ISOLE : Anesidora

Anesidora - ISOLE
ISOLE
Anesidora
Doom metal lyrique
Hammerheart Records

Alors que The Storm Within, la prochaine galette tant attendue des Danois de Saturnus, est d’ores-et-déjà annoncée pour le début de l’été chez Prophecy Productions, pour l’heure c’est un autre challenger scandinave de nous faire vibrer avec son doom lyrique et si épique : Isole. Quatre ans après le bon et sombre Dystopia et passée une pandémie, les Suédois originaires d’Gävle (au centre du pays) sortent de leur torpeur et nous offrent Anesidora dont le nom ne peut être mieux choisi puisqu’il signifie en grec ancien, le « porteur de cadeaux », ou plutôt « d’offrandes » dans la mythologie gréco-romaine. Au sortir de l’hiver, quoi de mieux qu’une dose supplémentaire de mélancolie dans ce monde si chaotique et de plus en plus dystopique…

Si l’on a, sans aucun doute, connu mieux en matière d’artwork chez Isole (les superbes Bliss of Solitude ou Silent Ruins), nous pénétrons cependant volontiers dans l’univers d’Anesidora. Le visuel, qui représente l’entrée d’une sorte d’une manufacture avec un gardien époque fin XIXe, début XXe siècle, plus proche de l’asile d’Arkham chez Batman que d’une vieille usine qui crache encore ses fumées, est vite oubliée dès les premières notes de « The Songs of the Whales » (dont le riff moderne évoque un très court instant Machine Head) mais rapidement la superbe voix de Daniel Bryntse (également membre des excellents Ereb Altor) nous cajole et nous transporte déjà. Son chant clair semble plus doux, plus apaisé, mais aussi plus varié qu’à l’accoutumée. Les guitares claires plus aérées sont très mélodieuses, mais toujours sobres, idéales pour les néophytes de faire connaissance avec le combo scandinave dont la maturité d’écriture est flagrante aujourd’hui. Bien sûr, on pense encore un peu aux pionniers du genre, Candlemass, dans le développement de ses histoires lyriques et dans les mélodies, mais Isole possède bel et bien son propre univers. Plus long, plus c’est bon, dit-on souvent dans bien des domaines, et plus particulièrement dans le doom metal, mais Isole n’en abuse pas (6’01 pour la durée de ce premier morceau), et se veut moins redondant et monolithique paradoxalement que par le passé, quand il s’énerve un peu sur des guitares bien heavy. Le très touchant « Forgive Me », avec sa petite réverb’, fait ressortir un jeu d’arpèges simple et laisse un grand espace au chant, avant que les choses s’accélèrent un peu et que les riffs de guitare saturées ne viennent appuyer ce spleen vite contagieux.

Le superbe « Monotonic Scream » nous plonge un peu plus encore dans ce disque aux charmes subtils. Cette chanson porte bien son nom, car contient enfin un scream, ou plutôt un grunt, à la toute fin du morceau. C’était là d’ailleurs que résidait un peu la faiblesse du quatuor suédois à ses débuts, mais en même temps la particularité d’Isole, évoluant essentiellement en chant clair, ce qui pouvait lasser certains fans. « Twisted Games » mêle ensuite différents chants qui se répondent mutuellement, dynamisant ainsi l’album. Les rôles du guitariste Crister Olsson et du bassiste Jimmy Mattsson à ce sujet apportent une réelle valeur ajoutée aux compositions. Vers la moitié de « Twisted Games », on retrouve un break assez typique d’Isole à la guitare. Le riff introduit quelques chœurs puis un chant guttural qui donne ce contraste et ce côté lourd et heavy, même si l’on est dans un registre un poil plus léger tout de même que le funeral doom de Swallow The Sun ou d’un God Forsaken premiers crus. « In Abudance » se veut assez classique dans le répertoire d’Isole, et là encore les growls reviennent pour, disons, varier davantage les plaisirs. Tout cela sonne très propret dans tous les cas.

Les magnifiques parties de guitares sur l’entêtant « Open Your Mind » (l’intro à la guitare acoustique, le principal riff de guitare électrique et son solo touchant) nous emmènent dans un sorte d’état second, alors que le chant clair de Daniel Bryntse aux tonalités casse-gueule sur la seconde moitié de la chanson retiennent l’attention jusqu’à la conclusion et rappel de l’intro de cette guitare acoustique avant de finir de manière épique. Enfin, « Vanity » se charge, avec son rythme lent et appuyé, de nous assoir un peu plus dans ce spleen presque agréable et enchanteur. Isole signe là un huitième opus mature, accessible, plus varié peut-être qu’à l’accoutumée, et malgré les années et la concurrence rude sur la scène doom, le quatuor scandinave a encore de beaux jours devant lui. [Seigneur Fred]

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