MEMORIAM : Rise To Power

Rise To Power - MEMORIAM
MEMORIAM
Rise To Power
Death metal
Reaper Entertainement

Quelle forme olympique chez nos amis rosbifs de Memoriam ! Malgré l’âge, il semblerait que nos voisins d’outre-manche excellent davantage en matière de death metal dernièrement, plutôt qu’en sport (rugby)… Aussi, parfois on regrette vraiment que Karl Willetts et Bolt Thrower aient splitté peu de temps après la mort du batteur Martin « Kiddie » Kearns en 2015 durant son sommeil… En effet, cet évènement qui inspira plus ou moins ses membres alors en deuil, donna naissance à la fondation de Memoriam (lire notre précédente interview de Karl Willetts en 2021), outre les motifs juridiques autour du nom de cette légende du death metal britannique qui ont divisé la troupe… D’ailleurs, Memoriam prolonge sa mémoire (d’où le nom) et évoque forcément encore, chez les plus nostalgiques d’entre nous, Bolt Thrower à l’écoute de ce déjà cinquième opus studio. Composé de huit nouveaux morceaux, tous de très bonne facture, Rise To Power est l’album idéal pour découvrir Memoriam si vous ne connaissiez pas Bolt Thrower (il serait temps !), et vice-versa.

Petit passage en revue des troupes ici présentes : derrière les fûts, nous avons donc depuis trois ans maintenant Spikey Smith (ex-Sacrilege (UK), ex-The Damned, ex-Morissey, ex-Killing Joke (live)…), en lieu et place d’Andrew Whale (ex-Bolt Thrower, ex-Darkened depuis peu (lire notre chronique de leur dernier album), et désormais DeathCollector), à la basse Frank Healy (ex-Benediction, ex-Sacrilege, ex-Annihilator…), et le génial Scott Fairfax à la guitare (ex-Benediction, et actuel Massacre), bref du beau monde et surtout une somme d’expériences impressionnante. Mais l’atout maître évident est incontestablement la voix du chanteur de l’ex-frontman de Bolt Thrower : Karl Willetts. Ce dernier s’est d’ailleurs beaucoup investi une nouvelle fois sur l’écriture des paroles de ce brûlot death metal old school mais à la production sonore tout à fait contemporaine. D’emblée, passés quelques samples de différentes voix, le premier titre « Never Forget, Never Again (6 million dead) » prend aux tripes, et aborde, non pas les victimes de la récente pandémie de covid-19 à la fin de laquelle l’album a été conçu, mais d’emblée l’Holocauste (ou « Shoah » ) de la Seconde Guerre Mondiale et ses six millions de victimes (juives essentiellement, mais aussi Tziganes, etc.) que l’humanité ne doit jamais oublier… Le ton est lourd et grave, les riffs de guitare de Scott Fairfax font froid dans le dos, couplés aux growls terrifiants du bientôt retraité Willetts (hors de la scène musicale, il est cadre dans une société, sorte de manager.). Vous l’aurez donc compris : on ne plaisante pas trop là, et on est loin d’une parodie d’Ultra Vomit ou d’une chorégraphie à la Baby Metal ! (rires) Après avoir évoqué la dernière guerre, le chanteur à la longue chevelure grise aborde encore la guerre, mais actuelle, aux portes de l’Europe, avec l’invasion russe de l’Ukraine sur « Total War » qui nous rappelle que tout est cyclique, et qu’une menace mondiale sur tous les terrains, y compris les nouvelles technologies, plane aujourd’hui sur nos têtes si l’on continue d’aller droit dans le mur à cause d’un dictateur fou et nostalgique de la Grande Russie, La Blanche Russie (l’actuelle Biélorussie pour faire court), et la Petite Russie (l’actuelle Ukraine). Si le rythme est souvent mid-tempo, Memoriam demeure redoutable, et avec un tel sujet de prédilection, on ne peut que dresser un parallèle avec l’œuvre de Bolt Thrower dont la guerre était le concept même, à l’instar d’un Sodom, tout cela, non pas pour glorifier les temps passés et les massacres, mais pour dénoncer l’idiotie des hommes.

Sur « I Am The Enemy » dont la principale mélodie nous rappelle légèrement mais étrangement dès son intro la chanson de leurs compatriotes Paradise Lost ( « The Enemy » ), les choses se calment un peu, le rythme est plus lent, toujours sur des guitares et une rythmique incroyablement lourde et massive. On baigne-là plutôt dans une mouvance doom/death avec un break central qui débouche sur un refrain réussi. Mais la guerre reprend de plus belle, de manière intérieure sur « The Conflict Is Within » avec la basse de Frank Healy, et un riff de guitare là encore très accrocheur et mélodique. C’est à la fois puissant et mélodique, très bien construit, et Karl Willetts fait trembler les murs, alors que les riffs deviennent plus incisifs. « Annihilations Dawn » démarre sur une multitude de breaks fracassants avant que la machine reparte au combat. Relativement complexe et nerveux par sa structure et technicité, notamment à la batterie, il renvoie un peu à The Silent Vigil qui ne rencontra pas tout le succès escompté en 2018, avant que les albums Requiem For Mankind et To The End remettent les pendules à l’heure et assoient le groupe anglais sur la scène death metal actuelle. « All is Lost » est plus direct mais tout aussi musclé. En live, ce morceau fera un malheur assurément, donnant une folle envie de headbanguer. A la batterie, l’ex-cogneur de Sacrilege (UK), Spikey Smith, tambourine ses toms comme un fossoyeur sur un champ de bataille. Quant à la chanson-titre, « Rise To Power » frôlant les cinq minutes, on s’oriente de nouveau sur un doom/death metal puissant et mélodique, épique même, avant que l’album se conclue avec le superbe « This Pain » et sa guitare acoustique et quelques discrètes percussions rapidement rejointes par un mur massif de guitares saturées, puis la voix plus plaintive mais tout aussi gutturale du charismatique quinquagénaire. Une belle outro pour cesser les hostilités d’un formidable et indispensable album à tout fan de (death) metal qui se respecte. Mais il faut se faire à l’idée que Bolt Thrower n’est plus, et que Memoriam en est le prolongement à la fois artistique et spirituel, même si cela agace parfois ses anciens membres. [Seigneur Fred]

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