Mieux vaut tard que jamais ! Suite à plusieurs rendez-vous manqués en début d’année et des emplois du temps respectifs chargés, nous n’avions pas pu nous entretenir avec le légendaire chanteur britannique de death metal, Karl Willetts (ex-Bolt Thrower), comme en 2021 pour leur précédent album To The End. Ce n’était alors que partie remise. De passage au Riip Fest en juillet dernier avec son groupe Memoriam pour défendre comme il se doit leur dernier et excellent opus Rise To Power (album du mois de février 2023), celui-ci a bien voulu nous accorder un face-à-face dans les coulisses du festival, quelques heures avant de monter sur la scène de l’Oésia (au nord de Tours) pour un concert mémorable. [Entretien avec Karl Willetts (chant) par Seigneur Fred – Photos live : Seigneur Fred – Autres photos : droits réservés]
Bon, merci déjà Karl pour cette interview. Enfin ! On va tout d’abord essayer de faire plus court que la précédente interview, donc on ne parle pas de ta reprise de tes études en 1994-1997 provoquant à l’époque ton départ de Bolt Thrower, ni trop du passé, promis, mais plutôt de l’actualité avec Memoriam…
Ok, entendu, mais ça me paraît difficile de faire court avec toi et moi, à mes yeux, mais ok, allons-y ! (rires)
Et pour l’heure, tu vas jouer ce jour avec Memoriam au Riip Fest qui est un festival indépendant dans le centre de la France, orienté plus hardcore que metal. Connais-tu certains groupes présents à l’affiche du festival ce weekend ?
En effet. C’est très crossover. Oui, j’en connais certains, comme Overpower qui sont originaires de Bristol, même si nous on vient de Birmingham, mais ce n’est pas si loin. J’aime bien ce qu’ils font, ce mélange de hardcore et de metal, tout comme certains autres groupes mais français ceux-là qui jouent également aujourd’hui. C’est bien. Il y en a pour tout le monde. Après, c’est sûr, bon, j’aime quand il y a du bon vieux death metal comme nous, et j’espère que toi aussi ? (rires)
Oui, bien sûr ! Mais il y a tellement de festivals, petits ou grands, à présent un peu partout en Europe et dans le monde, notamment en Angleterre, et en France. Alors soit les festivals se spécialisent, soit s’élargissent pour brasser de plus en plus de genres musicaux et de personnes, mais le porte-monnaie des spectateurs n’est pas extensible. Ils ne peuvent aller tout voir. C’est un coût aussi d’acheter les billets, se déplacer, le transport, etc.
On comprend bien la situation, et on fait attention nous aussi à nos frais de déplacement. On a joué au Hellfest Festival en France qui est l’un des plus gros en metal, c’était l’an dernier en 2022. On devrait refaire des plus gros festivals l’année prochaine. Aujourd’hui, ici c’est plus petit, c’est bien aussi. Dans tous les cas, on est très sélectifs nous aussi quant aux concerts que l’on veut donner, et selon nos agendas. C’est essentiellement les weekends ou sur nos temps de repos à côté de notre travail pour ceux qui travaillent à côté comme moi. On ne peut partir que quelques jours.
C’est d’ailleurs votre unique concert français cet été. Pourquoi ?
Comme je te le disais, on est très sélectifs, et on ne peut aller jouer partout de toute façon. Alors on fait attention. On fait ça plutôt le weekend donc, durant quelques jours. De toute façon, on ne peut pas partir en tournée un peu partout comme le font les grands groupes. Et c’est assez difficile d’être disponibles tous en même temps dans le groupe. Et puis on fait attention aussi au niveau de la programmation sur les concerts. Et là ça a l’air plutôt cool ici aujourd’hui ! (sourires)
Du coup, si vous tournez peu et choisissez avec soin vos dates de concerts afin de les grouper judicieusement, cela vous a permis d’enregistrer pas moins de cinq albums studio en peu de temps, ce qui est n’est pas rien pour un groupe fondé seulement en 2015, c’est-à-dire il y a huit ans ?
Correct. Je pense que c’est un point important, accéléré ensuite par le covid-19 du fait qu’on ne pouvait pas justement jouer en concert, même sans faire de grande tournée. On est très bien préparé, et on se connait et ça va assez vite pour bosser ensemble à vrai dire. On a fait ça en sept ans seulement si tu comptes puisque Rise To Power est sorti début 2023. Tu vois, là on va partir jouer ensuite dans un festival en Espagne, puis retour en Angleterre, puis en Suède, etc. On devrait rejouer au Bloodstock Festival chez nous en Angleterre l’an prochain. Voilà comment on fonctionne. Et on est pas mal occupé finalement…
Votre guitariste, Scott Fairfax ici présent à nos côtés, compose-t’il beaucoup à la maison, ou comme ici entre deux concerts, même entre deux dates quand vous êtes dans votre tour bus (van) ? Même quand il est aux toilettes par exemple ? (rires)
Partout, il est capable de faire ça à la maison, de composer ici, n’importe où ! N’importe où, je te dis ! (rires) Devant la télé, aux toilettes, en quelques heures, il peut accoucher de nouveaux matériels. Il est très rapide, et est vraiment incroyable de ce côté-là. On a déjà quelques morceaux de prêts par exemple dont il a écrit les riffs pour un prochain album, tu vois.
Et toi, Karl, ensuite, tu écris toutes les paroles de Memoriam, c’est bien ça ? Comme sur Rise To Power, votre nouvel album paru chez Reaper Entertainment en février 2023 ?
Oui, c’est ça, après il me reste à écrire dessus avec mes textes pour les paroles. C’est en effet moi qui ai écrit toutes les paroles. J’ai aussi enregistré les guitares, la basse, la batterie (il commence à en mimer le rythme), etc. !! (rires)
(éclat de rires général de tous les musiciens (Scott Fairfax, à côté ne participant pas officiellement à l’interview)
Scott, tu rigoles, mais quand tu composes les riffs à la guitare, t’accompagnes-tu d’une batterie électronique ou une boîte à rythmes ? Tu as besoin de ça ?
Scott : Oui, j’en utilise au départ, ça m’aide.
Qui a produit au fait en studio ce dernier album en date, Rise To Power, dont le son est énorme ?
Karl : Russ Russel. (Ndlr : Napalm Death, Dimmu Borgir, Amorphis, Evile, Insidious Disease, The Haunted, etc.)
Penses-tu que Rise To Power soit le meilleur album studio à ce jour de Memoriam ?
Euh… Merde ! (rires) Pas facile à dire comme ça… (rires)
Silent Vigil était, peut-être, plus sinueux, plus brut aussi et versatile, alors qu’ensuite To The End et le nouveau, Rise To Power, sont plus puissants et mélodieux, Rise To Power étant probablement le plus épique… Qu’en penses-tu ?
Ouais, je suis plutôt d’accord. Au départ, on cherchait notre son sur les deux ou trois premiers albums. On cherchait où on allait aller. On a ensuite peu à peu développé ce son à travers nos chansons. Sur Silent Vigil, on avait trouvé nos marques en studio. Et je pense que l’on a véritablement trouvé ce que l’on cherchait à partir de To The End. A ce moment-là, notre batteur actuel, Spikey, a rejoint le groupe et on a fait certains changements, notamment dans les accélérations de rythme.
Sur cet album, To The End, j’ai vraiment cru que ce serait déjà le dernier album de Memoriam car To The End signifiant « Jusqu’à la fin »… ? Un peu comme Hypocrisy nous avait fait le coup dans le passé avec son album The Final Chapter… (rires)
(rires) C’est vrai. Disons que c’était la fin d’une histoire à un moment donné. Beaucoup m’ont dit ça aussi : « On y est ! C’est la fin, telle une nouvelle tragédie ». Mais non, on a ensuite poussé ça, je pense, à un autre niveau, supérieur pour accomplir ce cinquième albim. Plusieurs mois avant de rentrer en studio pour Rise To Power, on avait enregistré différentes maquettes de pré-production car on a eu le temps à cause du covid-19. Alors on était fin prêt pour enregistrer ce nouvel album. Voilà pourquoi il sonne encore plus abouti car on a vraiment pris le temps d’explorer les choses, de faire les choses.
Il y a une chanson sur Rise To Power dont le nom m’échappe et qui musicalement, mais aussi au niveau de son titre justement, m’a fortement évoqué un autre groupe de metal britannique, plus doom et gothic metal que death metal par contre. Il s’agit de Paradise Lost. Voyez-vous de quelle chanson je parle ?
(Scott Fairfax et Karl Willetts réfléchissent un petit moment…)
Karl : Euh… Ah oui, je vois de quelle chanson tu parles… C’est « I Am The Enemy », non ?
Oui, exactement. L’intro à la guitare sonne comme du Paradise Lost. D’ailleurs Paradise Lost avait écrit une chanson baptisée « The Enemy » sur son album In Requiem (2007/Century Media). Y’a-t’il là un lien de parenté avec PL car vous êtes un peu des cousins au sein d’une même famille anglaise, non ?
(rires) Non, mais on aime expérimenter, aborder des choses plus mélodiques, plus lentes aussi comme ça qui sonnent doom metal. Tu sais, on possède diverses influences au sein du groupe. Scott est capable de jouer différents types de riffs à la guitare. Tout dépend de l’inspiration du moment.
À propos de la set-list ce soir, qu’allez-vous jouer ? Cette chanson peut-être « I Am The Enemy » et des morceaux plus doomy de votre répertoire ?
Ah non, pas ce soir ! C’est du hardcore, donc nous on joue un set hardcore ce soir ! (rire général) On va droit au but, il faut que ça soit direct et que ça tue tout le monde ! (rires)
Je me dois de te demander si on aura droit cependant à quelques chansons de Bolt Thrower qui raviraient les fans comme nous ?
Non.
Bon. Ça a le mérite d’être clair ! (rires)
Oui, c’est clair, je pense ! (rires)
Tu me disais tout à l’heure que Scott composait régulièrement, tout le temps, à la guitare et vous aviez déjà des idées pour votre prochain album studio alors ?
Absolument, oui. C’est déjà en cours.
À quoi peut-on s’attendre car parfois, on dit qu’un nouvel album studio est une réaction au précédent ?
Karl : On va dire que ce sera une progression encore par rapport à ce que l’on a fait. Ce sera dans la lignée de Rise To Power et des deux derniers albums maintenant que l’on a trouvé notre son, mais on ne se refuse rien. Une cohérence demeure cependant. Donc il n’y a aura pas de gros changements non plus.
Scott : Ce sera davantage progressif, plus « clubby » en fait… (Scott regarde Karl et Frank (basse) avec un grand sourire) (fou rire général)
Du death metal progressif ? Ok, pourquoi pas. Alkaloid s’apprête à sortir un nouvel album de death progressif intéressant, avec des membres d’Obscura, Triptykon, etc. Il y a toujours eu plein de formations comme ça. Pestilence, Opeth auparavant aussi, dans le passé…
Karl : Non, on fera toujours du pur death metal old school avec Memoriam, mais il peut y avoir certains éléments issus d’autres genres, d’autres influences, bien sûr. On reste ouvert néanmoins.
Sur ce prochain album déjà en cours de conception donc, pourra-t’on retrouver des duos ou invités sur certaines chansons comme ça se fait souvent dans le hardcore justement ?
Non, je sais, mais on ne fait pas trop ça nous. (rires)
Alors quand allez-vous enregistrer ce dixième album en prévision et quand sortira-t’il ? Toujours sur le label Reaper Entertainment Music ?
Je pense qu’on devrait l’enregistrer en début d’année prochaine pour une sortie en 2024 si tout va bien. On prépare tout ça nous-mêmes déjà et ça avance bien. Et oui ce sera encore chez Reaper Ent. Music.
Pour conclure, Karl, que souhaites-tu ajouter pour les fans français de Memoriam ?
On a envie de jouer plus en France car on aime beaucoup la France. On reviendra jouer à Paris bientôt, probablement l’année prochaine. On reste à l’écoute des opportunités dans tous les cas. Ce soir on va voir différents publics, de tout âge, ça c’est bien. Il y en a pour tous les goûts et toutes les générations. Merci à tous nos fans qui nous soutiennent.
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