ALCATRAZ FESTIVAL : Live report @Courtrai (BE) du 09 au 11/08/2024

En l’espace de quelques années seulement, Alcatraz a considérablement enrichi et étoffé son affiche. À voir la foule impressionnante encore pour cette seizième édition en août dernier, l’organisation semble avoir trouvé la formule gagnante. Mais les groupes et artistes ont-ils vraiment répondu aux attentes ? Après le Graspop plus tôt dans l’été, voici nos principaux coups de cœur du weekend relevés durant cet autre festival de metal belge désormais incontournable. [Texte par Philippe Saintes et Sante Broccolo – Photos : Sante Broccolo]

SAMEDI 10 AOÛT 2024

Finntroll : trop bas dans l’affiche

Sous une chaleur écrasante, les Finlandais de Finntroll débarquent sur la scène principale. Pendant que tout le monde rêve de sieste, eux mettent le feu aux poudres, et les moshpits s’enflamment. Leur musique folk/black metal symphonique crée une ambiance de folie parmi la foule. La formation originaire d’Helsinki, qui déborde d’enthousiasme, aurait mérité une place plus tardive dans le programme.Maintenant à quand un successeur à leur dernier album Vredesvävd (Century Media) remontant déjà à 2020 ?

FINNTROLL

Fleshgod Apocalypse : quand le lyrique s’invite au metal

Les Italiens de Fleshgod Apocalypse, adeptes du death metal symphonique depuis 2007, sont la belle surprise du jour. Avec une chanteuse soprano à la stature royale en la personne de Veronica Bordacchini, et des musiciens investis menés par Francesco Paoli, nos voisins transalpins offrent un spectacle visuel et musical de haute volée. Leur dernier effort en date, Opera (Nuclear Blast), en atteste en studio, et aujourd’hui en live. Septicflesh n’a donc plus le monopole de ce genre musical !

FLESHGOD APOCALYPSE



Marduk : hail Satan !

Avant que Watain et Mayhem ne livrent leurs spectacles ici-même puis également au Wacken dans quelques semaines, Marduk, les seigneurs suédois du black metal depuis 1990 vont nous en mettre plein les oreilles avec treize morceaux tirés de leur impressionnante discographie. C’est une rétrospective digne des enfers, où chaque riff et chaque blast beat semblent avoir été concoctés directement dans le chaudron du Malin. Le public est en transe, et on peut presque entendre Lucifer applaudir depuis les profondeurs des enfers. Une prestation magistrale qui scelle le caractère infernal du festival avec brio ! Côté studio, leur dernier album Memento Mori (Century Media) en date fut d’ailleurs un excellent cru en la matière en 2023. (interview de Morgan Håkansson, et chronique de leur dernier album Memento Mori à retrouver ici)

MARDUK

Lord of the Lost : la tornade gothic

Que l’on aime ou pas leur gothic/glam metal gentillet, les Allemands de Lord of the Lost font un carton ici à Alcatraz, bien plus qu’à l’Eurovision. Leur performance est une tornade d’énergie : le chanteur fait des cabrioles, les guitares rugissent, et le public est complètement conquis. Un set qui sera clôturé en beauté avec « Blood & Glitter », issu de leur album du même nom en 2022 (Napalm Records), alors qu’ils ont sorti un album de reprises depuis.

LORD OF THE LOST

Europe : Une musique qui donne des ailes

Les vétérans suédois d’Europe célèbrent quarante ans de carrière dédiée au hard rock, avec une énergie digne d’un ado sous Red Bull. Pour leur première tête d’affiche dans un grand festival belge, Joey Tempest plaisantera même en s’exclamant avec ironie : « Cela fait quarante ans que nous répétions pour ça ! ». Le résultat ? Vingt mille metalheads de tous âges ravis rassemblés pour une musique universelle, et des cordes vocales en feu.

EUROPE

Satyricon : une apothéose noire

SATYRICON

La journée se clôture avec une explosion de noirceur et de puissance grâce à la légende scandinave, parfois trop rare dans nos contrées : Satyricon. Le combo norvégien de black metal, fidèle à lui-même, fait rugir la scène avec une série de douze brûlots savamment choisis dans son répertoire emblématique. Les guitares déchaînées et la rythmique implacable menée par le terrible Frost (bien occupé par la promotion de son nouvel album studio avec 1349 à retrouver dans notre numéro de sept—déc. 2024) créent une atmosphère aussi intense que le soleil couchant sur Courtrai. C’est une véritable montée en puissance qui transforme le final du festival en un rituel cathartique pour les amateurs de metal sombre et extrême. Avec Satyr et sa horde, la nuit se termine sur une note aussi majestueuse que furieuse, et l’on quitte le site avec l’impression d’avoir assisté à une cérémonie digne des grands rites métalliques. Un moment inoubliable ! (notre dernier entretien avec Satyricon et Frost en 2022 pour leur album avant-gardiste dédié à l’exposition des œuvres de Munch est disponible ici)

DIMANCHE 11 AOÛT

Armored Saint : du heavy toujours aussi costaud

Le troisième jour débute fort avec Armored Saint. Les Californiens livrent un heavy/thrash metal old school encore solide et direct, contrastant avec la soirée précédente. C’est brut, efficace, et le public se montre plutôt enthousiaste devant les deux icônes du thrash que sont le chanteur désormais chauve John Bush, et le bassiste/chanteur Joey Vera (tous deux ex-Anthrax). Même si Bush est bien occupé par sa participation au nouveau super groupe Category 7, quel plaisir de l’entendre de nouveau ici !

ARMORED SAINT

Jinjer : rien de neuf sous le soleil

Tatiana Schmayluk, en habit rouge éclatant (comme quelques jours plus tard en France au Motocultor), fait une entrée remarquée. Jinjer déverse son groove mathcore habituel : c’est efficace, mais pour ceux qui les ont déjà vus plusieurs fois, le show n’a malheureusement pas beaucoup évolué… On reverra les Ukrainiens le 30/10/24 au Zénith de Paris en ouverture des derniers concerts de Sepultura, avant la sortie de leur cinquième album studio dont l’enregistrement est fini. Il succédera bientôt à Wallflowers (Napalm Records) paru en 2022. On peut toujours écouter leur nouvel album Live in Los Angeles pour rester dans l’ambiance…

JINJER

Terrorizer : bon sang ne saurait mentir

La terrible formation américaine de death metal/grindcore Terrorizer fondée par des ex-Morbid Angel et Napalm Death enflamme la tente avec son death/grind old school. Si les années ont passé, cela reste du solide et prometteur pour l’avenir, avec notamment l’arrivée de David Vincent (Vltimas, I Am Morbid, ex-Morbid Angel…) à la guitare basse. Derrière les fûts, l’ex-cogneur de l’Ange Morbide, Pete Sandoval, est lui aussi encore en belle forme malgré son âge avancé. Respect ! Et mention bien au chanteur Brian Werner. On a hâte de les revoir encore et encore, mais d’ici là, un nouvel enregistrement studio serait le bienvenu, Caustic Attack remontant à 2019 (The End Records).

TERRORIZER

Korpiklaani : reprise en main

Korpiklaani surprend agréablement avec une performance inspirée par son dernier album, Rankarumpu (Nuclear Blast) (lire notre chronique ici). Le retour aux sources avec des morceaux plus rapides et moins faciles semble avoir payé pour nos troubadours du nord. Habitué de ce genre de festivités depuis ses débuts, la popularité du groupe finnois est palpable à travers la foule.

KORPIKLAANI

Gene Simmons Band : humour et rock’n’roll

À l’affiche du festival Alcatraz, Gene Simmons a prouvé qu’il n’était pas là pour faire de la figuration. Entre les reprises de Kiss (« I Love It Loud », « Deuce », « War Machine », Charisma », « Cold Gin »,…) un hommage au regretté Lemmy Kilmister (« Ace Of Spades »), une version brute de « House Of Pain » ( Van Halen) et des titres de son propre répertoire comme l’étonnant « Weapons Of Mass Destruction », le jeune septuagénaire Simmons (74 ans au compteur) a régalé la plaine de Courtrai avec sa musique mais aussi quelques vannes à l’attention du public local. Le bassiste a la langue bien pendue (marque de fabrique du personnage de Kiss, faut dire). Il ira même jusqu’à transformer la scène en un speed-dating rock’n’roll, invitant quelques demoiselles à monter le rejoindre. Avec Brian Tichy qui martela sa batterie comme si sa vie en dépendait et Brent Woods envoyant du lourd à la guitare, ce show, à mi-chemin entre concert et stand-up, a été l’un des moments forts de cette seizième édition, sans aucun doute. Du pur rock’n’roll, sans maquillage, de la part du roi… du make-up !

GENE SIMMONS

Opeth : clôture épique

Après un petit retard de vingt minutes dû à des caprices techniques, Opeth entre en scène pour offrir un final aussi grandiose qu’attendu. Maîtres dans l’art de la perfection, ils nous régalent avec un set impeccable et une performance irréprochable, tant sonore que visuelle. Leur interprétation de Deliverance se prolonge, comme une déclaration d’amour au metal progressif. Certes, ce n’est peut-être pas le concert le plus brut du festival, mais c’est sans conteste un chef-d’œuvre d’excellence musicale qui termine le festival sur une note absolument mémorable. Un final qui nous rappelle pourquoi Opeth est une légende vivante dans le monde du metal depuis plusieurs décennies déjà ! À noter que la date de sortie de leur prochain chef d’œuvre studio, intitulé The Last Will & Testament, est repoussée de quelques semaines mais sortira le 10/112024 (Reigning Phoenix Music).

OPETH


=> Et voilà, Alcatraz 2024 est terminé ! Un festival où l’on a vécu plus de moments forts qu’un marathon de série télévisée. Des groupes ont mis le feu, d’autres ont jonglé avec la musique comme des acrobates, et quelques-uns ont même tenté de transformer la scène en soirée karaoké. Malgré quelques coups de soleil et une consommation record de bière, on ressort avec la certitude que l’année prochaine sera encore plus épique. Alors, chers organisateurs, préparez-vous : on revient l’an prochain, avec nos chapeaux de soleil et notre soif de musique insatiable. Alcatraz, tu es notre coup de cœur belge, et on ne pourrait pas t’aimer plus… sauf si tu nous offres plus de t-shirts gratuits et de cervoise l’année prochaine !

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