YAKUZA : Sutra

Sutra - YAKUZA
YAKUZA
Sutra
Post metal/Sludge progressif
Svart Records

Banzaï ! Voilà le cri que nous avons poussé à l’annonce d’un nouvel enregistrement de nos gentils barjots de Yakuza, bien silencieux depuis plus de dix ans. Ce n’était donc pas un clin d’œil à l’énième rediffusion du film culte avec Coluche à la TV, mais bel et bien l’arrivée et à présent l’écoute du successeur de Beyul, nommé Sutra, septième album studio de ce groupe inclassable de Chicago. Mais alors que s’est-il passé depuis tout ce temps ? Petit point sur la scène d’avant-garde dont ils faisaient jadis partie : Neurosis n’est plus, Isis a raccroché profitant d’une certaine manière à The Ocean (retrouvez notre dernière chronique de leur album Holocene ici), Mastodon s’est assagi, flirtant davantage vers le hard rock progressif dorénavant. Bref, le retour inattendu de Yakuza tombe presque à pic pour reprendre une place. Malheureusement, de nombreuses jeunes formations talentueuses dans ce genre de post hardcore/metal à tendance sludge se sont beaucoup développées durant la période de léthargie de nos quatre Yankees…

Eh bien ! Sur Sutra, on retrouve encore ces morceaux typiques de Yakuza alambiqués et noisy, avec cette énergie sludge/stoner bien présente, et toujours ces ruées hardcore, avec par-dessus ce chant punk presque maladroit, pas toujours des plus agréables (« 2is1 ») ce qui était déjà là le principal point faible sur un album comme Way Of The Dead). Mais leur point faible se transforme en point fort quand presque tout le monde participe, car les trois quarts du combo chantent ou apportent une belle contribution aux chœurs sur l’album (« 2is1 », « Alice »). Et quand les passages heavy sont plus appuyés, ces messieurs s’affirment, le timbre plus grave et enragée du guitariste Matt McClelland s’affirme aussi. Et net progrès, a contrario, on a même droit à une voix plus mélodieuse, presque claire. Dans le passé, on était alors parfois proche de celle de notre ami suisse Loïc Rossetti (The Ocean), comme à l’époque de Way Of The Dead. Côté guitares, on n’a pas trop le temps d’ennuyer entre les différents breaks, et les riffs se succèdent avec richesse (encore une fois le parfait exemple du single « Alice » mais également le monstrueux « Embers »). On pourrait citer plus loin enfin le groovy « Into Forever ». Attention, les atmosphères ne sont pas en reste pour autant dans ce magma sonore relativement déstabilisant pour l’oreille du néophyte, qui ne s’est jamais à quoi s’attendre, et justement, c’est ça qui est bien chez Yakuza (« Walking God » aux faux-airs ethniques à la SOAD suivie d’une progressive montée en puissance).

Comme d’habitude, diverses influences se brassent dans la musique des Américains qui n’a jamais peur d’expérimenter et de casser les codes, entre rock stoner, progressif, jazz, doom, sludge, punk/hardcore, etc. C’est ainsi que, comme dans le passé, on réentend ici avec plaisir du saxophone interprété par Bruce Lamont, par exemple sur « Echoes From The Sky » ou bien sur le renversant « Capricorn Rising » au double visage. On est même presque pris de court parfois par ce mélange détonant (« Burn Before Reading », « Psychic Malaise ») jusqu’au final épique de « Never The Less ». Alors fans de King Crismon, Mastodon, Neurosis, mais aussi Voivod ou Tool (en plus crade ici, bien sûr), ou des dernières œuvres françaises de Blut Aus Nord pourtant à des années lumières (sans le côté dark/black électro toutefois), penchez vos deux oreilles sur ce Sutra qui remet en fin de compte les pendules à l’heure pour Yakuza sur la scène metal d’avant-garde en 2023. [Seigneur Fred]

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