intéressante à raconter, à chanter, même si elle  a peut-être été déformée avec le temps mais c’est une histoire vraie et affreuse. Son mari à Romana, Tom Eskic, adore l’histoire. Il est venu et nous a suggérés cette histoire. Il a écrit des textes pour notre chanteuse, etc.
Romana : Ouais, c’est une histoire de famille. Mon mari et Laura ont travaillé ensemble.

Malheureusement, elle a mal fini en restant emmurée dans la tour de son château en Hongrie…
Jeanine :
Oui. Disons que l’on ne sait pas exactement si elle a tué six femmes, ou plus, mais elle a été aidée également par différentes personne. C’est affreux et tragique. Elle fut considérée à la fin comme une sorcière à l’époque suite à ses meurtres et tortures qu’elle aurait pratiqués sur des jeunes femmes.

Écoutez-vous du black metal d’ailleurs ?
Jeanine :
Oui, un peu…
Romana :
Oui, parfois. Mais c’est surtout notre batteuse, Lala, qui aime ça. (sourires)

Et plus généralement, qu’écoutez-vous sinon plus en heavy metal ?
Romana :
Judas Priest !! (rires)

Tiens, on fait justement l’une de nos couvertures de magazine à la rentrée (Ndlr : interview enregistrée en août) dédiée à l’ex-guitariste KK Downing avec son nouveau groupe KK’s Priest et son second album qui sort chez Napalm Records. L’avez-vous déjà rencontré en tournée peut-être ?
Romana :
KK… Pas évident à dire (d’un air moqueur) (rires)
Jeanine : On l’a juste vu à son concert juste après le nôtre en Espagne au festival Leyendas Del Rock dont on parlait tout à l’heure. C’était cool.

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