MINISTRY : HOPIUMFORTHEMASSES

Hopiumforthemasses - MINISTRY
MINISTRY
Hopiumforthemasses
Indus metal
Nuclear Blast

Alors que Moral Hygiene, précédent album de Ministry publié il y a trois ans, fut ironiquement entaché en termes de promotion (on attend toujours une nouvelle interview depuis 2018 avec Monsieur Al Jourgensen…) par ce satané covid-19 dont il s’inspirait à l’image d’une pandémie capitaliste, son infatigable et vétéran leader repointe déjà le bout de son nez, après bien des problèmes de santé (antérieurs au covid-19). Et il se montre dans une grande forme olympique ! En effet, outre une santé de fer retrouvée en 2018 après avoir frôlé la mort, Al Jourgensen semble renaître artistiquement parlant ces derniers années depuis son ranch d’El Paso au Texas. Accompagné d’un sacré line-up, cela le porte artistiquement et il a clairement retrouvé l’inspiration. Au côté du chanteur, on retrouve en effet pas moins que John Bechdel (ex-Fear Factory, Prong, Killing Joke, etc.), Roy Mayorga (ex-Soulfly, HellYeah, Stone Sour…) à la batterie acoustique ; l’ex-gratteux de Madona et Prong, auteur d’excellents albums solo, Monte Pittman ; le puissant Cesar Soto (ex-Pissing Razors et The Sixth), et Paul D’Amour (ex-Tool) à la basse. Bon, les présentations de rigueur étant faites, que vaut ce seizième album studio de Ministry ? Eh bien, déjà il s’avère plus un peu plus musclé et solide que Moral Hygiene ou AmeriKKKant qui avaient du mal à tenir sur la longueur. Et il faut dire qu’au vu de l’actualité mondiale brûlante (guerres, affaires Trump, inégalités des richesses, inflation, etc.), il y a de quoi inspirer le père Jourgensen…

A commencer par le système patriarcal et la misogynie ambiante qui en prennent pour leur grade sur « B.D.E. » (= »Big Dick Energy »). Il faut dire que depuis les mouvements « #Metoo », « balance to porc » et autres dénonciations de harcèlement ou récentes tentatives de viol d’actrices françaises ou simples attachées de presse victimes de stars du petit ou grand écran ou de radio., il y a de quoi faire, y compris dans le rock business qu’a bien connu depuis les années 80 notre sexagénaire Al Jourgensen. Puis « Goddamn White Trash » ou « Aryan Embarassment » mettent en exergue le racisme toujours présent au Pays de l’Oncle Sam, mais pas que, chez lui, Al Jourgensen étant bien au fait de la montée de l’extrême droite en Europe ces dernières années, et notamment en France. Il nous en avait ouvertement parlé alors en 2018 pour la promo de l’album AmeriKKKant, et citant Mme Le Pen… Musicalement, la recette du Ministère du metal industriel fondé en 1981 évolua beaucoup à travers diverses expériences plus ou moins concluantes, avant d’être parfaitement rodée à partir des brûlots que furent « So What », « N.W.O. », « Psalm 69 » et « Just One Fix » : une batterie répétitive, des paroles narrées et provocatrices, des riffs de guitare nerveux et des gimmicks entre punk rock, thrash metal, indus,/électro, et cette voix reconnaissable qui dénonce les maux de nos temps.

La recherche de l’or noir et la fin des énergies fossiles obsèdent encore aujourd’hui, et plus que jamais, Al Jourgensen sur le très bon « Just Stop Oil » qui en quatre minutes résume notre obsession et dépendance pour le pétrole…

Entre politique et religion, il n’y a qu’un pas, et au milieu de l’album, sur « New Religion », le ton est donné : bien heavy, entre rock garage énervé, et thrash industriel. On retrouve là le grand Ministry, en toutefois plus mélodieux notamment dans les chœurs du collectif en pleine forme donc sur Hopiumforthemasses qui résume bien le propos ici et la cible des Américains. Si parfois, les choses mettent un peu de temps à démarrer, comme sur « It’s not pretty », on retrouve ces expérimentations et autres divagations qui firent les atouts des albums et c’est ce que l’on apprécie chez Ministry : passer de choses bien dénonciatrices et trashy, à des morceaux plus ambiants et dansants (« Cult Of Suffering »). Leurs homologues français de Treponem Pal s’en sont d’ailleurs souvent inspirés.

La fin de l’album sonne plus légère avec « Ricky’s Hand » qui, malgré son faux-air de parodie des Inconnus (« Isabelle a les yeux bleus ») rappelle les premières heures d’un jeune Ministry dans les années 80, alors orienté rock new wave. Mais il y a peut-être ici un message subliminal de la part du malin Al Jourgensen. Pour ça, on lui demandera en face-à-face dès que l’on aura l’occasion de le revoir en France… [Seigneur Fred]

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