EVILE : Plongeon dans l’inconnu

Deux ans après le brûlot Hell Unleashed qui mit tout le monde d’accord sur la scène thrash metal européenne, tant par sa violence que sa technicité, Evile semble vouloir proposer aujourd’hui sur son sixième méfait The Unknown, un thrash plus calme et mélodieux aux influences heavy metal, posant quelque peu les choses et ralentissant le tempo, mais changeant aussi sa tonalité vocale, plus sombre et lourde. Alors comme on a souvent tendance à dire qu’un nouvel enregistrement constitue une réaction au précédent, nous avons voulu en avoir le cœur net en interrogeant OL Drake, après un rendez-vous manqué avec son chanteur, alors en pleine promotion, pour cause de mal de gorge… [Entretien avec oliver Drake (guitare, chant) par Seigneur Fred – Photo : DR]

Tout d’abord, comment vas-tu Oliver parce que tu étais malade et avais un mal de gorge la semaine dernière provoquant l’annulation de notre entrevue sur Skype ?
Bonjour ! Je vais bien ! Comme j’ai deux jeunes enfants, ils ramènent constamment de nouveaux rhumes et autres maladies à la maison, tu sais.

On s’est manqué il y a deux ans pour la promotion de l’album Hell Unleashed et côté concerts, avec le covid-19, ce fut plutôt limité pour espérer vous voir en live. C’était un album génial et les critiques (aussi bien par la presse que les réactions des fans) furent géniales. Quel est ton bilan sur ce précédent album maintenant, deux ans après sa publication ?
Nous sommes vraiment fiers de Hell Unleashed. C’était une déclaration faisant savoir à tout le monde qu’Evile est « de retour » et que nous sommes un groupe sérieux. Nous voulions faire l’album le plus rapide et le plus thrash possible. Ma voix était encore un travail en cours (et elle l’est d’ailleurs toujours) mais elle a fonctionné pour ça à l’époque de ce précédent album. C’est là où nous étions à ce moment-là.

Hell Unleashed est donc sorti en 2021, pendant l’épidémie de covid-19, et le Brexit était d’ailleurs d’actualité. Alors, avez-vous rencontré des problèmes administratifs pour voyager depuis ? (de nombreux artistes metal, comme Napalm Death ou Memoriam, m’ont encore parlé dernièrement des complications administratives et fiscales) ? Et avez-vous pu tourner un peu tout de même à partir de 2022 pour défendre live Hell Unleashed ?
A vrai dire, nous avons eu du mal à obtenir beaucoup des dates de spectacles pour Hell Unleashed. Les files d’attente des festivals étaient sans cesse reportées, même jusqu’en 2023, et tout devenait trop cher pour nous partir faire des tournées de concerts. Les choses sont encore chères aujourd’hui, et encore affectées par le covid.

Maintenant, parlons plus de la musique d’Evile ! Mais avant de parler du tout nouvel album The Unknown, afin de mieux te connaître, je voulais découvrir quelles sont tes racines musicales avec lesquelles tu as grandi en Grande-Bretagne quand tu étais jeune car on retrouve des influences heavy et thrash metal à travers ta musique ? Mais plutôt thrash US de Bay Area, je dirais, qu’East Coast (Anthrax, Overkill, etc.) de New York, et peut-être quelques influences de thrash européen britanniques (comme les groupes Onslaught, Xentrix…) mais pas des groupes allemands. Qu’en dis-tu ?
J’ai grandi avec mes parents qui passaient du Queen, Led Zeppelin et Deep Purple. En vieillissant, je suis tombé sur Guns’n Roses. Quand mon frère, Matt, est entré dans sa période Oasis et aussi Metallica, j’ai commencé à aimer ce que j’entendais de Metallica et j’ai lentement commencé à m’y mettre. Je suis ensuite passé à Sepultura, Annihilator et Testament…. J’étais plus dans le thrash américain que dans les trucs britanniques, en fait, même si j’aimais et aime toujours l’album Sanity d’Onslaught.

En général, on a l’habitude de dire qu’un nouvel album studio d’un artiste est une réaction au précédent… En écoutant les nouvelles chansons de The Unknown, cela semble se confirmer parce que si Hell Unleashed était plus speed et thrash, le nouvel album est globalement plus lourd et plus bas en gros pour résumer. Était-ce conscient, voulu, lorsque tu as composé les nouveaux riffs, et es-tu d’accord avec cette affirmation et analyse ? Ton but était-il de créer une antithèse à l’album Hell Unleashed ?
Nous ne voulions pas recréer le même album. Nous voulions tout renverser et faire le contraire et explorer des tempos que nous n’avions jamais explorés auparavant. Le processus d’écriture et l’approche sur The Unknown furent exactement les mêmes que ceux que j’ai toujours suivis pour les albums d’Evile cependant. Disons que c’était juste des vitesses différentes sur les nouveaux morceaux ici. On aime jouer des trucs plus lents ou mid-tempo en concert, car cela provoque des montées et des descentes durant nos sets live.

Quant à l’atmosphère générale sur The Unknown, elle est très obscure, plus sombre, voire parfois mélancolique…Te sentais-tu triste ou frustré (car vous n’avez pas pu tourner à cause du virus du covid-19), ou peut-être étais-tu anxieux quant à l’avenir incertain de ta carrière musicale pendant l’épidémie ? Celle-ci a pu affecter ton humeur et celle du groupe lors de l’écriture et composition du nouvel album…
Les sujets du nouvel album sont assez sombres alors que je regardais à l’intérieur de moi, en explorant tout mon être. Tout, du combat à la dépression, en passant par le fait de devenir père pour la première fois, m’a plus ou moins nourri et inspiré sur The Unknown.

Pour les guitaristes amateurs qui nous lisent, comme tu es l’un des guitaristes d’Evile, peux-tu nous dire quels les principaux accordages de guitare utilisé sur le nouvel album ? En Ré standard peut-être ? Ou juste un demi-ton du Mi standard comme Slayer le pratiquait ? Par exemple sur la nouvelle chanson titre « The Unknown » ?
Il y a quelques réglages différents sur ce nouvel album. Trois chansons sont jouées en Eb Standard, c’est-à-dire un demi-ton en dessous la norme du Mi standard, en effet, comme Slayer ; quelques autres morceaux sont en Ré (D) standard, oui, et le reste est joué en Do (C#) standard (comme la chanson-titre « The Unknown »).

Vocalement, ta voix est plus grave et moins agressive. Ça sonne plus lourd, heavy. Comment as-tu travaillé ta voix sur The Unknown et as-tu changé quelque chose pour aborder les nouvelles chansons cette fois parce que ça sonne plus mélodique et accrocheur, je dirais ? Suis-tu des cours avec un coach vocal, par exemple ?
En fait, j’ai abîmé ma voix en faisant Hell Unleashed, Je ne savais pas ce que je faisais alors Chris m’a aidé en studio pour que du moins ça sonne assez bien. J’ai contacté Melissa Cross et elle m’a vraiment aidé avec ma voix. Elle m’a sauvé la vie vocalement; J’ai tellement appris d’elle. J’apprends encore maintenant, chaque jour. Les chansons de The Unknown ne convenaient tout simplement pas ici avec l’approche plus agressive. En fait, certaines chansons ayant un tempo plus lent, les voix sont beaucoup plus vulnérables et nécessitent plus de mélodie.

À propos des paroles et du titre du nouvel album : pourquoi justement « The Unknown » ? C’est toi qui écrit toutes les paroles chez Evile ? Quelle est l’idée ou le concept ici? Les paroles semblent assez philosophiques, comme une méditation, une introspection, ou bien une réflexion sur soi-même dans notre société humaine actuelle…
Pour cet album, je me suis tourné vers des paroles moins typiques que ceux en général dans le metal (démons, etc.) et j’ai regardé à l’intérieur de mes propres expériences. Les paroles de The Unknown ont été vaguement écrites alors que je n’étais plus dans le groupe en 2017 (Ndlr : OL Drake a quitté le groupe, alors en tant que guitariste, entre 2013 et 2018), alors que nous attendions notre premier enfant. Il s’agit des peurs et des angoisses de devenir parent pour la première fois. S’attaquer à la dépression, à l’estime de soi/image de soi, à l’hypocrisie, faire face à la perte, voilà un peu tout ça. Ce sont beaucoup de sujets personnels.

Mais le thrash metal se doit d’être violent et possède généralement un contenu social et politique. Une chanson comme « A Reap What You Sow » (votre second single) en est l’exemple parfait, de ce qu’est le thrash metal depuis les années 80. S’agit-il d’émeutes dans nos villes en cette période d’inflation forte et de grèves qui touchent aussi la Grande-Bretagne, mais aussi en prise avec les guerres dans le monde ?
« Reap What You Sow » est ce que tu as envie que ce soit comme chanson, chacun l’interprétant à sa façon quoi qu’il en soit, mais pour moi, il s’agit d’un hypocrite que je connais dans la vie. Quelqu’un qui dit qu’il ne va pas faire quelque chose mais qui le fait lui-même quand même, bref un menteur.

Avant de conclure, je voulais savoir pourquoi Evile a quitté le célèbre label britannique Earache Records après l’album Skull en 2013 ?
Notre contrat de quatre albums s’est tout simplement terminé avec eux…

Que souhaites-tu ajouter à propos de ce nouveau sixième album studio The Unknown et peut-on espérer vous voir en live en festival d’été cette année ou l’année prochaine ou bien lors d’une nouvelle tournée européenne qui passera, je l’espère, prochainement par la France ? (sourires)
On espère vraiment revenir en France avec cet album ! S’il vous plaît, faites passer le mot à propos d’Evile, diffusez l’album et procurez-vous en également une copie. A bientôt ! Merci ! (sourires)


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