EVIL INVADERS : La fureur du riff

Si Feed Me Violence avait rassasié l’appétit musical des fans de pur speed/thrash metal, nous guettions le retour d’Evil Invaders car cela remontait à 2017. Entre-temps, après diverses tournées un peu partout dans le monde (dont un passage français remarqué au festival Motocultor qui nous avait scotchés) et une pandémie après, l’heure était venue à nos amis belges de retourner en studio. Et ces deux dernières années ont été plutôt propices à la création et la finition de leur troisième effort, le superbe et mature Shattering Reflection. Un mal pour un bien dirons certains finalement… Allez, trêve de blablas et place au roi des riffs et des soli avec l’un de ses guitaristes, le jeune Allemand Max, qui aurait bien aimé vivre durant les années 80’s comme beaucoup de fans de metal… [Entretien réalisé avec Max « Mayhem » Maxheim (guitare) par Seigneur Fred – Photos : DR]

Comment te sens-tu, après deux d’absence de concerts pour la majorité des groupes à cause de cette pandémie de covid-19 qui perdure plus ou moins, et à la veille, peut-être, d’une putain de troisième guerre mondiale en plus ?! Êtes-vous anxieux et inquiets, ou excités et impatients de repartir en tournée avec Evil Invaders pour donner des concerts (en salle ou en extérieur) cette année un peu partout dans le monde ?
Je vais bien jusqu’à présent, merci d’avoir demandé ! C’est bizarre qu’après deux ans de pandémie, il y ait quelque chose de nouveau qui foute en l’air le monde entier, du moins l’Europe de l’est pour le moment… Mais j’essaie de ne pas trop y penser et de continuer ma vie quotidienne comme d’habitude afin d’avancer. De plus, bien sûr, je suis super content que les concerts soient à nouveau possibles et que je puisse enfin refaire ce que j’aime. Si la planète n’explose pas d’ici-là en mille morceaux, nous avons pas mal de concerts sympas à venir à donner avec Evil Invaders, donc je suis vraiment très excité actuellement.

Avez-vous utilisé votre temps libre et profité de cette drôle de période pour composer, écrire et créer ce nouveau disque Shattering Reflection, ou bien depuis l’album Feed Me Violence, la plupart des nouveaux morceaux (riffs, soli, sujets de paroles…) étaient déjà prêts et composés et vous avez plutôt pris votre temps pour vous détendre et y apporter tranquillement la touche finale ?
Nous avons assurément utilisé le temps à bon escient, je dirais ! La plupart des chansons étaient déjà composées avant que la pandémie ne frappe, mais bien sûr, ce n’étaient que les ébauches, c’est-à-dire premières versions de la façon dont les chansons se sont finalement révélées. C’était bien que nous ayons eu la chance de vraiment travailler sur les chansons et de nous concentrer sur beaucoup de détails qui ont finalement contribué à rendre meilleur encore ces chansons. Heureusement, nous vivons à une époque moderne où nous n’avons pas nécessairement besoin d’être dans la même pièce physiquement pour travailler sur notre musique, ha ha ! (rires)

Parle-moi de la pochette de Shattering Reflection ! On dirait que le monstre d’Evil Invaders s’est échappé… A quoi fait référence son titre ? A-t-il été inspiré par la crise humaine, sociale et sanitaire que nous avons vécue ? Est-ce une réflexion métaphorique sur l’espèce humaine et son destin sur cette terre après ce virus mutant sorti des labos (ou d’un pangolin ou d’une chauve-souris) ?
Disons que Shattering Reflection est plus lié aux souvenirs d’expériences traumatisantes vécues par quelqu’un. L’œuvre est basée sur deux axes. Il y a quelques années, j’ai eu l’idée que ce serait plutôt cool si notre sorte de mascotte s’écrasait dans un miroir comme une boule de démolition (un peu comme la couverture de Power of the Night de Savatage en 1998) et dans ces éclats brisés qui volent loin, on pouvait apercevoir des images du contenu qui était chanté dans les paroles, comme dans un reflet. Joe avait aussi cette autre idée en tête d’une ancienne usine… Comme si l’on se tenait devant cette immense vieille porte métallique qui est entrouverte, suffisamment du moins pour avoir un aperçu de l’intérieur. L’intérieur lui-même afficherait alors une sorte d’usine de douleur, où tout le mal prend sa forme avant de se déchaîner dans le monde une fois sorti. Comme nous ne pouvions pas vraiment décider laquelle idée était la plus cool, on a alors décidé simplement de mettre les deux idées ensemble et le résultat est l’illustration ici présente.

La première chanson du nouvel album, « Hissing in crescendo », est un pur chef-d’œuvre, très heavy, en guise d’introduction, avec beaucoup de bends à la guitare dans le riff principal, des chœurs puissants, et un lead final de toi à la guitare, je présume. Peux-tu dire plus sur cette longue chanson et qui tue vraiment et fera mal probablement auprès des metalheads dans la fosse très bientôt lors de vos concerts ? Comment est né ce morceau et de quoi parle-t-il dans les paroles ?
J’avais trouvé à l’origine une version différente du riff d’intro, un soir chez moi. L’idée est venue de nulle part alors j’ai commencé à jouer avec et j’ai juste enregistré une courte démo avec quelques riffs les uns après les autres. Je l’ai envoyée à Joe et il a vraiment creusé l’idée de base qu’il y avait derrière, et à partir de là, nous avons commencé à expérimenter avec ce que nous avions. J’ai livré des riffs et nous l’avons travaillé pas à pas. Là où ce fut plus difficile et où nous avons vraiment butté, c’est de trouver un refrain pour cette chanson. Nous avons essayé mille choses mais nous n’avons pas pu y arriver, mais heureusement, nous avons finalement réussi avec l’aide de Francesco Paoli (qui a travaillé comme producteur pour ce disque). On était vraiment coincé dans cette boucle d’ajout de nouveaux riffs et de suppression d’anciens riffs, puis nous nous retrouvions avec le même qu’avant, etc. mais il a une nouvelle vision des choses. Alors il a proposé d’utiliser le premier riff comme un refrain et ça a juste marché à la perfection. Ce que j’aime vraiment dans la chanson, c’est la section principale, après le deuxième refrain. Ça montre un peu mes influences plus « extrêmes » comme Dissection ou Vital Remains. Ce n’est pas un truc « typique » d’Evil Invaders, je dois dire, mais je pense que ça colle très bien à la chanson et crée une ambiance vraiment heavy, mais épique.

Votre premier single extrait de Shattering Reflection s’intitule « Sledgehammer Justice ». Y’a-t-il ici un quelconque clin d’œil ou un rapport avec le célèbre tube de Peter Gabriel « Sledgehammer » peut-être ? (rires)
Ha ha ha ! (rires) Je suis un grand fan du travail de Peter Gabriel, mais la chanson n’est pas liée à la sienne. (rires) Le riff de refrain est né il y a quelques années et, d’une manière ou d’une autre, le titre est venu directement avec. J’écoutais beaucoup Exciter à l’époque, et leur chanson « Feel the Knife » m’emballe toujours, donc je me suis dit avec Joe : « Mec, on a besoin de quelque chose de cool comme ça ! ». (rires) Alors j’ai joué avec ça pendant un moment en travaillant dessus, et puis le titre de chanson « Sledgehammer Justice » m’est venu à l’esprit, d’un seul coup. Je me suis dit alors : « Yes !!! On l’a ». (rires)

Comment avez-vous travaillé le chant, et aussi vos parties de guitare cette fois-ci toi et Joe ? Je trouve Shattering Reflection vraiment fort sur ces deux aspects. C’est varié, heavy et mature. Ce n’est pas tout le temps un tempo speed, et un grand soin a été apporté aux mélodies, notamment les lignes vocales. As-tu essayé ici d’expérimenter de nouvelles choses, du nouveau matériel de guitares, de micros, d’effets, d’amplis, et peut-être aussi Joe pour sa voix qui est encore en un cran au-dessus de Feed Me Violence ? Sur le slow et single « In Deepest Black », j’ai même été surpris la première fois. Il y a une certaine dramaturgie avec d’énormes influences heavy metal des années 80. Enfin comme d’habitude, tu vas me dire… ? (sourires)
Nous n’avons pas beaucoup expérimenté tant que ça niveau matériel en fait mais on a plus travaillé sur les arrangements de nos chansons. Il y avait plus de place pour toutes nos différentes influences. L’album n’est certainement pas aussi simple que ses prédécesseurs mais, c’est ce que nous voulions. Pour sortir un peu plus des sentiers battus et voir comment nous pouvons faire passer notre musique à un stade supérieur sans être collé à un genre en particulier. C’est pourquoi il y avait aussi de la place pour une chanson plus typée ballade comme celle-ci. J’ai apporté une version de démonstration un jour et Joe était du genre curieux, et a dit un truc comme « OK, voyons où ça va ». Après avoir entendu les premiers essais, j’ai été vraiment impressionné, lui aussi. En fait, ça sonnait bien, alors nous avons décidé de travailler la chanson et de lui donner une chance. La chanson en a choqué plus d’un fan à sa sortie quand elle est sortie, je pense ! (rires)

J’ai également été surpris en écoutant la chanson « My World ». Quel est le mec qui chante exactement sur ce titre ? Y a-t-il des invités ici et là sur le nouvel album peut-être ? Même chose pour le dernier morceau épique qui est fantastique : « The Circle ». Dis-nous tout sur ces deux titres, s’il-te-plaît !
En fait, le mec qui chante « My World », c’est moi !!! (rires) J’ai écrit la chanson un jour par simple plaisir et je l’ai montrée aux gars. Ils ont aimé ça, donc à la fin ça s’est retrouvé sur l’album avec moi au chant. Je n’aurais jamais pensé que je finirais par chanter une telle chanson sur l’un de nos albums d’Evil Invaders. (rires) Tu sais, nous avions l’habitude de reprendre « Witching Hour » de Venom, avec moi au chant mais avoir une vraie chanson que je chante, à nous, ça je ne m’y attendais pas vraiment ! (rires) Quant à « The Circle », ce fut une chanson assez difficile à travailler. Joe l’a inventé de toute pièce, mais au début, nous étions tous très sceptiques à son sujet. L’idée principale était cool et les riffs étaient tous cools aussi en eux-mêmes, mais l’arrangement n’apportait pas encore le frisson que l’on espérait. On a essayé tellement longtemps diverses choses avant d’arriver à la structure finale, mais à présent, la chanson botte vraiment le cul ! (rires) Il y a ce genre d’ambiance vraiment diabolique et occulte et j’adore vraiment ça. C’est terriblement heavy. D’ailleurs, c’est définitivement l’un de mes préférés de l’album.

Les principales influences d’Evil Invaders et plus particulièrement sur Shattering Reflection proviennent clairement des styles musicaux que nous adorons tous : le heavy, le speed et le thrash metal des années 1980. Pourquoi avez-vous cette fascination de cette décennie passée que vous n’avez pas connue et vécue personnellement car toi, ou Joe (Johannes Van Audenhove) et les autres gars étiez tous trop jeunes ?! Que représente cette période à vos yeux, personnellement et bien sûr musicalement ?
Je ne dirais pas que nous sommes fascinés par les années 80, il y a tellement de nouveaux groupes qui font de la musique incroyable de nos jours, mais je suppose que les années 80 ont le plus grand impact et influence sur nous. C’est l’origine de la musique que nous faisons, et tous ces groupes comme Judas Priest et Motörhead ont sorti à l’époque des albums qui tuent. Je ne sais pas vraiment comment le décrire en fait, mais il y a juste quelque chose de fascinant à propos de cette époque et de la musique qui était là. Peu de groupes parviennent à capter cette ambiance et cette magie. Le son était également différent. J’ai l’impression que les disques sonnaient plus diversifiés dans la production à l’époque par rapport à aujourd’hui où c’est plus aseptisé. Il y avait simplement quelque chose de spécial en tout cas ! (rires)

Tu sais, la première fois que j’ai vu Evil Invaders en concert, je me souviens avoir été époustouflé par votre énergie live sur scène. D’où vient selon toi cette incroyable énergie dégagée sur scène et jusqu’à quand pourrais-tu t’imaginer jouer en live et donner des shows ? Comme Lemmy Kilmister de Motörhead, ou tu penses arrêter plus tôt comme Slayer quand ils étaient encore, après l’apogée de leur carrière, au bon moment ? En un mot : serais-tu prêt à jouer live jusqu’à la mort sur scène ?
L’énergie vient naturellement avec la musique. Dès que l’on commence à jouer l’intro sur scène, l’adrénaline commence à monter, l’interrupteur dans la tête s’éteint, puis c’est à pleine puissance. Je me demande pendant combien de temps nous pourrons encore faire cela car nous ne rajeunissons pas ! (rires) (NDLR : Max Maxheim n’a que vingt-huit ans cependant) Mais je pense que nous continuerons à jouer jusqu’à ce que nous n’en puissions plus. Regarde les Scorpions ! Ils sont sur le Farewell Tour depuis 2006. Ils reviennent encore avec un nouvel album studio et repartent en concert. Quelque chose me dit qu’on va faire pareil ! (rires) Jusqu’à ce que nous tombions tous morts sur scène…



Bon, en attendant d’ici là, que veux-tu ajouter à propos de ce troisième album studio Shattering Reflection, et quels sont les projets d’Evil Invaders pour le futur et surtout en 2022 car nous voulons vite vous revoir en live avant la fin du monde et une troisième guerre mondiale sur terre… ? (sourires)
Nous avons un tas de festivals programmés pour l’été et de plus en plus d’offres de concerts arrivent, donc vous nous verrez certainement bientôt en France ! Il y a aussi une tournée pour l’année prochaine en préparation mais ouais, plus tôt nous pourrons nous remettre en route pour cet album, mieux ce sera, et s’ils foutent cette planète en l’air, alors on ira jouer des concerts sur la lune ! J’ai toujours rêvé de faire ça ! (rires)

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