Nouvelle sensation death metal sur la scène suédoise quelque peu en manque d’innovation cette dernière décennie, Imperishable nous vient tout droit de Göteborg. Paradoxalement, ce quatuor déjà expérimenté grâce au parcours de ses membres, emprunte plutôt le son cru et brut de l’école de Stockholm, à la old Dismember, Entombed, Unleashed et autre Grave dont le succès atteint son apogée dans les années 90. Auteur d’un premier EP Deathspawn il y a deux ans, nous avons craqué sur leur premier LP Come, Sweet Death, une véritable petite pépite de death metal suédois… [Entretien avec Robin Holmberg (guitare) et Niklas Holmberg (batterie) par Seigneur Fred – Photos : DR]
Bon, par où commencer ? Exceptionnellement juste par un bref compliment : votre premier album est une réelle belle surprise cette année ! Come, Sweet Death tue littéralement pour un premier long enregistrement en studio ! En êtes-vous conscients et qu’attendez-vous de ce premier album personnellement ?
Robin : Merci ! Nous sommes très satisfaits du résultat. Il est sorti encore mieux que ce que nous espérions. Cela a été un sacré bout de chemin et aussi un challenge de mettre tout cela ensemble sur ce disque, et maintenant on est ravi d’entendre ce que les gens en pensent.
En 2021, vous aviez déjà sorti un EP intitulé Deathspawn. Alors, comment avez-vous travaillé et préparé ce premier LP ensuite ? Y a-t-il des faces B ou des titres inédits issus de la session de cet EP qui figurent peut-être ici sur Come, Sweet Death en fait ?
Niklas : Eh bien, Deathspawn est en fait les quatre premières chansons que nous ayons écrites sous le nom d’Imperishable. Il n’y a donc pas d’inédits de cette période, si ce n’est quelques riffs qui finiront en fin de compte dans la chanson « Venomous » sur notre nouvel album. D’ailleurs, c’est pareil pour l’album, plus ou moins. Je veux dire, nous avions commencé à faire des démos pour peut-être deux ou trois chansons supplémentaires, mais comme elles étaient loin d’être terminées quand nous avons commencé à enregistrer, elles ont été complètement exclues.
Robin : Oui, et nous verrons si nous utilisons quelque chose de ces démos une fois que nous recommencerons à répéter de nouvelles musiques pour un second album. Nous sommes très pointilleux sur tout. Ça doit se sentir à 100 %. Je pense que j’ai écrit peut-être deux fois plus de riffs que ce qui s’est retrouvé à la fin sur Come, Sweet Death, mais comme ils n’étaient pas au top et qu’on ne le sentait pas totalement, nous les avons immédiatement jetés à la poubelle.
C’est assez étrange ou plutôt amusant car Imperishable vient de la ville de Göteborg en Suède, mais vous ne jouez pas un death metal mélodique typique de Göteborg (comme Dark Tranquillity, In Flames, At The Gates, Gardenian, etc.) mais plutôt du death metal en provenance de Stockholm : votre musique est plus brute, sale, moins mélodique que ceux qui sont originaires de Göteborg. Niveau son, vous êtes plus proches d’Entombed, Unleashed, Grave, et Dismember… Êtes-vous d’accord avec cette analyse ? Qu’en pensez-vous ?
Niklas : À la fois oui et non ! (rires) C’est un mélange de tout ce que nous écoutons, je pense, et tout n’est pas du death metal, évidemment. Je suppose que les gens feront toujours des comparaisons, principalement parce que nous venons de Suède. Et bien sûr, nous sommes influencés par certains de ces groupes que tu mentionnes, mais nous essayons de faire notre propre truc. Au moins autant que possible, après, nous ne nous leurrons pas en pensant que nous réinventons la roue ici…
Musicalement alors, si vous êtes d’accord, on peut dire que vos principales influences énormes que l’on peut écouter dans votre musique sont probablement les groupes cultes Dismember et Entombed/Entombed A.D. Imperishable a-t-il été fondé pour rendre hommage à ces célèbres groupes suédois peut-être ?
Niklas : D’une certaine manière, oui. Robin a eu l’idée de former un groupe lorsque L-G Petrov (R.I.P.) est décédé, donc le plan initial était de lui rendre hommage, ainsi qu’à Chuck Schuldiner (R.I.P.) et autres, en jouant ce style de mort à l’ancienne. Ensuite, nous nous sommes détachés de l’état d’esprit « hommage » assez rapidement, quand nous avons réalisé que quelque chose de bien se passait. Notre propre son, pourrait-on dire.
Robin : D’une certaine manière, nous rendons toujours hommage au fait que nous jouons ce type de musique. Si ce n’était pas pour des gars comme Chuck Schuldiner ou Trey Azagthoth, peut-être que nous ne ferions même pas ça maintenant, qui sait ? Leur héritage et leur impact sur nous en tant que musiciens sont tellement immenses, et ça constitue une grande raison pour laquelle notre passion pour la musique a explosé à l’adolescence. Je dirais que les deux plus grandes influences musicales d’Imperishable sont Dismember et Death. Ensuite, il y a des aperçus d’autres groupes ou styles, comme Slayer, Metallica et Iron Maiden, bien sûr.
Dans le groupe, côté expérience, certains d’entre vous sont des membres de Vampire, ou d’anciens membres de Dr Living Dead, Portrait ou New Keepers of the Water Towers. Penses-tu que vos parcours musicaux à chacun et tous ces noms de groupes déjà plus ou moins connus vous ont aidés à trouver rapidement un contrat d’enregistrement avec Hammerheart Records pour Imperishable contrairement à des débutants ?
Robin : Peut-être, je ne suis pas sûr. Ce dont je suis sûr, cependant, c’est que l’expérience que nous avons accumulée dans le passé a évidemment été très utile lors de la fondation d’Imperishable. Après avoir fait cela pendant plus de deux décennies maintenant, tu sais qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Être dans un groupe, c’est plus qu’écrire des chansons, c’est une question d’alchimie. Et il s’agit de trouver des moyens de gérer le bordel qui se présente parfois à vous, car tôt ou tard, il y aura des merdes. Mais on s’améliore dans ce domaine, je crois, et nous avons déjà appris de dures leçons. Mais pour répondre à ta question : je suppose que quelle que soit la qualité que Hammerheart a entendue en écoutant l’EP Deathspawn… peut-être qu’ils ont pu l’entendre et notre musique découle de l’expérience, quelle que soit son origine.
Niklas : Il est également important de souligner que nous n’avons pas « commercialisé » Imperishable en tant que « membres de ceci et cela ». On ne pensait pas que c’était important et nous voulions que notre musique parle d’elle-même dès le premier jour. Bien sûr, c’est un excellent moyen de se démarquer de la masse au début, de nommer certains groupes, mais ce n’est pas comme si nous étions membres de groupes traditionnels avant que cela n’arrive. Il faut laisser la musique parler d’elle-même, et si elle est bonne, tout ira bien de toute façon.
De nos jours, parmi les nouveaux groupes scandinaves de metal, que ce soit sur disque ou en live, ils essaient seulement d’imiter et de copier les groupes cultes de death ou black metal passés ou actuels. Attention, il ne s’agit pas ici d’une critique, mais juste d’un constat ! Comment pourriez-vous expliquer cette focalisation sur le passé et non sur le futur et l’innovation ?
Robin : Il y a certainement un grand nombre de groupes dans différents genres qui font du « rétro », oui. Certains sont devenus grands, et d’autres non. Et d’ailleurs certains pourraient suggérer qu’Imperishable fait également partie d’une scène rétro, mais je ne serais pas d’accord. Si vous écoutez les riffs attentivement durant plusieurs secondes, on peut dire que cela ne ressemble pas du tout à Dismember, par exemple. La pédale de distorsion HM-2 fait son travail, mais presque tous les riffs de Come, Sweet Death ont été écrits avec une distorsion merdique de type Misfits chez moi. Je peux vous assurer que personne ne penserait à Dismember s’il entendait ces démos !
Niklas : Je pense qu’il est difficile d’être innovant de nos jours. Vous pouvez faire votre propre truc, mais c’est une autre histoire de proposer quelque chose de complètement nouveau. Alors ce ne serait même plus du death metal, non ? Tout le monde a ces règles que vous devez suivre…
Robin : Ouais, il y a toujours certaines règles que tu ne peux pas abandonner si tu veux jouer un certain style. Si le plus important comme but pour nous était d’être « innovant » ou « unique », alors nous ne jouerions même pas du death metal. Mais bien sûr, nous essayons de laisser nos propres empreintes sur chaque riff, autant que possible. Et j’ai hâte de développer encore plus ce son sur notre prochain album, parce que je sens que nous avons quelque chose de plutôt bien ici.
Pourquoi ce choix de titre d’album, Come, Sweet Death pour ce premier opus ? Avez-vous composé et écrit ces nouvelles chansons pendant la pandémie de covid-19 et le confinement car Imperishable a été fondé en plein dedans en 2021 ? Est-ce que tous les morts et victimes de cette épidémie vous ont tristement peut-être inspirés pour le nom de l’album d’une certaine façon ?
Robin : Je pense que c’est un super titre, et il m’était déjà resté en tête avant que les nouvelles chansons ne soient écrites, en fait. C’est aussi un hommage à Bach. Son morceau « Komm, Süsser Tod » est l’un de mes préférés, et a également été une grande source d’inspiration pour Cliff Burton lorsqu’il a écrit l’intro à la basse du morceau « Damage, Inc. » de Metallica. Ce groupe a été énorme pour nous en grandissant, donc on peut dire que c’est aussi un hommage à eux. Nous sommes tous mortels, et la façon dont la plupart des gens vivent leur vie… on pourrait dire que certains s’efforcent de se suicider plus rapidement que d’autres… et chaque choix que vous ferez aura un impact sur la durée de votre vie, plus ou moins. J’ai toujours été fasciné et effrayé par l’inévitabilité de la mort…Aalors comme tu peux le voir, ce titre reflète beaucoup de choses. On pourrait dire que ça relie certaines de nos plus grandes influences y compris toutes les paroles en trois mots seulement, ha ha ! (rires)
Généralement, le death metal aborde des choses sombres sur la mort, les zombies, le sang ou l’opposition entre le christianisme et le satanisme. Chez Imperishable, de quoi parlent vos textes ? Essayez-vous d’être différens et de parler d’autres sujets dans vos paroles ? En quoi pensez-vous être différents ?
Niklas : Les paroles traitent de nos propres démons plus qu’autre chose. Ils sont très personnels. Robin a choisi d’écrire à ce sujet parce que cela semble plus honnête que d’écrire sur les zombies et tous ces trucs. Il y a des groupes qui font ça très bien, mais on n’avait pas envie de faire ça.
Robin : Par exemple, je ne peux pas écrire des paroles à la Autopsy. Il vaut mieux raconter sa propre histoire, même si elle est déguisée à travers une série de métaphores pour la rendre appropriée dans les limites du genre qu’est le death metal. Mais comme je l’ai évoqué plus tôt, les paroles traitent de notre propre mortalité et pourquoi les choix que nous faisons dans la vie reflètent la façon dont nous, en tant qu’individus, gérons notre existence. Il y a beaucoup d’obscurité à trouver là-bas.
La dernière chanson de l’album reprend le nom de l’album : « Come, Sweet Death ». Il s’agit là d’un final féroce, très heavy, entre death et black metal peut-être. Que pouvez-vous ajouter sur cette dernière chanson-titre de l’album qui clôt violemment les hostilités ?
Robin : C’est très représentatif de notre son dans son ensemble, je pense. Il y a de tout, des blast beats et des guitares tronçonneuses, des parties plus lentes et d’autres plus rapides, avec des guitares jumelles. Je dirais que c’est ma chanson préférée que nous ayons écrite jusqu’à présent, parce que j’aime la façon dont nous avons réussi à faire en sorte que toutes ces parties contrastées s’emboîtent. Et côté paroles, c’est aussi l’une de mes préférées. C’est comme une conclusion des thèmes présentés dans les chansons précédentes tout au long de l’album, mais aussi un début. Un peu comme un cliffhanger pour annoncer la suite en quelque sorte… Suspense ! Ha ha ! (rires)
Maintenant, si vous deviez choisir vos trois chansons préférées parmi les dix que compte Come, Death Sweet, quelles seraient-elles ? (sourires)
Niklas : Je choisirais « Vertiginous », « Deathspawn » et peut-être la chanson-titre. Ce sont des morceaux qui vont vite à la batterie, ha ha ! (rires) J’aime jouer et battre vite.
Robin : La chanson- titre aussi, « Teeth of the Hydra » et « The Perennial Desire », pour moi. Mais si tu me redemandes demain, je pourrais choisir différemment… (sourires) Mais ces trois-là sont comme un schéma directeur de la façon dont je voulais que nous sonnions quand nous avons commencé l’album après l’EP, sans même le savoir. Donc je présume qu’ils resteront dans mon top 3, la plupart du temps, y compris en concert.
Et dans le même genre de question difficile, quel est votre Top 3 d’albums de death metal préférés qui vous inspirés par le passé et peut-être vous inspirent encore aujourd’hui ?
Niklas : Domination de Morbid Angel doit être l’un des plus grands albums jamais réalisés. Certaines personnes pensent que c’est inférieur à leur production précédente, mais je m’en fiche. Les chansons sont vraiment géniales et ont une sensation particulière. Ensuite, Perceptive Deception de Disavowed qui est un véritable chef-d’œuvre. Et puis peut-être Incurso de Spawn of Possession parce que c’est tellement bon. Il y a tout dessus.
Robin : C’est difficile à dire… Déjà, Slaughter Of The Soul d’At the Gates doit être inclus quoi qu’il arrive. Même si je peux jouer ce disque dans mon sommeil et l’avoir écouté sans fin, je ne m’en lasse jamais vraiment. Et cela ne semble toujours pas daté, c’est comme intemporel près de trois décennies plus tard. Symbolic par Death. Un choix étrange pour certains peut-être, et même si ce n’est pas du pur death metal, c’est l’un des premiers disques que j’ai acheté et que j’écoute encore régulièrement. Chuck Schuldiner était un vrai génie, et je peux choisir n’importe quel disque de Death selon mon humeur. Le dernier doit être Cabinet de Spawn of Possession. L’un des meilleurs albums jamais écrits. Leurs deux autres albums sont également bons, mais Cabinet est sorti à un moment crucial pour mon apprentissage de la musique et de la vie. C’est comme une bande originale de mon adolescence, et ça correspond à de bons moments…
Avez-vous déjà joué live avec Imperishable en Suède ou ailleurs ? Et avez-vous des plans de concerts avec le groupe pour le futur afin de partir en tournée en Europe ou en Amérique ?
Niklas : Nous avons organisé une soirée de sortie pour l’album ici à Göteborg il y a quelques semaines, c’était notre tout premier concert en tant qu’Imperishable. Et on jouera un festival de metal à Kalmar (Suède) en juillet 2023. J’espère que nous pourrons partir en tournée à l’avenir. Rien de réservé pour le moment, mais nous verrons ce qui se passera. Il est difficile d’être loin de chez soi pendant de longues périodes, car nous avons des familles, des enfants, des emplois et tout cela. Mais en tout cas, nous voulons vraiment jouer ces chansons devant les gens autant que possible, c’est sûr.
Avant de conclure, pouvez-vous nous dire si toi, Robin, et le second guitariste (Christopher Hjelte) jouent avec des effets sur la fameuse pédale de distorsion Boss Heavy Metal 2 (HM-2) pour sonner comme Entombed ou Dismember et obtenir ce fameux grain de guitare à la tronçonneuse ? Ou bien vous utilisez juste des plugins numériques trouvés sur internet ? (sourires)
Niklas : Oui, ils utilisent tous les deux la pédale HM-2. Mais ils ne sont pas maximisés autant comme dans Entombed ou Dismember. Les riffs sont beaucoup plus techniques que ces groupes, donc si nous devions utiliser les mêmes paramètres, on ne pourrait pas du tout entendre ce qui se passe. Mais pour le prochain album, nous avons parlé d’essayer quelque chose d’autre, à voir… Parce que tout n’est pas dans une pédale. Ce sont les riffs et la façon dont Robin et Chris les jouent qui comptent.
Robin : La pédale HM-2 est plus un outil de marketing, ha ha ! (rires) Tous les riffs sont écrits avec une ambiance thrash/death metal à l’esprit, alors quand nous avons enregistré l’album, nous avons réalisé que nous devions baisser un peu tous les boutons pour pouvoir entendre certains détails. Je pense que c’est dommage que certains riffs soient encore saturés de distorsion, car j’ai mis beaucoup d’efforts dans le jeu et les détails. Mais à ce stade du processus, il était trop tard pour abandonner complètement l’usage de cette pédale. Nous verrons ce qui se passera à l’avenir…
Bon, il est l’heure de se quitter. Que voulez-vous ajouter sur ce premier album studio, et peut-on espérer vous voir bientôt en concert en France s’il n’y a pas d’apocalypse avant (une nouvelle pandémie ou une troisième guerre mondiale), bien sûr…) ? (sourires) Mais par pitié, venez en France !!!
Robin : J’espère que les gens prendront leur temps précieux pour revenir sur cet album de temps en temps. Ce n’est pas un album que vous mettez une fois en lecture, et puis vous le connaissez. Il faut le cultiver, l’apprivoiser.
Niklas : Je suis d’accord. Merci à toi. A bientôt lors de notre passage en France !
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