Avec un premier album sorti avant que le monde ne soit mis en pause par l’arrivée du Covid-19, les Norvégiens de The New Death Cult ont eu presque trois ans pour travailler et proposer un nouvel opus. Un temps qui leur a été bénéfique, puisqu’ils nous proposent aujourd’hui Super Natural, leur disque le plus sincère et le plus identitaire. [Entretien avec Jon Vegard Naess (chant, guitare) par Aurélie Cordonnier – Photo : DR]
En général, on dit que le second album d’un groupe est toujours celui de la maturité. Est-ce vrai ? Le ressentez-vous de cette manière avec Super Natural ?
Nous sommes entrés en studio pour faire cet album en mai 2020. On venait juste de sortir notre premier album, à l’automne 2019, donné quelques concerts et un peu tourné et par la suite, le monde s’est arrêté. Donc nous l’avons construit pendant ces moments de live. Nous avons pris certains des riffs sur lesquels nous avons jammé en répétition, nous les avons emmenés en studio pour en faire un album. Je ne pense pas que nous ayons ressenti une quelconque pression à ce moment-là. Je pense que pour nous, il était juste question de mettre ces idées et ces chansons sur des bandes et de s’amuser. Évidemment, le Corona est arrivé, nous avons fait cet album en studio, nous pensions que ce serait juste un truc de deux ou trois semaines au début, peut-être quelques mois de plus, et le monde reviendrait à la normale. Cela a duré un certain temps, nous n’avons pas touché à cet album pendant tout ce temps. Je ne pense pas que nous ayons ressenti une quelconque pression en le réalisant, donc il sonne vraiment naturel, à défaut de trouver un meilleur mot ! (rires) En-tout-cas, pour nous, c’est le cas. Nous n’avons pas eu le temps de ressentir une quelconque pression, nous nous sommes simplement lancés dans l’album.
Beaucoup de choses se sont passées dans le monde depuis la sortie de votre premier album en 2019. Le Covid-19, comme vous l’avez mentionné, mais aussi la guerre en Ukraine… Est-ce que tous ces événements ont eu un impact sur vous et ont changé votre manière de créer de nouvelles musiques ?
Oui, j’imagine que c’est le cas, à un certain degré du moins. Je pense que le premier album, et la plupart des paroles que nous avons écrites, sont répétés dans cet album également. Il y est beaucoup question d’amour universel, d’acceptation. Je pense que si ces incidents ont eu un impact sur le côté lyrique des choses, ils n’ont fait que l’amplifier pour nous. Cela l’a rendu plus fort. Et cela a rendu aussi le message que nous essayons de faire passer plus important, qui est : « Aimez-vous les uns les autres et passez un bon moment ».
Il y a quelque chose de vraiment transcendant dans vos nouvelles compos. Comment avez-vous mis en œuvre votre processus créatif pour créer de telles chansons ? Est-ce difficile de trouver des paroles et des mélodies qui résonnent en chacun d’entre nous ?
Le processus créatif pour faire de la musique démarre habituellement avec de simples démos. Pour moi, il démarre généralement avec quelque chose que j’ai créée, car je suis également le chanteur, donc j’ai besoin d’avoir une structure sur laquelle appuyer ma voix. J’ai besoin de me sentir chez-moi d’une certaine façon. C’est donc généralement une structure que nous emmenons en répétition et que nous jouons avec les autres membres. Ils y ajoutent beaucoup de leur influence dans leur son et leur style, ainsi que beaucoup d’arrangements. Une fois que nous avons fait cela, les paroles viennent en quelque sorte à travers les démos. Généralement, il n’y a pas de paroles au départ, mais il peut y avoir des mots, des titres, des idées ou quelque chose comme ça, mais ça a tendance à se révéler après coup. C’est ce qui se passe avec les paroles. Et je pense que les thèmes de l’album gravitent naturellement autour de ces paroles pour moi. C’est comme si j’exprimais ce que je ressens, c’est quelque chose de naturel. (sourires)
Il y a aussi quelque chose de très électrisant dans Super Natural qui me rappelle un peu l’album Black Holes and Revelations de Muse. Est-ce que cet album a eu une influence sur vous ? Et quels sont les albums qui vous inspirent le plus ?
Tout à fait. Tout d’abord, merci. Nous sommes de grands fans de Muse. Nous avons écouté cet album et beaucoup d’autres albums de Muse. Pour moi, Resistance est mon préféré, mais nous sommes un groupe très diversifié. Anders (Langset, batteur) peut écouter de la country. (rires) Et Eirik (Naess, lead guitariste) peut écouter du black metal. C’est très varié. Mais l’une des rares choses sur laquelle nous sommes tous d’accord, c’est Muse. C’est notre principale influence. Je pense que c’est absolument le cas, tout comme les paroles. C’est très proche du style lyrique de Matt Bellamy. Nous nous sentons tout à fait à l’aise avec Muse de cette façon. Donc oui, c’est définitivement notre groupe préféré.
L’une de mes chansons préférées sur l’album est « Superglue » qui parle des réseaux sociaux. Personnellement, quel genre de relation(s) entretenez-vous avec les réseaux sociaux sur la toile ?
C’est une relation compliquée, comme pour tout le monde, je suppose. Je me considère comme faisant partie intégrante des réseaux sociaux. C’est un endroit où l’on met en avant tout ce qui va bien mais la réalité avec ses hauts et ses bas, en particulier les mauvais côtés. Souvent, on a tendance à les passer sous silence. On montre toujours les meilleurs côtés, tout a l’air génial et joli, tout est parfait. Et je suis également coupable de cela. Je vais aller à des concerts et prendre une photo mais si j’ai une mauvaise journée, je ne veux pas en parler sur Instagram ou Facebook. Je me considère donc comme faisant partie du problème, mais je ne pense pas que les paroles de la chanson parlent uniquement de cela. Peut-être qu’elles parlent de la réalité et du contraste avec le monde des réseaux sociaux, qui peut être perçu comme faux.
Depuis le début, votre musique est un mélange de rock des années 1990 et de rock moderne. Le côté 90’s est peut-être même plus accentué sur Super Natural. Est-ce par nostalgie de cette époque que vous proposez ces sonorités ? Et qu’aimez-vous dans ces sons ?
Je pense que c’est une coïncidence pour être honnête. Le son de l’album est, comme vous l’avez dit, un peu 90’s ou peut-être beaucoup, mais je pense surtout que c’est, à au moins 80 %, le son du groupe et ce qui en ressort quand nous jouons et faisons ce que nous aimons. Les 20 % restants sont peut-être dus à Stamos (Koliousis), le producteur de l’album, qui est lui aussi très attaché à ce type de son, à l’esthétique sonore, à la double piste pour le chant, aux sons de la batterie et de la guitare. Je pense que c’est un mélange des deux mais que c’est surtout la façon dont nous jouons. En fait, nous n’y avons pas vraiment réfléchi, nous essayons juste de capturer le son organique du groupe aussi purement que possible.
Le visuel de l’album est également très intriguant. Cet immense œil en plein milieu d’un désert. Quelle est sa signification ?
Je pense qu’il faut demander à Rémy. C’est lui qui a réalisé notre pochette. Nous avons envoyé à Remy la musique et les paroles, et nous avons parlé de la signification de chaque chanson. Il a tout de suite compris, c’est un vrai artiste. Il a écouté la musique et les paroles et a sûrement essayé quelques trucs, mais nous n’avons rien vu avant que tout ne soit terminé. Il nous l’a donc révélé en nous disant « voilà la pochette ». C’est son interprétation de la musique et des paroles. Il y a quelques similitudes entre les pochettes des singles et celle de l’album. Si vous regardez toutes les pochettes, elles sont centrées sur une sphère ronde. Nous avons l’œil rond et si vous regardez par exemple la pochette de « Superglue », vous avez le globe, sur la pochette de « Get Ready », nous avons le genre d’organisme cellulaire rond. C’est une sorte de sphère ronde, c’est très conceptuel. J’adore ça. Son nom est sur Instagram et sur le web, il est vraiment bon.
Quand on écoute votre musique, on sent que vous êtes le futur prometteur du rock alternatif. Est-ce une chose à laquelle vous pensez et essayez de transmettre dans votre musique ?
Nous essayons d’y penser, même si nous sommes vraiment inspirés par le son des années 90 et du début des années 2000. On aime un peu nous considérer comme avant-gardistes. Au moins avec les paroles, nous essayons d’être différents, de chanter des choses différentes de la plupart des autres groupes. Nous aimons nous considérer comme modernes, mais n’essayons pas vraiment d’être quoi que ce soit. Mais on regarde définitivement vers l’avant pour essayer de créer quelque chose d’unique et de différent. C’est quelque chose que nous aimerions atteindre.
Enfin, parlons de la dernière chanson de l’album, « The World ». Que pensez-vous justement du monde actuel dans lequel nous vivons ?
C’est l’un des derniers morceaux que nous avons décidé de mettre sur l’album parce que nous avions beaucoup d’idées différentes. Nous avons failli ne pas la mettre sur l’album, mais Eirik et moi en avons discuté et nous nous sommes dit que s’il y avait un moment pour mettre « The World » sur un album, ce serait maintenant, parce que c’est un morceau avec des paroles tellement importantes pour l’époque dans laquelle nous vivons. Mais qu’est-ce que je pense du monde dans lequel nous vivons ? Je pense que la plupart de nos paroles se résument à cela, c’est une belle maison. C’est notre maison, cette planète, c’est notre seule maison et nous devons en prendre soin. Je pense aussi que les gens ordinaires comme vous et moi font beaucoup de bonnes choses et font de leur mieux. Mais je pense que s’il y a un problème de pollution, ce sont toujours les grandes entreprises, les grandes sociétés, qui peuvent faire la différence, mais elles sont trop lentes à réagir et c’est pourquoi nous devons protester. C’est pourquoi nous avons le réchauffement climatique et ses effets que nous voyons. Je pense que tout ce que nous pouvons faire, c’est chérir notre maison, faire de notre mieux et exprimer nos opinions chaque fois que nous le pouvons.
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