Pour cette nouvelle édition 2024 du Graspop Festival, Metal Obs avait dépêché à Dessel deux représentants qui se sont partagés les prestations scéniques. Voici leurs avis sur les têtes d’affiche, les incontournables (comme Alice Cooper, Doro, Blind Guardian, Kerry King, Flotsam & Jetsam…), et leurs divers coups de cœur… [Textes par Philippe Saintes et Sante Broccolo – Photos : Sante Broccolo]

Le 20/06/2024
Le premier, ou plutôt la première, artiste à ouvrir les hostilités est menée par l’énergique « Queen of Metal » : Doro Pesch (ex-Warlock). Dès les premières notes, nous sommes embarqués pour une heure de heavy metal teuton pur jus. Ce qui frappe d’emblée, c’est l’énergie de la jeune sexagénaire qui entraîne ses musiciens dans son sillage, offrant un concert entier, bien construit, riche en soli de guitares. Une chose est sûre : les compagnons de scène de la célèbre chanteuse sont heureux d’être là et cela se ressent. Le public adhère totalement à cette ambiance survoltée ! (Au passage, nous ne pouvons que vous recommander le dernier album studio de Doro : Conqueress – Forever Strong and Proud (Nuclear Blast) que nous avions chroniqué l’an dernier ici).


Le second artiste à avoir marqué la journée est incontestablement Kerry King. Changement d’univers, nous plongeons cette fois-ci dans un thrash metal à outrance. Le groupe américain de l’actuel guitariste de Slayer (eh oui, dans le même temps, le groupe californien s’est reformé pour quelques shows avec, bien sûr, Kerry King, mais ce sera à voir ailleurs outre-Atlantique) débarque sur scène comme un ouragan avec son premier album solo (lire notre chronique de From Hell I Rise/Reigning Phoenix Music ici), ses brûlots thrash ne laissant personne indifférents… C’est terriblement soutenu et super bien joué, même si finalement très classique. En écoutant attentivement, on ne peut qu’être impressionné par le jeu de guitare de Kerry King sur sa nouvelle guitare Dean (auparavant, il fut longtemps chez BC Rich). Pendant une heure, l’intensité ne faiblit jamais, pour le plus grand bonheur des fans de Slayer. Les non-afficionados pourront peut-être regretter le manque de variation à la longue, mais les adeptes sont conquis.

Babymetal, la troisième sensation de la journée, soulève plusieurs questions. Doit-on inviter un groupe pareil au plus grand festival de metal belge ? Il est vrai que leur musique est du metal, mais leur esthétique, avec des masques rappelant Slipknot, peut déconcerter. La vraie question est de savoir s’il convient de mettre le trio nippon de de kawaii metal si haut sur l’affiche. Nous restons circonspects bien que le concert mérite d’être vu au moins une fois. Et puis il en faut pour tous les goûts. Soyons clairs : la prestation prête parfois à sourire, mais la connivence et l’harmonie entre la chanteuse et ses deux sœurs choristes valent le détour. Ce n’est peut-être pas du metal traditionnel, mais cela reste un moment rafraichissant et finalement marquant.



La soirée se termine en apothéose avec le boss du hard rock, lui qui a tout inventé en matière de show et d’horreur dès les années 70’s : Alice Cooper. Vincent Furnier nous régalera de ses hits et de ses fameux gadgets, de la guillotine au cobra. C’est la sixième fois qu’Alice Cooper joue ici au Graspop, et cette performance constitue là certainement l’une des meilleures. Tout y est : l’artiste légendaire américain est égal à lui-même, offrant un show spectaculaire d’une heure et demie. Il est magnifiquement accompagné par trois guitaristes, dont la talentueuse Nina Strauss qu’on ne présente plus. Celle-ci enchaîne les soli, chacun plus impressionnant que le précédent. En résumé, cette première journée du Graspop édition 2024 fut belle et prometteuse. Nous sommes partis pour un beau festival, surtout que le soleil s’invite ce week-end en Belgique…




Le 22/06/2024
Pied au plancher avec Rotting Christ !
Alors que nous avons malheureusement manqué le second jour, où tous s’accordent à dire que le concert de Judas Priest fut fabuleux, nous revenons le troisième jour avec une grande excitation. La journée débute avec Rotting Christ, le légendaire groupe de black metal actif sur la scène metal extrême hellenique depuis plus de trente-cinq ans. Sous la tente bondée, le set des Grecs démarre en trombe avec « 666 » et se termine dix morceaux plus tard avec quelques extraits de leur dernier opus Pro Xristou. Néanmoins, près de la moitié de la prestation sera consacrée à l’album Kata ton Daimona Eaytoy. Les guitares lourdes et le ton énergique leur ont assuré un succès non négligeable, fidèle à leur réputation. Ce fut un concert remarquable. (–>> notre interview 2024 de Sakis Tolis est disponible ici).

Uriah Heep enflamme la scène Jupiler !
Ensuite, après une mousse, nous nous dirigeons vers la petite scène Jupiler, où une foule impressionnante accueille Uriah Heep. Quel enthousiasme et quelle énergie de la part de ce vétérans de la scène hard rock britannique fondés en 1967 (enfin d’abord sous le nom de The Stalkers, puis Spice) !! Les musiciens et le chanteur se donnent à fond, prenant un plaisir évident. Les solos de guitare s’enchaînent parfaitement avec les interventions des claviers, et la section rythmique est irréprochable. Le groupe ne se contente pas de jouer des classiques, mais inclut également des morceaux récents, terminant en apothéose avec les hits « July Morning », « Gypsy » et « Easy Livin' ». À la fin de cette prestation cinq étoiles, une question nous taraude : pourquoi ne pas les avoir programmés sur l’une des grandes scènes ?

Limp Bizkit : légèreté et communion
Limp Bizkit, le groupe de nu metal américain de toute une génération, est un autre invité du Graspop qui n’a laissé personne indifférent. Certains peuvent trouver leur musique légère et manquant de nuance, mais les musiciens (dont l’incroyable gratteux déjanté Wes Borland) et le chanteur Fred Durst (ancien tatoueur des gars de Korn à ses débuts), vêtu d’un gilet jaune comme Les Chevaliers du Fiel dans leur sketch des « Municipaux », ont su captiver le public et offrir un bon concert sans se prendre trop au sérieux. Leur set fut agrémenté de reprises intéressantes comme l’incontournable « Faith » de George Michael qui fait toujours un malheur en live, et « Behind Blue Eyes » des Who.


Avenged Sevenfold : Une énergie débordante
Le plat de résistance de la journée s’annonce avec deux groupes aux horizons musicaux différents. Le premier, Avenged Sevenfold (A7X pour les intimes), groupe de heavy metal américain parfois trop rare dans l’Hexagone, qui interprètera douze morceaux dont près de la moitié provient de l’album Life is But a Dream. Les guitares assènent des solos à répétition, le public est enflammé et la scène bouillonne d’énergie.


Abbath : Un final intense
Enfin, un an à peine après avoir son concert au Motocultor l’été dernier 2023, nous assistons au concert de l’artiste norvégien et ex-Immortal : Abbath. Se faufiler dans la tente remplie n’est pas chose facile, mais la récompense est au rendez-vous. Le black metal intense et truffé de solos de guitares résonne à travers l’espace tandis que le groupe scandinave revisite le répertoire de son ancien groupe (toujours mené par son ex-beau-frère Demonaz) avec des morceaux (forcément) comme « Mount North », « Sons of Northern Darkness » et « Mighty Ravendark », plus marquants que ses essais en solitaire. Abbath a eu la bonne idée de s’accompagner d’un guitariste, rendant le son encore plus puissant. Les spectateurs, en effervescence, en redemandent, mais doivent se contenter d’un seul rappel, à leur grand regret. Quelle intensité !


Dans tous les cas, ce samedi fut une journée mémorable, tant sur le plan musical que météorologique. Les décibels ont chassé les nuages, et nous avons pu profiter pleinement de cette édition du Graspop Metal Meeting pour voir des grands mais aussi de jeunes formations en devenir, réunissant toute sorte de générations de fans…

Le 23/06/2024
Extreme : une entrée en matière explosive
Le groupe Extreme a démarré les hostilités à 14h55, un horaire étonnant pour une formation de cette envergure. Cependant, cela n’a pas empêché les Bostoniens de mettre une ambiance survoltée dès le début. Malgré un son moyen, le groupe a prouvé sa maîtrise avec Nuno Bettencourt livrant des solos de guitare époustouflants, notamment sur « Flight Of The Wounded Bumblebee » et « Midnight Express ». Le bassiste Paul Badget a maintenu le groove des débuts. Et puis il y a Gary Cherone, le sémillant chanteur-performant qui reste une véritable bête de scène – bondissant partout et doté d’un organe vocal sans faille. Extrme a privilégié les titres du mythique Pornografitti : « It’s A Monster », « Decadence Dance », « Get The Funk Out », et la célèbre ballade acoustique « More Than Words », chantée en chœur par les spectateurs massés devant la South Stage . Deux titres du dernier opus Six, « Rise » et « Banshee », ont également été interprétés, apportant une dose de folie bienvenue pour débuter l’après-midi caniculaire sur la plaine de Dessel.


Rival Sons : une prestation authentique
Rival Sons, emmené par la voix magique de Jay Buchanan, a une nouvelle fois séduit le public du Graspop. Leur prestation a peut-être moins touché les amateurs de metal extrême, mais elle a ravi les mélomanes. Jay Buchanan, véritable maître à bord, a tout donné sur des titres comme « Nobody Want To Die », « Tied Up », « Too Bad », « Pressure And Time » et le récent « Mirrors ». Si le chanteur a focalisé l’attention, les prouesses de Scott Holiday à la guitare n’ont pas manqué de faire sensation. Une performance authentique et irréprochable des Californiens.


Corey Taylor : un artiste fédérateur
De son vrai nom Corey Todd Taylor, célèbre chanteur de Slipknot et Stone Sour (mais aussi de deux albums solo punk en son nom propre), fut incontestablement l’artiste préféré du public à l’applaudimètre. Le talent du jeune quinquagénaire pour fédérer la foule était évident, avec un répertoire éclectique comprenant des titres entraînants tels que « Black Eyes Blue », « We Are The Rest », « From Can to Can’t », et « Through Glass ». Sa capacité à captiver et à rassembler les fans a été un des moments forts de la journée.

Deep Purple : les papis du hard rock encore en forme !
Les vétérans britanniques ont encore de beau reste et de belles heures devant eux. Deep Purple n’a pas joué la carte de la sécurité en festival. Nous avons eu droit à trois titres (pas très toniques) du prochain album =1 ainsi qu’à quelques surprises dans la setlist (« Hard Lovin’ Man », « Uncommon Man », « Anya »). Les grands standards n’ont pas été oubliés (« Highway Star », « Lazy », « Space Truckin’ », « Smoke On The Water », « Black Night »). Saluons aussi l’hommage au regretté Gary Moore rendu par son pote de Belfast Simon McBride qui met toujours autant d’âme dans ses solos. Glover et Paice assurent les fondations pendant que Airey s’amuse comme un ado derrière ses claviers. Quant à Gillan, il prouve qu’il est encore capable de quelques prouesses vocales. Les cinq compères jouent avec une complicité qui transparaît à l’écoute, transmettant leur bonheur de jouer ensemble à l’auditeur conquis. Un conseil, ne ratez pas leur tournée française cet été.





Scorpions : victoire allemande
C’est un public entièrement conquis à la cause des rockers teutons (alors que la Mannschaft affrontait la Suisse dans son Euro) qui les a portés tout au long du concert, réagissant au doigt et à l’œil sur les classiques que sont « Coming Home », « Bad Boys Running Wild », « The Zoo », « Rock You Like a Hurricane ». Pour l’occasion, Scorpions a joué l’intégralité de l’album Love At First Sting dont c’est le 40è anniversaire. C’est bien connu à la fin, les Allemands gagnent toujours. Scorpions a remporté haut la main la partie avec un show infaillible. Certes, Klaus Meine, le moins fringant, n’est plus le lutin infatigable qui sautillait dans tous les coins mais le reste de la formation n’a eu aucune difficulté à électriser la nuit, ne laissant que des miettes à Machine Head contraint de clôturer le festival après une telle démonstration.



See you next year, Graspop !!!

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