Les deux musiciens marseillais ont pris leur temps pour aboutir à ce cinquième opus, près de vingt ans après le quatrième, Tellurique. La preuve que la musique est à l’image de la vie, qu’elle mûrit comme l’être humain que nous sommes, comme un projet organique au long cours. Frugalement intitulé Autophagie, ce nouveau disque tire sa source de bouts d’étoffes récupérés au gré des sessions d’enregistrement passées et des concerts. Il s’agit là en quelque sorte d’un recyclage (autophage… !) vertueux d’une matière encore vivante et noble. Ce qui fait l’identité de Kill The Thrill reste là bien présent, bien sûr. Mais poussé ici plus loin. La poésie abstraite des paroles dresse une terre aride, abrupte et sensible. On ose retrouver quelques sonorités à la Bertrand Cantat dans la voix écorchée de Nicolas Dick. Les cordes sur « Tout va bien se terminer » et les harmonies subtiles entraînent le morceau vers un climax d’une beauté spectaculaire. « A la dérive » offre un voyage avec la guitare, la basse et les samples alignés comme le ressac de l’écume sur un ton mélancolique sépia. Un (seulement !) cinquième album intéressant de la part du duo français, avec une évolution nette vers quelque chose plus posé, eux qui ont débuté à la fin des années 80’s dans l’indus avant de s’orienter peu à peu vers cette new wave post-punk plus fine et mature. Comme les rides sur un visage, l’expérience, le vécu, cachent en fin de compte une nature intérieure plus intime et moins rugueuse malgré les épreuves de la vie qui passe. [Marie Gazal]
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