…AND OCEANS : As In Gardens, So In Tombs

As In Gardens, So In Tombs - …AND OCEANS
…AND OCEANS
As In Gardens, So In Tombs
Black metal symphonique
Season of Mist

Nos six Finnois nous avaient gratinés d’un superbe Cosmic World Mother lors de leur sérieux retour aux affaires purement black metal il y a trois ans. En effet, après leurs digressions électro expérimentales suivies d’un hiatus discographique d’une dizaine d’années (certains des membres évoluèrent alors sous le nom du projet Havoc Unit afin de scinder leur musique clairement avec …And Oceans), quel ne fut pas notre bonheur de savourer de nouveau leur furie couplée à leurs traditionnelles envolées symphoniques épiques, mélange qui fit la renommée du combo de Vaasa à l’aube des années 2000 sur le label Season of Mist. Retour confortable au bercail donc puisque comme Cosmic World Mother ou The Dynamic Gallery of Thoughts en 1998, à présent As In Gardens, So In Tombs sort aussi sur le label français de leurs débuts. Cependant …And Oceans avait placé la barre très haut en 2020, alors comment réussir à renouveler un tel exploit, surtout à l’heure où le black symphonique s’épuise quelque peu, et n’est plus vraiment la mode auprès des metalheads ?

À l’écoute de ce sixième opus, on se rend compte qu’encore une fois, nos amis finlandais s’avèrent terriblement aussi inspiré, et ce malgré les années. Il y a toujours chez cette ADN black metal scandinave, signe de qualité. Mais …And Oceans, c’est bien plus que ça car l’aspect mélodique par les claviers revêt une grande importance dans leur musique. Passée une courte intro sombre, c’est sur la chanson-titre que s’ouvre l’album à cent à l’heure, ou plutôt 300 bpm. Les riffs sont d’une vélocité et doublés de nappes de claviers grandiloquents mais savamment dosés, de telles sorte que les guitares restent tout de même suffisamment assez agressives alors que les cris du chanteur Mathias Lillmåns vous glacent le sang et vous dresser les poils. Un petit break avec d’abord des ambiances aux claviers puis des réminiscences électroniques marque une courte pause, puis c’est reparti de plus belle. Un magnifique premier jet sonore qui nous donne envie de nous plonger corps et âmes dans ce nouvel opus composé de dix morceaux généreux au total. Sur « The Collector and His Construct », le batteur se fait plaisir à l’entame de ce second titre, puis cela s’inscrit dans la veine du premier titre. C’est terriblement agressif mais paradoxalement très mélodieux, grâce notamment à ces toujours superbes claviers. La production sonore parfaite (le mixage ainsi que le mastering ont été confiés à Tore Stjerna au Necromorbus Studio (Mayhem, Watain, Merrimack, etc.)) contribue grandement à l’appréciation du savoir-faire du combo finlandais ici en matière de black symphonique de grande classe, sans pour autant sonner mainstream ou trop sophistiqué comme le furent les derniers oeuvres de Bal-Sagoth par exemple. On est très proche de la perfection d’un Puritanical Euphoric Misanthropia de Dimmu Borgir, contemporain d’ailleurs à …And Oceans dès 1995, mais cela avec un style très personnel et affirmé néanmoins chez nos musiciens du Pays des Mille Lacs.

Très souvent sur As In Gardens, So In Tombs, on pense naturellement à Finntroll et son black/death symphonique, devenu avec le temps moins typiquement folk dorénavant. Normal, car depuis 2019, on retrouve justement ici Mathias Lillmåns. Leur chanteur commun officie en effet à la fois dans Finntroll et …And Oceans. Pour rappel, il a remplacé Kena Strömsholm, lui que l’on surnommait tantôt parfois « Killstar » ou « K-2T4-S » ou bien tout simplement Kenny (mon Dieu, on a encore tué Kenny ! (rires)) dans le passé. Sur « Within Fire And Crystal », le break central fait résonner la grosse caisse et les toms sur la batterie de Kauko Kuusisalo qui sonne bougrement heavy à faire trembler les arbres des forêts finlandaises. Arrivé en 2018, celui-ci accomplit un travail remarquable de technicité, d’intencité, et de propreté sur ses parties qui ont toujours boosté les compositions d’…And Oceans. Et sur « Cloud Heads », on pourrait trouver une certaine ressemblance avec les dernières galettes de leurs compatriotes justement, que ce soit par le rythme ou bien les claviers, notamment sur le break, il y a un côté presque dansant et magique.

Chaque chanson est un trésor en fin de compte (« Wine Into Water » et son riffing aérien à la Wintersun suivi de passages très heavy, divers passages futuristes mais toujours de bon goût et subtilement intégrés, la fin de l’album devenant de plus en plus épique s’achevant comme sur « Ambivalent God »…), même si peut-être une certaine redondance pourra naître auparavant au milieu de l’album. Heureusement le bon calibrage des durées des chansons et un excellent track-listing gomment tout cela. En plus, deux chansons bonus figurent en fin d’album : « Samlarens Valv », et « Third Eye Catalyst ». Globalement As In Gardens, So In Tombs est donc un excellent cru de black metal symphonique en ce début d’année 2023, comparable à leurs premiers chefs d’œuvre d’antan ou leur avant-dernier effort, même s’il n’en possède peut-être pas toutefois la prime fraîcheur. Pour autant, il y a toujours un riff intéressant ici ou là, un break salvateur et surprenant, des passages mélodiques délicieux aux claviers ou des growls féroces (peu ou prou de chants clairs ici) qui vous surprennent et interpellent tous vos sens à un moment donné. Les fans des Finlandais apprécieront, quant aux néophytes, c’est le moment idéal pour plonger dans les abysses d’…And Oceans et découvrir toutes les qualités de leur black sympho. Chapeau bas au passage au Français Adrien Bousson pour sa magnifique pochette. [Seigneur Fred]

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