Avec un tel nouvel artwork signé Eliran Kantor (encore lui !), les Américains d’Immolation changent la donne visuellement à la vue de la pochette de leur terrible et brûlot , Après des illustrations cultes et toujours soignées signées par le passé Andreas Marschall ou Pär Olofsson, s’agit-il d’un signe d’une intervention divine pour une éventuelle évolution dans leur style musical de prédilection qu’est le Death Metal ? Le suspense est à son comble ! Passé une intro sur laquelle quelques arpèges caressent une première et dernière fois nos esgourdes avant l’assaut sonore, on s’abandonne déjà sur ses notes mortifères jusqu’à ce que sonne le glas (le bien nommé « Abandoned« ). Mais qu’en est-il de la suite du contenu même si le contenant revêt toujours une importance dans le choix d’un album en bac ou même en digital à la simple perception de sa pochette ? Le second titre éponyme (« An Act of God« ) donne clairement le la à cet onzième album : violence, ténèbres, rythmes suffocants, riffs tournoyants et terriblement heavy avec cette patte dissonante typique du duo Robert Vigna/Alex Bouks (ex-Incantation et Goreaphobia arrivé en 2016 chez Immo). Les blasts beats de l’impressionnant batteur Steve Shalaty, tels les chevaux des quatre cavaliers de l’Apocalypse, sont lâchés, avant d’arriver à des breaks toujours aussi lourds, là aussi caractéristiques du quatuor de Yonkers (New York). Les soli de gratte, tout en shredding, sont autant d’éclairs dans le ciel déjà obscurci par Ross Dolan et sa horde.
« The Age of No Light » confirme qu’il n’y a aucune lumière dans ce tableau sonore de ténèbres que peint Immolation avec ses instruments comme à l’accoutumée. L’intro de ce troisième morceau à la guitare est à la limite du Black Metal avant de partir là encore à plus de 300 bpm. Ce fidèle Steve Shalaty est probablement l’un des batteurs les plus sous-estimés du circuit Death Metal et de la scène extrême US en général. La fin se veut plus nuancée, plus mélodieuse, tout en finesse malgré une lourdeur omniprésente. « Noose of Thorns » et ses roulements de toms infernaux martelés par Steve, tel Héphaïstos dans les forges des enfers, rappellent le meilleur de Failures of Gods voire Here In After et Dawn of Possession il y a plus de vingt ans, à la différence près que la production sonore signée Paul Orofino (Liquid Tension Experiment, Platypus, Sahg, Bledding Through, TNT, Vinnie Moore…) est meilleure, plus claire, moins sourde, même si à l’époque, ça collait bien à l’ambiance d’Immolation. Comme le réussi Atonement en 2017, on apprécie chaque instrument, chacune des notes, chaque frappe, et chaque vocifération de Ross Dolan. Ce dernier fait toujours autant trembler l’auditeur derrière sa basse et son micro, alors qu’en interview, c’est un véritable agneau adorable à qui l’on donnerait le bon Dieu sans confession… S’enchaînent « Shed the Light » avec ses moult breaks tout aussi complexes les uns que les autres, avant le violent et bien nommé « Blooded« , rapide, véloce, et affreusement efficace même si somme toute assez classique pour du Immolation dans sa structure de composition.
On pourrait citer pêle-mêle les missiles et directs « Overtures of the Wicked« , « Broken Prey« , « When Halos Burn » (qui dépasse le dernier Morbid Angel par exemple), le très heavy et plus classique « Derelict of Spirit« , ou bien les plus sinueux et dark « Immortal Stain » ou « Incineration Procession » mais la liste ne suffirait pas tant chaque morceau regorge d’éléments à écouter et réécouter pour en extraire la substantifique moelle de chacun, au détour d’un break (ils sont nombreux !), après quelques arpèges. On découvre alors des growls vous mettant six pieds sous terre, tout un tas de riffs géniaux qui plombent l’ambiance d’une soirée en quelques secondes. On ne peut donc que céder à la tentation de ces, tout de même, quinze nouvelles compositions plus mortelles les unes que les autres et tout à fait digestes au final, ce qui n’aurait peut-être pas été le cas à leurs débuts discographiques. Tout cela nous mène ainsi à une fin d’album relativement épique et prenante (le triptyque : « Let The Darkness In »/ »And the Flames Wept »/ »Apostle« )… Sans aucun doute, Acts of God constitue l’une des meilleures galettes de cette dernière décennie pour Immolation, depuis son arrivée sur le label Nuclear Blast en 2010 avec l’album Majesty and Decay. Tout bonnement indispensable, et divin ! [Seigneur Fred]
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