RIIP FEST #7 LES 7 & 8 JUILLET 2023 À NOTRE-DAME-D’OÉ (37) : L’INTERVIEW

Après un retour plein de courage et de qualité l’an passé dans un contexte post-covid encore difficile (bon nombre de petits festivals indépendants dans l’Hegaxone durent annuler), les festivités continuent de plus belle en 2023 en matière de musiques extrêmes (metal et punk/hardcore) en Touraine avec une bien belle affiche là-encore pour cette (déjà) septième édition du Riip Fest. En vedettes internationales du côté de Notre-Dame-D’oé (Indre-et-Loire), on aura droit en exclusivité cette année aux légendaires punks de Cro-Mags avec son frontman Harley Flanagan, ainsi qu’à l’ancien chanteur Karl Willetts (des défunts Bolt Thrower) avec son excellent nouveau combo death metal Memoriam (retrouvez notre précédente interview ici et chronique de leur dernier album ici). Egalement à l’affiche, nos fidèles Bataves de Born From Pain (hardcore metal) qui avaient plus que mouillé le maillot en 2017 à l’Espace Gentiana de Tours en se produisant sur scène sous 42 degrés à l’ombre (ceux qui étaient présents s’en souviennent encore). Et comme d’habitude, on pourra découvrir son lot de petites pépites montantes comme Prowl (Thrash crossover/Montréal – Canada), No Matter What (hardcore/Bordeaux), ou les locaux de Final Shodown (brutal deathcore/Tours). En pleins préparatifs, nous avons fait le point avec son fondateur. [Entretien réalisé avec Emilie Duputié (vice-président, programmateur) par Seigneur Fred – Photos : DR]

Tout d’abord, comment vont l’organisateur et les membres de l’asso à quelques semaines de cette 7ème édition 2023 du fameux festival RIIP FEST près de Tours ?
Une équipe soudée, en forme, et enthousiaste de lancer cette 7ème édition du RIIP Fest !
RIIP ASSO s’active en Touraine ? (sourires) Il serait quand même temps de s’activer à quelques semaines de l’évènement maintenant… (sourires)

Quel bilan dresses-tu de la précédent édition 2022 qui n’a probablement pas rencontré le succès escompté alors que le beau temps était au rdv, et que l’affiche était alléchante dans cette magnifique et confortable salle de l’Oésia à Notre-Dame-d’Oé (37) ?
Les crise sanitaire, économique et sociale ont durablement fragilisé notre festival, à commencer par notre public. Plus de 60% de notre public était auparavant non originaire de la région Centre-Val de Loire. Désormais c’est le contraire… En parallèle, j’imagine qu’une possible fracture de transmission s’est probablement opérée entre la nouvelle génération et l’ancienne. Avec tout le respect que je porte aux groupes légendaires ou incontournables, nombre de jeunes festivaliers semble disposer d’une curiosité au spectre un peu plus limité à l’ère moderne des musiques extrêmes.

Avez-vous en quelque sorte essuyé les plâtres de la reprise timide des festivals d’été l’an dernier après deux ans de pandémie alors que notre ancienne ministre des sports (et Grosse Tête à RTL accessoirement) avait promis, peut-être un peu prématurément : « que l’on redanserait vite dans les festivals en France cet été » ? (sourires)
Je ne saurai dire… Disons qu’une chose est certaine, sans culpabiliser personne, il y a :
– les survivants toujours au rendez-vous
– les résilients qui reviennent progressivement
– les absents que l’on attend plus
A nous donc de recentrer le spectre médiatique de nos partenaires locaux et régionaux afin de pouvoir mettre en avant la scène extrême indépendante, européenne, nationale régionale et locale.

Toujours sur l’édition 2022 qui affichait une 1ère journée orientée plus metal extrême, un groupe comme Nostromo était-il trop brutal ou trop « élitiste » d’une certaine façon pour le public alors que leur nouvel album Bucephale n’était pas encore paru et que la machine de guerre suisse se relançait une nouvelle fois ? (lire notre interview de Nostromo réalisée au Riip Fest en avant-première en juillet 2022)
Je ne pense pas… Nous nous efforçons d’effectuer une programmation Metal Hardcore, cela suppose de fait certaines nuances. Nostromo avait tout à fait sa place sur cette soirée. Je pense que le genre musical du groupe n’a rien à voir face au concours de circonstances auxquelles nous avons été confrontées. En revanche, il est certain que les plus jeunes membres de notre public étaient probablement plus distanciés de l’attrait qu’avait suscité le quartet suisse avant sa dissolution à l’époque fin 2000.

https://youtu.be/dHpASk0SiNM

Quel(s) public(s) attire le Riip Fest selon toi ?
Un public de passionné assurément. Passionné de musique live, amateur de véritables rencontres artistiques et respectueux de tou.te.s.

Constates-tu une certaine évolution dans sa diversité : look, goûts musicaux, familles, origines géographiques, etc. ?
Oui c’est certain. Tout le monde évolue, à commencer par nous. Cela dit notre public tend possiblement à rajeunir en hiver (plus d’étudiants) et à vieillir en été (plus de familles). Nous rencontrons également de plus en plus d’amateurs de musique « old school » qui, sans pour autant être des « coreux », apprécient la musique live sans trop d’artifices.

Y’a-t’il des spectateurs qui viennent de plus en plus loin chaque année ?
En 2019 oui. En 2022 moins. En 2023 qui saura ? Notre record étant probablement celle détenue par un Réunionnais qui avait décalé ses vacances en raison de la programmation de Pro-Pain lors de la 2ème édition du Riip Fest en 2016.

De même, quel(s) public(s) cherchez-vous à toucher et faire venir à chaque nouvelle édition ? Uniquement des coreux et punks, et de plus en plus de metalleux et rockeurs peut-être, mais pas que… ?
Un public de passionné essentiellement. On se moque éperdument des étiquettes. On tend justement à lutter contre et à accepter les personnes telles qu’elles sont, ce quel que soit leurs goûts musicaux. Pour l’anecdote, une personne avait assisté à une précédente édition du Riip Fest sur son 31 comme un employé de bureau. J’ai longtemps cru à un contrôle de la Sacem alors que non. C’était juste un festivalier qui sortait du bureau.

Comment organise-t’on à l’avance une programmation aussi béton chaque année avec des plus petits et plus gros artistes ?
Va savoir… J’aime la musique. J’aime les artistes authentiques, intègres et sincères. Une fois nos têtes d’affiches définies, je décline assez logiquement en piochant dans mon sac à idées. Idées qui se construisent en live, je le précise. Inutile de penser jouer un jour au Riip Fest si l’un des membres de notre comité de programmation ne vous a pas préalablement rencontrer artistiquement & personnellement.

En fonction aussi du budget bien sûr, et des goûts de chaque membre de l’asso, et vous votez à main levée ou à courte paille ? (rires)
Le budget est une première base, pour sûr ! Le comité de programmation fait le reste.

NOSTROMO live @Riip Fest le 08/07/2022 (photo : ©Maxime Hillairaud)

Vous faites attention à ce qui se produit à la même période en France afin de ne pas faire concurrence à d’autres concerts/évènements/festoches ?
Nous faisons surtout attention à programmer un festival unique en son genre, en toute humilité : 15% de têtes d’affiches internationales, 35% de têtes d’affiches européennes, 15% à 30% de groupes locaux / régionaux et 15% à 30% de groupes émergents nationaux.
Nous travaillons en concertation avec certains festivals indépendants, essayons un maximum d’éviter de travailler avec les agences de booking, et faisons également confiance à l’indépendance et l’enthousiasme de la nouvelle génération de groupes émergeants.

Cherchez-vous l’exclusivité locale parfois, comme par exemple, je crois, cette année Memoriam (death metal/UK) ?
Assurément ! Tout comme pour Cro-Mags. C’est une chance et une certaine fierté de pouvoir faire jouer deux groupes de notoriété internationale en exclusivité nationale en région Centre.
Certaines préventes réalisées sur la prochaine édition du Riip Fest nous laissent à penser que certains festivaliers sont d’ailleurs prêts à de nouveau tailler la route pour l’occasion.

Es-tu fan personnellement de Bolt Thrower à la base pour programmer et inviter l’ancien chanteur de Bolt Thrower, Karl Willetts, et son nouveau groupe Memoriam ?
Honnêtement ? Pas particulièrement. En revanche, j’ai déjà vu Memoriam à l’occasion de sa formation lors d’une précédente édition du IEPER FEST sans même savoir qu’il s’agissait de membres de Bolt Thrower. Et quelle baffe ! En amateur de sonorités death old school, j’avoue avoir été littéralement séduit par ce que proposait le groupe au-delà même de son apparence de vieux briscards déjà à l’époque.

Alors parle-moi alors de cette septième édition 2023 : sa programmation tout d’abord et tes coups de cœur ? Cro-Mags par exemple ou alors Born From Pain qui reviennent à Tours alors dans une salle climatisée cette fois-ci ? (sourires)
Pour Cro-Mags, quel honneur de pouvoir les recevoir pour la première fois, et, qui plus est, en date unique au Riip Fest ! Une date exceptionnelle pour un groupe non moins exceptionnel, ne serait-ce que par l’histoire de Harley Flanagan… Je laisserai le soin aux plus curieux de se documenter à ce sujet, sans vouloir épiloguer…

Cela va leur faire drôle à nos amis néerlandais par rapport à l’Espace Gentiana dans lequel ils avaient joué en 2017 de mémoire (voir notre live report Riip Fest#3), dans une température de près 42 degrés !! Ils avaient mouillé le maillot !
Pour Born From Pain, il me tenait à cœur de pouvoir les faire rejouer à la maison dans des conditions de jeux, plus abordables dirons-nous… La jungle du Riip Fest, c’est désormais uniquement dans le pit ! Même si le réchauffement climatique saura nous tendre les bras dès que nous mettrons un pied à l’extérieur de la salle Oésia.

De nouveaux plus petits artistes peut-être à découvrir cette année ? Des groupes locaux ?
Les anglais de Grove Street & d’Overpower sont deux groupes que j’attends particulièrement au tournant. Le premier pour son côté groovy catchy et le second pour son esprit thrash crossover particulièrement emballant. Côté groupes émergents, si je ne devais en retenir qu’un seul, je m’arrêterai sur les Bordelais de No Matter What, qui malgré leur jeune âge, développe une fougue et une énergie live des plus positive et contagieuse. Sinon toujours un plaisir de représenter le fleuron de la scène locale avec Final Shodown qui auront là tout le loisir d’exprimer toute la brutalité de leur deathcore pour la première fois au Riip Fest, ainsi que Real Deal que l’on ne présenterait presque plus si ce n’est que le line-up du quintet punk/hardcore tourangeau a été quasiment remanié dans sa totalité. Alors on a hâte de les retrouver !

Et y’a-t’il des surprises, des évolutions, des nouveautés dans l’organisation du festival cet été ? Plus de merchandising ? De stands divers ? Autres ?
Certaines surprises certainement. Ne serait-ce qu’au bar où nous disposerons désormais de notre propre bière, au-delà d’une gamme toujours aussi diversifiée et également de boissons non alcoolisées. Des stands d’exposants toujours plus diversifiés et complètement différents de l’an dernier : graphiste, vigneron, CBD… Sans oublier notre lot d’associations caritatives : HxC Cares pour la défense des animaux maltraités ainsi que l’association Coiffeurs Justes qui réutilise les cheveux pour la dépollution des cours d’eaux et des océans. Une petite coupe pour les cours d’eaux, ça vous dit ? (sourires)

Enfin, en tant que spectateur ou acteur vas-tu ou as-tu participer à d’autres festivals personnellement cette année ? Si oui lesquels ?
Oui ! Inévitablement tous ceux sur lesquels je vais me produire avec mon propre groupe Beyond The Styx : le Macumba Open Air, l’Xtreme Fest & le Sylak Open Air. Rien que ça ! (sourires)

Quelques mots enfin sur Beyond The Styx justement qui ne se produit pas, à mon grand désarroi (car je vous ai loupés à Orléans en mars à la St Patrick) ? Rappelle-moi votre dernier album et où peut-on se le procurer ? Au Riip Fest peut-être ??
On n’a pas vocation à se produire tous les ans au Riip Fest. On soutient autre chose que notre propre égo, c’est là le propre du Hardcore me semble t’il, non ? Concernant les festivals, je viens te répondre juste avant. Quant à notre dernier album, Sentence , il est tout simplement disponible au format CD chez n’importe quel disquaire de qualité et directement auprès de Frozen Records (Nantes) ou de nous même (Bandcamp & Big Cartel) au format vinyle & K7.

Déjà des groupes en vue sur l’édition 2024 peut-être ? Turnstile ou un petit Terror par exemple qui écume en ce moment la France ? Ou ce sont déjà des groupes hors-de-portée désormais pour Riip Asso ?
Honnêtement ? Oui. Comme chaque année ! Turnstile est financièrement inaccessible de fait. Le Hellfest ne les a pas annulés sans raison il y a deux ans… Terror : à étudier… Mais tout dépend de leur plan de tournée. Ils ont déjà écumé la France en long et large et en travers (pour notre plus grand plaisir) cette année !

Quel(s) message(s) veux-tu ajouter et notamment à travers l’élan culturel qu’apporte le Riip Fest en région Centre-Val de Loire pour conclure ? Résilience ? Tolérance ? En ces temps de guerres et faits divers même à Tours avec une nouvelle attaque (la 6ème) au centre LGBT à Tours en mai dernier…
Un message simple : si vous souhaitez permettre à votre scène locale de se développer, mobilisez-vous pour elle. Artistes, Bénévoles, Publics, Médias, Curieux… Rien de tout cela ne serait possible sans vous. Merci pour le précieux soutien que vous nous apportez depuis plus de dix ans déjà.

STILLBIRTH live@Riip Fest 2022 (photo par Seigneur Fred)

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