L’exercice symphonique peut revêtir différentes symboliques pour les groupes de metal. Simple luxe pour certains à la renommée internationale (les S&M et S&M II de Metallica à San Francisco), l’adaptation de morceaux metal avec un orchestre symphonique, outre le challenge artistique, rendant bien souvent le plus bel hommage qui soit aux compositions. Pensons à Architects qui s’est produit aux légendaires studios londoniens d’Abbey Road, cinq ans après le décès de Tom Searle. Aujourd’hui, Orphaned Land pousse l’exercice encore plus loin. Sur fond d’exacerbation du conflit israélo-palestinien, sortir un live symphonique sonne comme une action engagée. Hasard des évènements sur le calendrier ? Un hasard troublant et si retentissant plus que jamais à l’heure actuelle. Alors que dire d’A Heaven You May Create, ce second album live mais le premier symphonique du groupe précurseur d’un style musical (l’oriental metal) aux revendications d’amour et de paix affirmées dans un pays en guerre depuis des décennies ?
Capté au cœur de la pandémie de covid, malgré ses limitations toujours d’actualité alors en juin 2021, Orphaned Land a tapissé le Heichal HaTarbut de Tel-Aviv, en Israël, de sa musique doom et oriental metal progressive, avec des messages forts, tantôt pleins d’espoir, tantôt assombris par la lassitude, qui font doublement écho aujourd’hui étant donné la triste actualité au Proche-Orient. Entouré d’un orchestre symphonique de pas moins de soixante musiciens, le groupe jouant ici à domicile, excelle dans l’art d’adapter ses tubes (« All is one », « Mabool »), comme ses morceaux plus introspectifs (« A Never Ending Way », « Birth of the Three ») qui se prêtent merveilleusement à la symphonie. L’orchestre donne encore plus de volume et d’épaisseur à la musique déjà intense chez Orphaned Land.
Les solos de guitares assurés ici par Idan Amsalem et Chen Balbus (autrefois ces classiques étaient assurés par le sympathique Yossi Sassi, parti faire carrière en solitaire en 2014) sont accentués par les cordes en arrière-plan dans un effet dramatique, très cinématographique : la violence de « Mabool », l’émotion à fleur de peau à travers la voix de Kobi Fahrat sur « The Storm Still Rages Inside » avec ce solo de guitare magnifique qui prend le relai, la joie authentique qui se dégage sur « Kiss of Babylon », le très oriental « Sapari » dont la voix féminine est sublime, devant un public de fans aux anges. Ce live se veut à l’image du groupe et de sa musique : réunificateur de différents horizons, cultures et religions. Un très beau témoignage live (disponible en CD/DVD) qui sonne comme un message d’espoir en ces temps de conflits armés et de montée des extrémismes politiques et religieux. [Marie Gazal]
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