ETERNAL EVIL : Metal lords

Il faut bien avouer que de nos jours, la Suède n’est plus autant la poule aux œufs d’or en matière de metal comme autrefois dans les années 80/90 où chaque mois arrivaient des hordes de nouveaux groupes toujours plus compétitifs, et inventifs. C’est malheureusement le constat que l’on fait régulièrement quand on dissèque les nombreuses nouveautés musicales. Excepté les ténors du genre qui s’accrochent à leur couronne, rares sont les jeunes formations scandinaves à nous estomaquer aujourd’hui. Mais il y a toujours une exception à a règle. En ce mois de novembre 2023, cette exception se nomme Eternal Evil. Ce sont des p’tits gars qui n’en veulent, comme vous allez pouvoir le constater. Et nous vous recommandons chaudement leur deuxième galette, The Gates Beyond Mortality, pour cet hiver. [Entretien intégral avec Adrian Tobar Hernandez (guitare/chant) par Seigneur Fred – Photos : DR]

Eh bien, comment le groupe a-t-il été fondé exactement à Stockholm en 2019 ? Est-ce une histoire classique entre amis à l’école, peut-être, ou par rencontre virtuelle suite à des échanges sur les réseaux sociaux pour lancer un nouveau groupe de metal en Suède ?
Eh bien, c’est une longue histoire, alors commençons par le début. Tout a commencé vers janvier/février 2019 lorsque mon ami de longue date, Jacob Livåg (ancien fondateur d’Eternal Evil), a commencé à jouer avec ce type nommé Teddy et ils envisageaient de créer un groupe de thrash metal. Jacob et moi étions dans la même classe tout au long de l’école. Donc pendant un cours, il m’a demandé si j’étais intéressé à jouer avec eux car ils avaient besoin d’un guitariste principal et d’un chanteur, à ce moment-là j’ai tout de suite dit oui car j’étais déjà très fatigué de mon ex-groupe Three Dead Fingers. Je suis donc allé à l’une des répétitions et on a fait quelques reprises, l’une d’elles était « Deathrider » d’Anthrax et je pense que l’autre était une chanson de Judas Priest, si je ne me trompe pas, probablement « Electric Eye ». À cette époque, ils avaient un batteur nommé Alvin qui n’était pas du tout metal, c’était juste un fan d’indie pop qui jouait de la batterie, alors j’ai convaincu Jacob et Teddy de le virer car je voulais quelque chose de sérieux et pas seulement un groupe de maternelle. Ce départ n’a pas du tout affecté le groupe puisque Jacob et moi avions commencé à sortir à ce moment-là avec le batteur Alphonse Bouquelon, et nous lui avons demandé s’il voulait nous rejoindre, et donc il a intégré le groupe très rapidement. Là, le premier line-up officiel se composait de moi-même (Adrian Tobar) aux guitares et au chant, Jacob Livåg à la basse, Teddy Edoff à la guitare solo et Alphonse Bouquelon à la batterie. Cette formation a duré environ trois mois, si je ne me trompe pas. Après un certain temps, les tensions sont devenues croissantes entre Teddy et le reste du groupe, alors nous avons tous les deux décidé de nous séparer. Et puis on a donc continué en trio pendant un an et pendant ce temps nous avons commencé à jouer pour notre première démo Rise Of Death. Après avoir donné quelques concerts d’octobre 2019 à février 2020, la pandémie a frappé comme une putain de bombe, alors maintenant on s’est retrouvé coincés dans le garage à jouer. Ensuite, on a décidé que nous devions agrandir Eternal Evil. Alors nous sommes allés à la recherche d’un guitariste soliste. C’est à ce moment-là que le guitariste Tobias Lindström nous a contactés alors qu’il déménageait du nord de la Suède jusqu’à Stockholm. Une répétition s’est organisée avec lui et tout s’est bien passé pour lui dès la première note qu’il a jouée. Et ce line-up avec moi aux guitares et au chant, Jacob Livåg à la basse, Tobias Lindström aux guitares solo et Alphonse Bouquelon à la batterie s’est poursuivi jusqu’en janvier de cette année, où là le line-up a encore changé…

Votre première démo était un EP. Elle est sortie la même année en 2019, sur K7 uniquement. Et ça a été enregistré dans ton garage, Adrian, il me semble. Mais pourquoi cette stratégie ? On n’est plus dans les années 1980 et on peut faire ça tranquillement sur un ordinateur doté de logiciels spécialisés tout à fait abordables de nos jours. Tu as souhaité garder l’esprit des années 80 dans ta démarche artistique d’une certaine manière ? (sourires)
Tu sais, nous avions quinze ans à l’époque, et nous n’avions évidemment pas les moyens d’enregistrer dans un studio entièrement équipé. J’avais déjà une machine Zoom R24. Et en plus, on a alors acheté des micros vraiment merdiques avec lesquels nous avons enregistré la démo. Ensuite, nous l’avons mixé dans une copie piratée avec Adobe Audition. On voulait un vrai son avec de vraies batteries et guitares, nous l’avons donc gardé aussi analogique que possible. Voilà.

Au sein du groupe, quelles sont les principales influences musicales qui définissent le son d’Eternal Evil ? À la première écoute, je dirai comme ça pêle-mêle : Venom, les vieux Metallica, Sodom, Destruction, Bathory (période thrash/black), Dark Angel, Bewitched…
Eh bien, ce sont les premières influences que nous avons eues, en effet, lorsque nous nous sommes lancés en 2019. Maintenant, nous faisons notre propre truc, disons. Alors bien sûr, nous sommes influencés par d’autres groupes, mais on pense rarement à d’autres groupes lorsque nous écrivons et composons notre propre musique de nos jours.

Vous venez donc de sortir votre deuxième album studio complet intitulé The Gates Beyond Mortality, deux ans après votre premier album studio The Warriors Awakening… Brings the Unholy Slaughter !. Pour un deuxième album, c’est très fort et déjà mature, alors que vous êtes encore un très jeune groupe. Comment avez-vous abordé ce nouvel album par rapport à votre démo au premier, The Warriors (…), afin de créer et enregistrer ces neuf nouveaux morceaux qui tuent littéralement ?
C’est toute une histoire, en fait. Notre dernière formation a été dissoute quelques jours seulement avant de commencer à écrire le nouvel album. Alors puisque j’étais le seul auteur-compositeur principal restant du groupe originel, j’ai pris sur moi d’écrire presque tout sur cet album. Puis, à mi-chemin de l’écriture, Niklas et Adam ont rejoint Eternal Evil, et ont commencé à intégrer leurs idées à mes côtés.

À cause de la pandémie de Covid-19, avez-vous trouvé plus de temps libre pour répéter, pratiquer vos instruments et travailler sur les nouvelles chansons de The Gates Beyond Mortality ce qui correspondit en quelque sorte à un bon timing pour Eternal Evil ? Car c’était une bonne opportunité pour vous de composer et de prendre le temps de créer sereinement ce second disque finalement ?
Non. L’écriture de The Gates Beyond Mortality a commencé en janvier de cette année 2023, la pandémie était donc déjà terminée à ce moment-là.

Ce qui est intéressant dans votre musique, c’est que vous accordez beaucoup d’attention aux chansons elles-mêmes : dans leur introduction, dans leurs mélodies, couplets/refrains, chants, etc. Et c’est encore une fois une marque de fabrique des années 80. Les chansons de groupes célèbres de cette période faste comme Slayer, Metallica, Motörhead, Judas Priest, etc., on pouvait facilement retenir les mélodies des chansons, par exemple les riffs principaux, les chanter, alors que de nos jours, chez la majorité des nouveaux groupes de metal d’aujourd’hui, c’est tellement technique, brutal, ou tellement basique que l’on retient pas grand-chose, et on a tendance à se focaliser sur le look, ou tout ce qui gravite autour des groupes, mais pas forcément leur musique elle-même. Est-ce que c’est quelque chose auquel tu es sensible et dont tu as pris soin lors du travail de composition et d’écriture de ces nouvelles chansons ?
Oui, c’est exactement ce que nous faisons, nous n’essayons pas de recréer quoi que ce soit des années 80. C’était bien mais c’est une époque révolue depuis longtemps et elle doit rester dans le passé, nous vivons dans une époque nouvelle. Mais les métalleux ont oublié ce qu’est la bonne musique, il y a trop de merde de nos jours quand il s’agit de metal, et n’ont qu’une vision superficielle alors que ce style est si riche et multiple. Et puis, les gens sont en état de mort cérébrale quand il s’agit d’écrire des chansons dans le metal aujourd’hui, aucun sens de la mélodie ni aucun goût dans les riffs. Trop de personnes sans talent ont accès au monde de la musique de nos jours grâce à internet pour proposer des choses souvent sans intérêt.

En 2023, deux nouveaux membres ont rejoint les rangs d’Eternal Evil : Niklas Saari (basse) et Adam Schmidt (batterie). Qu’ont-ils apporté au groupe selon toi étant donné qu’ils ont été impliqués dans le processus de création musicale et d’enregistrement du second album ?
Eh bien, ils n’ont pas beaucoup contribué à la composition ou à l’écriture puisque j’ai presque tout écrit sur cet album à cause des changements de line-up comme expliqué précédemment. Mais toujours en considérant ce fait, ils ont beaucoup contribué quand même au groupe, non seulement musicalement mais aussi par leur attitude et tout ce qui tourne autour du groupe. Niklas et Adam sont de vrais membres d’Eternal Evil. D’ailleurs, le groupe n’a pas eu meilleure attitude qu’aujourd’hui. (sourires)

De quoi traitent tes paroles au juste dans ce nouvel album ? Veux-tu garder vivante la flamme du heavy/speed/thrash/black metal et écrire et chanter sur les mêmes sujets que par le passé, ou souhaites-tu développer ton propre style, tes propres thèmes car j’ai l’impression que vous restez autour des clichés du genre quand même ? (rires)
Les paroles parlent beaucoup de Satan et du culte du Diable, comme toujours, oui, mais c’est une chose qui changera certainement à l’avenir… Nous quatre, à présent, avons pour objectif de créer notre propre style de metal et de dévorer ce monde avec. (sourires)

Quelques mots maintenant sur la neuvième chanson intitulée « Immolation » que j’aime beaucoup et qui est très speed ! Y’a-t-il une quelconque référence ou un clin d’œil au groupe de death metal américain Immolation peut-être ici ?
Ha ha ! (rires) Non. La réponse est bien plus simple que ça. « Immolation » est en fait une chanson qui a été écrite pour notre premier album mais nous ne l’avons jamais enregistrée car on ne l’aimait plus. A l’origine elle s’appelait « Necrocution », mais ce titre était tellement stupide alors nous l’avons changé en « Immolation » qui correspondait beaucoup mieux maintenant.

Eternal Evil vient de Stockholm et joue donc un heavy/thrash/black metal classique si on peut résumer. Alors, est-ce difficile ou facile de lancer un groupe de metal comme Eternal Evil aujourd’hui quand on  vient de Suède où il y a tant de concurrence finalement ? Ressens-tu une sorte de compétition ? Ça doit être dur parce qu’il y a déjà tellement de challengers et de groupes sur la scène metal suédoise ?
Eh bien, cela dépend de la scène à laquelle un groupe, un artiste, est associé. Quand nous avons commencé, un peu avant 2019, oui, c’était dur, il n’y avait pas de « scène » dans laquelle jouer, alors nous avons construit la nôtre, et cela seul a déclenché une petite vague de revival thrash/black mais aussi death maintenant à Stockholm avec des groupes comme Atonement, Disarray et Xorsist, etc.

En guise de conclusion, que souhaites-tu ajouter à propos d’Eternal Evil ? Et peut-on espérer vous voir en tournée en France bientôt en fin d’année ou l’année prochaine ? Peut-être des festivals d’été déjà réservés pour 2024 ?
Cet album est le chaos total d’un thrash/black metal sans foi ni loi ! (sourires) Et oui, nous travaillons pour des concerts européens en 2024 mais rien de confirmé pour l’instant, mais nous espérons revenir jouer à nouveau en France ! Merci à toi pour cet entretien.

Publicité

Publicité