A la rédaction de METAL OBS, nous suivons le groupe de black metal allemand THRON depuis ses débuts en 2015 dans la Forêt-Noire, et plus particulièrement depuis la sortie de leur deuxième album, Abysmal, en 2018 sur ‪@Listenablerecs‬. On avait donc craqué sur eux car ils pratiquent un black metal mélodique subtil et savamment construit, dans la lignée des maîtres du genre : DISSECTION, SACRAMENTUM, NECROPHOBIC, NAGLFAR, MÖRK GRYNING, etc., (groupes que nous avons tous interviewés dans METAL OBS Magazine). En 2025, soit deux ans après l’excellent album Dust pour lesquels nous nous étions entretenus une nouvelle fois avec son guitariste PVIII – véritable témoignage sonore de leur évolution constante et de leur soif de création –, ils nous offrent Vurias, leur cinquième chef-d’œuvre studio, plus sauvage, plus dynamique et plus visionnaire que jamais car ils innovent tout en s’inspirant du passé. Là où Dust baignait dans la grandeur d’un heavy/black metal traditionnel, Vurias plonge dans des eaux plus sombres et plus explosives. Les influences classiques demeurent – ​​un écho spectral plutôt qu’une présence dominante – tandis qu’une atmosphère plus brutale s’installe. Au cœur de cette tempête, THRON dévoile une sophistication inédite, puisant son inspiration dans le rock progressif classique et les paysages sonores obscurs des années 70… Plus d’explications sur les inspirations de THRON et leurs nouveautés ci-après sa tête pensante et principal compositeur, sans maquillage cadavérique, ni cartouchière ou pics ! [Entretien réalisé par Zoom avec Patrick (ex-FEAR MY THOUGHTS), alias « PVIII » (guitares) par Seigneur Fred – Photos : DR]

->> Single « The Serpent’s Path » par THRON, extrait de l’album Vurias (Listenable Rec.)

Vurias - THRON
THRON
Vurias
Black metal
Listenable Records

Parmi la légion de hordes démoniaques rendant régulièrement hommage à feu Dissection sur la scène black metal internationale, et notamment européenne, il y a du bon et du moins bon, un peu comme le bon et le mauvais chasseur (surtout en cette saison automnale !). Certains s’exécutent en parfaits petits soldats inconnus, sans réelle personnalité ni talent, avec juste des reprises. D’autres brillent davantage, avec une interprétation propre et un répertoire influencé forcément par les deux albums cultes The Somberlain et Storm of the Light’s Bane à l’exécution millimétrée mais sans forcément la ferveur qui animait les membres du groupe culte suédois jusqu’au suicide de son leader Jon Nödtveidt (R.I.P.) le 13/08/2006. C’est par exemple le cas du side project THULCANDRA de Steffen Kummerer (OBSCURA, etc.) dont la technicité hors-pair n’est plus à démontrer, ou bien notre artiste français Brice Leclercq (ex-DISSECTION) et son one man band FROM KAOS (interview à retrouver ici).

Et puis il y a les Teutons de THRON qui sont en train de prendre méchamment possession du trône black metal mélodique dans leur Forêt Noire… A vrai dire, on les suit depuis leurs débuts à METAL OBS, mais véritablement et intensément depuis leur second méfait Abysmal à l’artwork sulfureux… Sur leur déjà cinquième méfait, Vurias, là c’est carrément la grande classe ! On en frissonne dès le premier morceau et imposant single, « The Serpent’s Path ». Tout est là, parfait, avec ce grain de guitare typiquement suédoise proposant des riffs et leads vraiment inspirés, dans une ambiance malsaine (le chant dérangeant de Chamca). Les mélodies finement ciselées de guitares vous happent et vous hantent sur des rythmiques diaboliques truffées de breaks (quelle batteur ce « J » !). Le riff glaçant d’ouverture d’ « Astral Materia », risquent de faire des émules en concert, ou le direct « One Truth, One Light ». Le ton est extrêmement heavy, belliqueux et dark, comme sur le puissant « Griefbearer ». Si ces chansons sonnent relativement classiques, elles ont le mérite d’avoir été composé avec grand soin tout en y amenant cette rage qui fait parfois défaut à THULCANDRA cité précédemment. Au micro, le chant de Samca, bien evil et relativement grave, comme celui d’un Legion (ex-MARDUK) y fait aussi pour beaucoup. On pense aussi aux dernières œuvres à l’inspiration retrouvée de 1349, le groupe norvégien de Frost et Ravn, aux légères influences thrashy.

Mais THRON ne joue pas la carte de la facilité pour autant à faire du remplissage, ni en proposant un ersatz de DISSECTION, même s’ils pourraient se le permettre sur ce nouveau pamphlet. Non. Tout au contraire (comme sur le bien nommé « A Paradox » et son accélération foudroyante alors qu’un shred de guitare côtoie un court solo de saxophone !). Non, THRON prend tout le monde à contre-pied une fois l’oreille charmée par ce que l’on voulait juste entendre. Il prend alors le temps développer son art, n’hésitant pas à expérimenter, prendre des chemins de traverse, plus sinueux mais tout aussi sombres et occultes, comme sur le second single « The Hunter And The Prey », plus proche d’un WATAIN par exemple (et l’album The Wild Hunt d’ailleurs qui fut loin d’être le meilleur de la discographie des Suédois). Le quintet allemand ose innover avec finesse, en ajoutant quelques claviers Hammond et effets par endroit avec maestria, voire même du saxo à la fin du morceau, un peu à l’instar d’IHSAHN. THRON s’inspire du passé tout en regardant plus loin devant soi, quitte à sortir un peu des codes du genre black metal, et musicalement, ça fait du bien. Il en résulte une totale réussite. C’est frais et en même respectueux de ses pairs et cousins scandinaves, tels que DISSECTION donc, mais aussi les NECROPHOBIC, SACRAMENTUM (R.I.P. également), ou NAGLFAR. Tiens, à ne pas confondre justement avec le combo allemand NAGELFAR et son chanteur (également membre d’ENDSTILLE, MORAST, GRAUPEL, GRAVEN…) qui vient hanter l’étrange morceau « Ungemach (Stilles Ende) », atmosphérique et progressif, emprunt d’une terrible noirceur, alors que côté percussions, nous avons droit à un superbe featuring du batteur de génie Norman Lonhard, ancien camarade de jeu du guitariste Patrick « PVIII » au sein de FEAR MY THOUGHTS (groupe de death metal/metalcore progressif qui splitta au début des années 2010). Pour la petite histoire pour ceux qui auraient raté un épisode, Norman rejoignit TRIPTYKON durant plusieurs années (et superbes chansons) après le split de FEAR MY THOUGHTS qu’il quitta par la suite malheureusement.

Enfin, en neuvième et ultime position, la chanson bonus « The Metamorph’s Curse », basée sur un mid-tempo, conclut Vurias de manière assez épique avec des chœurs appliqués, et toujours ces riffs de guitares à la fois glaçants et mélodies, juste après le déjà le superbe « The Hunter And The Prey ». Samca hurle à la mort, et pousse un dernier soupir, alors que nous, nous avons tout simplement retrouver le sourire après avoir headbangué comme des forçats durant quarante-sept minutes, non sans une certaine nostalgie, car comment ne pas penser toutefois à DISSECTION tout du long ? Qu’importe, c’est pour la bonne cause, pourrait-on dire ici. THRON frappe fort et délivre donc un black metal mélodique puissant et raffiné, à la fois old-school et par moment sacrément osé avec ses incursions progressives. Nödtveidt peut être fier de son héritage musical, uniquement celui-ci par contre, et non ses faits divers sanglants. [Seigneur Fred]

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