WATAIN : Welcome to Hell’s Fire (exclu Motocultor 2023 !)

Tel un fidèle soldat de Satan, la horde suédoise Watain, fondée en 1998 du côté d’Uppsala, continue sa croisade anti-chrétienne concerts après concerts, faisant croître ses légions de fidèles grâce à un black metal old school de qualité inspiré par ses pairs d’il y a trente ans… De passage au Motocultor l’été dernier, son fidèle porte-parole nous a octroyé une petite pause afin de dresser le bilan de The Agony & Ecstasy of Watain paru en 2022 (Nuclear Blast). Son chanteur a aussi confié quelques anecdotes en festival, avant de nous annoncer en avant-première qu’un album live paraît cet automne. [Entretien avec Erik « E » Danielsson (chant) par Seigneur Fred – Photos live Motocultor : Seigneur Fred ; autres photos : DR]

Quelles sont les nouvelles de Watain du côté d’Uppsala ? Où en êtes-vous dans les tournées et festivals ?
Nous sommes dans la seconde partie des festivals d’été pour toujours accompagner notre dernier album studio en date, The Agony & Ecstasy of Watain. Là, au Motocultor, ce sont donc les derniers festivals d’été que nous faisons avant de rentrer un peu à la maison en Suède, puis nous participerons à d’autres évènements ici ou là en Europe. C’est un cycle qui se termine, la fin de l’été approchant. Disons que c’est toujours un peu mélancolique… (sourires)

La fin de l’été approchant aussi, je comprends… Tu n’es pas trop fatigué cependant avec toutes ces dates que vous avez enchaînées dernièrement aux quatre coins de la planète ?
Un peu, si. Hier on jouait à Paris, tu vois. Mais bon, en même temps, c’est notre vie ! On ne va pas se plaindre avec tout ce qui est arrivé ces dernières années… (Ndlr : cf. à cause de la pandémie)… Je pense cependant que l’on en fera moins l’an prochain des festivals d’été. On en fera que quelques-uns, car c’est vrai que ça dure et prolonge la tournée du reste de l’année.

Il faut dire que c’est souvent une ambiance un peu spéciale en festival pour les artistes, non ? Plus relaxe, un peu comme des vacances…
C’est vrai. Et c’est toujours différent. Ça dépend des groupes avec lesquels on se retrouve et que l’on croise en coulisse durant ces festivals… (sourires) Et puis, c’est l’été, en général c’est agréable. D’année en année, on y croise du monde, parfois plus que d’autres, ça dépend des festivals et des étés, de la programmation. Ici c’est très varié j’ai l’impression. J’aime bien cette ambiance en général. J’adore ça.

Qui as-tu vu ici au Motocultor, ou penses-tu aller voir en concert, que tu connais personnellement peut-être, afin d’en profiter un peu ?
Il y a eu hier Wardruna mais nous jouions à Paris. Aujourd’hui (Ndlr : samedi 19 août), il y a Sodom par exemple qui joue ce soir et que je vais essayer d’aller voir juste avant notre concert. The Exploited également plus tard en fin de soirée. Cet après-midi, j’ai croisé Stéphane Buriez (Loudblast) que j’ai vu joué pour son side-project T.T.T. (Tribute To Thrash) au côté de l’incroyable guitariste Alex Colin-Tocquaine (Agressor).

Ah oui, tu connais ces artistes français ?
Oui, j’adore ! Je les connais : Loudblast, Agressor… Tu sais, je suis un grand fan des premiers enregistrements d’Agressor par exemple. (sourires)

Pour The Exploited, c’est très tard. Ils jouent au Motocultor entre 01h00 et 2h00 du matin, or certains ne sont plus très frais à cette heure-ci. Et puis, tu sais, certains artistes punk de nos jours ne veulent plus jouer si tard en général car le public est fatigué et eux aussi car ils vieillissent ! (rires)
C’est vrai, tu n’as pas tort. Si je ne suis pas trop fatigué après notre show, je pense quand même y aller jeter un œil. (sourires)

Parlons à présent de votre dernier album studio, The Agony & Ecstasy of Watain, paru il y a un an (Nuclear Blast). Quel bilan dresses-tu à son sujet ? Qu’est-ce qui a marché et d’autres moins ?
Ce fut un véritable effort collectif, en tant que groupe. On l’a enregistré tous simultanément en studio. Ce fut donc assez différent cette fois, ce qui a donné une réelle énergie et un certain enthousiasme sur la tournée qui a suivi et jusque-là d’ailleurs en festival. Ça, j’en suis très content, je pense d’ailleurs que ça s’entend dans les chansons et se ressent aussi live. On a passé du bon temps, et on a probablement donné là nos meilleurs concerts de Watain. Le fait de conserver le même line-up entre l’enregistrement en studio et la tournée, cela a créé une réelle cohésion entre nous. C’était très inspirant, et c’était quelque chose que j’espérais depuis longtemps. Enfin, c’est mon avis, ma vision des choses…

L’album précédent, Trident Wolf Eclipse, était quelque peu différent justement, même si c’était du pur classique Watain…
Oui, en fait il y avait de l’animosité dedans, beaucoup de choses conflictuelles qui se ressentaient là aussi dans les chansons, de la violence envers nos ennemis. Notre attitude était différente. Cela se sentait aussi, je pense. C’était bien aussi, mais différent. Cela dépend de notre humeur sur le moment. Et puis c’est comme ça que j’aime travailler, tu sais, ça doit rester naturel, organique, les choses viennent d’elles-mêmes. Rien n’est planifié au départ.

Tu composes toute la musique de Watain et en écris les paroles. Pour les parties de basse sur le dernier album The Agony & Ecstasy of Watain, est-ce toi qui les a enregistrées ou bien votre bassiste live d’origine chilienne Alvaro Lillo (Execrator, Xalpen…) ?
Oui, je compose et écris tout, mais sur le nouvel album, il y a vraiment eu un travail d’équipe comme je te disais précédemment. Et c’est bien Alvaro qui s’est chargé lui-même de ses parties de basse.

Auparavant, tu ne t’occupais pas de la basse en studio ? D’ailleurs au début de Watain, tu étais à la fois bassiste et chanteur, non ?
Ouais, c’est vrai. Je m’occupais de la basse, même des guitares et parfois de la batterie. Mais ça n’a pas d’importance à vrai dire. Par contre, quand on enregistre tous ensemble en studio les chansons, là c’est différent et ça se ressent. Ça sonne comme un groupe et j’aime ça.

Mais l’enregistrement de The Agony & Ecstasy of Watain ne fut pas trop compliqué durant la pandémie du fait des confinements à Stockholm et Uppsala même si ce fut plus libre en Suède pour travailler ou sortir vis-à-vis du covid-19 ?
Non, on répétait malgré tout pendant la pandémie, en utilisant plusieurs techniques d’enregistrement mais on a besoin de se rencontrer, de se réunir pour jouer ensemble, comme ça se faisait dans le temps, donc pas besoin d’internet. L’épidémie et le confinement ne furent pas un problème en fin de compte. Et puis, tu sais, on habite tous assez près les uns des autres, à la campagne dans de petits villages, entre Stockholm et Uppsala, donc ça a été.

A présent, il existe encore des groupes de metal qui rencontrent des problèmes dans certains pays et auprès de certains publics, à l’instar de Napalm Death au Viêt-Nam, ou Cannibal Corpse parfois encore censurés en Allemagne pour ses pochettes. Avec Watain, rencontres-tu encore des problèmes de censure ou d’opposition à cause de votre musique et tes paroles satanistes dans certains endroits encore en 2023 ?
Oui, de nombreux problèmes. Et il y en a même de plus en plus que le groupe grandit. Mais c’est quelque chose qui me va, je m’en accommode car tant mieux, ça veut dire que l’on dérange. En fait, c’est un grand sujet. Premièrement : je fais donc avec ces désagréments et j’accueille ces problèmes car, je pense, qu’en tant que groupe de black metal, on est justement là pour créer des problèmes, faire peur, et que les gens réagissent, s’interrogent sur la religion, qu’est-ce que le satanisme, pourquoi on fait ça, etc. Cela veut dire qu’ils prennent au sérieux ce que l’on fait d’une certaine façon. Donc selon moi, c’est plutôt positif. C’est des choses, des idées qui font partie des questions que l’on peut se poser, et démontre la faiblesse du genre humain face aux religions. Du coup, en deuxième lieu, cela veut donc dire aussi en même temps que le black metal est encore considéré comme une menace, un danger potentiel dans la société. On est là pour ça justement. On est l’ennemi des Chrétiens, leur ennemi, et c’est ce pourquoi le black metal est né à l’origine… Les gens se plaignent, certains ne veulent pas nous faire jouer dans des clubs. Dans tous les cas, Watain reste un groupe qui joue du metal extrême exprimant des idées encore très controversées et radicales. Je ne vais pas m’asseoir et resté planté là à me plaindre aussi en disant que le public ne nous aiment pas, que l’on ne peut pas faire ce que l’on veut, etc. Au contraire, c’est ce que le black metal doit être. Alors si on est détesté, menacé, s’il y a encore des problèmes de nos jours, alors heureusement, sinon ça voudrait dire que tout est normalisé. Quelque chose ne tournerait alors pas rond… (sourires)

Tu sais, à la création de festivals de metal en France, comme le Motocultor mais surtout le Hellfest, précédés du Fury Fest il y a vingt-trois ans, les choses n’étaient pas faciles. Il y avait des associations catholiques militantes très hostiles qui voulaient leur interdiction. Mais peu à peu ça s’est calmé une fois que les commerçants locaux ont vu leur intérêt (économique) avec la venue de plus en plus de festivaliers qui consomment et sont finalement des gens on ne peut plus normaux…
Ouais, je vois. Mais ce dont tu parles, c’est finalement de la communauté metal en général qui est souvent mal jugée et finalement tout se passe bien car c’est un public très festif et amical, et finalement conventionnel. Mais le black metal et Watain, c’est autre chose. On est un peu à part… Watain, c’est un peu comme le loup dans la bergerie… Un loup dans la nature que l’on aperçoit peut être à la fois beau, impressionnant, mais aussi dangereux, car ça reste une bête sauvage qui rôde et ne s’approche jamais trop près. Voilà la problématique. Et c’est ce que doit être le rôle du black metal, encore maintenant. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai commencé à jouer du black metal. Après il y a plein de groupes de black metal, mais peu comme nous, je pense. Et d’un autre côté, comme on le disait tout à l’heure à propos des problèmes rencontrés encore de nos jours : s’il existe des problèmes, alors tant mieux, pas de problème pour nous. (rires)

Sinon as-tu des side-projects en dehors de Watain ? Comme ton bassiste Alvaro qui évolue aussi dans Xalpen, Execrator, Kako Daimon…
Non, pas vraiment. J’ai joué par contre quelques années dans d’autres groupes en tant qu’invité à un moment donné : un moment dans Dissection ; également dans Necrophobic. Ah oui, sinon j’ai aussi rejoint récemment Morbid (ex-Scapegoat) à la batterie en live. Tu sais, c’était l’ancien groupe de Dead (R.I.P.), un des anciens chanteurs de Mayhem…

Aujourd’hui en Suède, j’ai l’impression qu’il n’y a plus vraiment de renouveau sur les scènes death et black metal scandinave. Les nouveaux groupes suédois par exemple qui émergent ne font finalement que copier leurs aînés. À l’exception de certaines formations rares véritablement innovantes, tout le monde ne fait que reprendre du Entombed ou du Mayhem… Les légendes existent et sont encore actives : Dark Funeral, Marduk, vous, etc. Alors qu’entre-temps, de nouvelles scènes sont apparues dans les pays de l’est, en France, aux USA, etc. Qu’en penses-tu ? Tu n’es pas inquiet du futur ? Soutiens-tu certains jeunes artistes suédois peut-être en leur donnant un coup de main ?
Je veux dire, pour moi, je n’essaie pas spécialement d’encourager ou de chercher des nouveaux talents. Cela se fait naturellement ou pas, lors d’un concert, d’une rencontre, et après si j’aime ou pas. Il y a quand même quelques bons nouveaux groupes intéressants en Suède. Ils sont moins nombreux, d’accord, que dans les années 90’s, c’est sûr. Après, tu sais, mes goûts, si j’avais à les résumer sur cette table où se trouve ma canette de bière, il n’y en a que quelques-uns qui gravitent autour de Watain. C’est limité. Cela a toujours été, qu’ils soient anciens ou nouveaux, après il faut remettre dans le contexte des années 90 où finalement ça s’inscrit dans une histoire, tout un courant qui émergeait et s’exportait. Artistiquement, c’est sûr que tous les groupes de cette période apparus en Suède ont joué un rôle dans notre développement musical. Aujourd’hui, j’ai besoin de ressentir avant tout les choses quand je vois les yeux dans les yeux les musiciens des nouveaux groupes sur scène s’exprimer, que ce soit maintenant donc, ou si l’on était en 1993. Ils doivent travailler.

Apprécies-tu d’autres groupes français qu’Agressor et Loudblast évoqués précédemment ? En particulier dans le black metal ?
Oui, car tu sais, on a travaillé avec le label français Season of Mist pendant un moment, donc on a eu pas mal de connexions avec d’autres groupes de leur catalogue. J’apprécie certains. Par exemple, je suis en contact avec Deathspell Omega, Antaeus, Seth, Arkhon Infaustus, Temple Of Baal, Mutilated aussi et ce qu’ils ont fait par la suite dans d’autres projets. Pas mal de groupes de Paris essentiellement. Mais je dirai que pour résumer, mes deux groupes français favoris sont certainement Agressor et Mutilated.

Connais-tu le nouveau groupe français Pénitence Onirique qui a joué un peu avant vous dans la journée mais sur une autre scène ici au Motocultor ? Ils jouent masqués, enfin sous des cagoules comme Gaerea, et s’apprêtent à publier leur troisième opus…
Non, je ne connais pas. Mais je ne suis pas trop fan des gens qui jouent masqués ! (rires) J’ai besoin de voir leur visage, leurs yeux, c’est important, au-delà de leur musique, bien sûr.

Enfin, quels sont les projets à venir pour Watain d’ici la fin de l’année et dans le futur ?
On a pas mal de choses à venir. Pour le moment, on a encore des concerts à venir en Europe (Suisse, Allemagne…) et à l’automne notamment, on va faire un gros focus sur deux concerts chez nous à Uppsala en Suède en novembre. Cela va être annoncé prochainement (Ndlr : entretien enregistré le 19/08/23 au festival Motocultor). Donc on se prépare beaucoup là-dessus, on travaille pour. Et dans le même temps, cet automne va sortir notre nouvel album live officiel chez Nuclear Blast. Il comprend une douzaine de morceaux enregistrés live à Stockholm. Il s’appelle Die in Fire – Live in Hell (Agony & Ecstasy over Stockholm).

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