Fatigués mais heureux, voilà l’état physique et mental dans lequel nous sommes repartis du festival breton du Motocultor auquel nous sommes fidèles depuis ses débuts. La quinzième édition s’est achevée sur un succès et ce, pour la seconde fois consécutive à Carhaix. Rassemblant autant de spectateurs (env. 54 000) que l’an passé, de toutes générations et horizons confondus, grâce à une superbe programmation hétéroclite, nous avons ainsi pu nous régaler tant en matière de heavy, thrash, death, black ou sludge metal, metalcore, mais aussi de rock, folk (Alan Stivell, Faun, Eihwar…) ou de choses plus légères (Bernard Minet, Didier Super). Retour sur les moments forts et coups de cœur 2024, mais aussi les quelques points faibles qui subsistent malgré des efforts de la part des organisateurs, comme nous l’avait annoncé son directeur Yann Le Baraillec au début de l’été. D’ores-et-déjà la prochaine édition se tiendra du 14 au 17/08/25 avec notamment en têtes d’affiche Machine Head, Blind Guardian, et Dimmu Borgir, Suffocation, mais aussi Enthroned ou Eivør… [Live report par Seigneur Fred avec la complicité de Morbidou – Photos : Morbidou & Seigneur Fred]
JEUDI 15/08/2024
C’est sous les sonorités black metal des Américains d’Uada que nous arrivons au festival Motocultor où il nous faut un léger temps d’adaptation pour se repérer par rapport à l’an passé. Leur style mélodique doté d’influences heavy metal dans certains riffs sur ses refrains et sa vélocité technique attirent nos oreilles encore vierges ici en ce premier jour. Assurément, le groupe de Portland (Oregon) constitue une découverte intéressante que nous approfondirons plus tard en croisant ses membres à leur séance de dédicaces… Leur dernier album en date Crepuscule Natura (Eisenwald) est disponible depuis 2023.
Alors que la venue de Magma au Motocultor est annulée à cause d’une fracture du coude de son batteur Christian Vander, nous apprenons qu’Ange le remplacera à son créneau programmé en soirée, et qu’il n’y a rien du coup en lieu et place du set créneau d’Ange initialement prévu sur la Bruce Dickinscène (l’un des deux chapiteaux). Se produit alors seulement à 17h00 Squid. Si le groupe de post punk rock anglais fait peut-être office d’OVNI et dénature à première vue ici, il a tout à fait sa place du fait de la grande ouverture d’esprit des programmateurs. Dans un genre plus énervé, on aurait plutôt préféré The DEP récemment reformé pour plus d’énergie et de folie punk/hardcore.
Mais les festivités metal vont sérieusement commencer avec les thrashers américains de Havok sur la Supositor Stage. Le quatuor de Denver (Colorado) entame alors un set carré et bien rodé, prêt à en découdre avec les premiers festivaliers déjà nombreux dans le pit. Leur thrash puissant et nerveux, proche parfois d’Overkill, fait déjà mal par où ça passe, en attestent les missiles extraits de leur dernier opus V paru en 2020 (Century Media). Le premier circle pit se forme alors que la pluie s’invite à Carhaix, enfin un crachin breton dirons-nous plutôt ici, qui n’entreverra en rien la bonne tenue des concerts à venir ni notre motivation à toute preuve. La preuve un slam d’une PMR !! (même si ça fait très mal quand ça vous arrive dessus !). Première grosse claque, et elle est donc thrash celle-ci.
Pour l’heure, c’est déjà la fête au Motoc’ parmi les spectateurs ! On croisera même monsieur le maire de Carhaix, Christian Troadec en visite sur le site des Vieilles Charrues qu’il connait bien…
En véritable patron local, l’artiste folk breton incontournable revient se produire sur la grande scène (Dave Mustage) ce jeudi 15 août au Motocultor. Il s’agit d’Alan Stivell, accompagné de musiciens de formation rock, hard rock parfois avec l’un des deux guitaristes (qui n’est pas en kilt cette fois) sur la droite, qui va booster les compos folk du chef de file de la scène folk celtique en France et européenne. Comme en 2019, il jouera de la flûte et de la harpe en plus de chanter, et achèvera son spectacle devant un public hétérogène où les métalleux guincheront dans le pit dans la joie et la bonne humeur, alors que des fidèles du jeune artiste octogénaire en redemandent. Il faut dire qu’il est chez lui ici dans le massif armoricain. Et comme à l’accoutumée, Monsieur Stivell conclura par un classique du répertoire traditionnel breton « Tri martolod ». Merci à lui et ses musiciens pour ce concert folk parfaitement calibré pour le Motoc’ encore une fois. L’ambiance monte sur le site de Kerampuilh à Carhaix…
Entre un Bob Vylan et un Sacramentum aussi rare dans l’Hexagone qu’une médaille d’or aux J.O., il n’y aucune hésitation. Notre cœur de metalhead nous attire inexorablement à la Supositor Stage voir la légende black/death metal mélodique suédoise de retour en live partout dans le monde après une longue léthargie de dix-huit ans… Reformé en 2019 sous l’initiative de ses deux membres historiques, Anders Brolycke et Nisse Karlén, nous assistons au départ à un show quelconque avec un son correct mais sans véritable âme sur scène. Et c’est sans surprise la chanson « Fog’s Kiss » qui ouvre les hostilités. Son ex-bassiste et désormais uniquement chanteur Nisse Karlén, qui a définitivement confié sa quatre cordes à la grande et jeune Julia von Krusenstjerna (du groupe de heavy metal Source), répète inlassablement ses mouvements incantatoires avec ses bras et mains de manière un peu molle même si Satan l’habite. La prestation du groupe de Göteborg a du mal à décoller jusqu’à « Blood Shall Be Spilled » où le sang va couler alors sur scène. Nous écoutons avec plaisir les classiques de leur premier album Far Away From The Sun paru, pour rappel, en 1996 sur le label français Adipocère Records toujours actif. Puis, le frontman sort alors son calice rempli de (faux) sang et effectue une libation sur lui-même, et ce, à plusieurs reprises, arrosant au passage les gars de la sécurité des Veilles Charrues et le premier rang. Le bougre répètera cela au moins quatre fois avec vice jusqu’à la fin du show qui montera alors en intensité. On retiendra au final un bon concert des Suédois, mais pas vraiment adapté à une scène en plein air en festival. S’ils n’accordèrent aucune interview ici au Motocultor, nous pûmes quand même échanger rapidement autour d’une bière avec son chanteur d’une gentillesse à toute épreuve et grande fidélité (depuis 1996 !) à votre serviteur. Lui et son guitariste Brolycke nous confirmèrent leur travail sur un prochain album studio de Sacramentum. En attendant, la réédition de leur album The Coming Of Chaos réenregistré pour l’occasion est prévu d’ici la fin d’année (chez Century Media a priori).
Alors qu’Ange, autre légende mais du rock prog’ français depuis 1969 celle-ci, remplace donc Magma ce jeudi soir sur la Bruce Dickinscène, nous restons fidèles au Malin et retrouvons Glen Benton et sa horde satanique sur la Dave Mustage, un an après leur venue pour un set spécial au Motocultor où Deicide joua en intégralité son second album culte Legion (lire notre live report 2023). Cette année, c’est pour la promotion de leur excellent treizième péché capital Banished By Sin pour leur nouvelle carrière chez Reigning Phoenix Music sorti en mai dernier (lire notre récente interview de Glen Benton ici). Si le show des vétérans de Tampa (Floride) fut impeccable et implacable, extrêmement puissant, nous fûmes un poil déçu tout de même car ils ne jouèrent qu’une poignée d’extraits du nouvel opus (« From Unknown Heights You Shall Fall », le sanglant « Sever The Tongue », et « Bury the Cross… With Your Christ »), timing en festival oblige. Mais la setlist s’avère parfaite pour tout fan de Deicide qui se respecte, quelque soit la période. A la guitare, Kevin Quirion est très appliqué sur la gauche de la scène, peut-être trop, très statique et toujours aussi peu démonstratif, dommage, alors que le petit nouveau gratteux à droite, Taylor Nordberg (The Absence…), qui a ingéniorisé le dernier album et apporté beaucoup d’idées en studio (notamment dans les soli de guitare), headbangue et s’excite plus devant un public acquis à leur cause et un son tout à fait correct. Devant les fûts de l’excellent et véloce Steve Asheim, Glen Benton est encore en pleine forme à cinquante-sept et éructe comme un diable en maltraitant sa basse jusqu’au final « Homage For Satan » après un « Dead by Dawn » des familles. Et comme à l’accoutumée en tournée de festivals, celui-ci n’accorda aucune interview. Son acolyte et sympathique Steve Asheim qui devait s’y coller, oublia les interviews prévues avec la presse à cause d’une sieste de deux heures… Ah, Deicide reste Deicide, unique et sans compromis.
On reste dans le metal d’obédience satanique mais moins violent celui-ci, quoique, à ses débuts dans les années 80, Venom, l’original, faisait peur quand il tournait alors avec un certain Metallica en Europe… Mais ce soir au Motocultor sur la Supositor Stage devant une foule immense, c’est l’autre version qui se produit pour des raisons juridiques avec l’original : Venom Inc. Pour rappel, on y retrouve à la basse et chant, Tony alias « Demolition Man », qui remplaça Cronos dans Venom entre 1989 et 1992, avant de poursuivre une carrière d’acteur dans de gros films hollywoodiens dans les années 90 (Judge Dred, Master and Commander, etc.) ; si Mantas figure uniquement sur disque, là c’est le guitariste Curran Murphy (des excellents Shatter Messiah) qui joue sur la droite de la scène, et le très bon JXN à la batterie. Le show débute par « Witching Hour », suivi de chansons de leur propre répertoire (ils ont publié deux albums chez Nuclear Blast : Avé (2017) et There’s Only Black (2022), le tout entrecoupé de divers autres standards de Venom qu’ils sont autorisés à jouer, comme « Welcome to Hell », « Rip Ride », ou « Black Metal » qui donna le nom à tout un genre en devenir en 1982… Malheureusement le son trop surfait avec trop d’effets donne un rendu plus ou moins digeste ne permettant pas d’apprécier le speed/thrash old school du trio anglais qui reste néanmoins redoutable en live.
Pour changer un peu de registre et comme ce fut l’une des belles surprises au printemps 2024, nous allons voir ce que donne la formation scandinave Crownshift en live. Car si sur leur premier album éponyme nous avait séduits (lire notre chronique ici), c’était presque trop parfait sur disque pour ne pas être louche. Et sur la Massey Ferguscène, nous sommes bluffés par son chanteur Tommy Tuovinen (MyGrain) et les musiciens qui l’accompagnent, provenant tous déjà de formations de grande renommée en tant que musiciens de session ailleurs (Nightwish, Wintersun (live), Children of Bodom (live), Bodom After Midnight, ex-Norther, etc.). L’ambiance est géniale, et le son aux petits oignons, permettant d’apprécier les mélodies et nombreux changements de rythmes des compositions donnant dans un groove/power metal mélodique aux influences Soilwork parfois de toute beauté. Ah ces Scandinaves, toujours aussi forts ! Un nouveau combo à suivre de près…
Histoire de calmer le jeu dans la nuit et partir dans nos songes dans l’univers de la Terre Milieu de Tolkien, l’ensemble toulousain Neko Light Orchestra nous propose sa vision musicale symphonique comme une B.O. de film du Hobbit et du Seigneur des Anneaux sur la Dave Mustage, après quelques réglages sonores. Curieux et charmant, ils seront à revoir en tournée prochainement dans tout l’Hexagone.
Pour du gros post rock bien dark et original, il ne fallait cependant pas louper les Anglais de Crippled Black Phoenix (lire notre dernière interview ici) qui nous présent sa dernière et succulente offrande Banefyre (Season of Mist) paru en 2022 (chronique ici). Si vous avez aimé Crippled Black Phoenix, découvrez également leur nouveau side project avec trois des membres dans Johnny The Boy pour une infusion sludge/black incroyable où la chanteuse Belinda Kordic excelle dans un autre registre, black metal. (interview et chronique ici).
Plus tard dans la nuit après cette première courte journée mais finalement déjà bien remplie, les inclassables Norvégiens de Kvelertak (punk/black’n roll ?) enflammèrent la Massey Ferguscène (notre interview 2023 pour leur album Endling à retrouver ici en page 20), alors que les coreux américains de Lionheart renversent le pit avec leur hardcore beatdown made in Oakland (interview ici), présentant en festival leur dernière bombe Welcome to the West Coast III (Arising Empire) (chronique à lire ici). Mais pour durer en festival et garder la forme, il faut savoir parfois se coucher tôt. Alors bonne première nuit ici à Carhaix !
VENDREDI 16/08/2024
12h45 : L’heure, non pas de l’apéro, mais du death/grind aux accents crustcore !! Nous avons rendez-vous (depuis longtemps) avec le trio français Karras. (notre dernière interview avec Diego Janson à retrouver ici). Après un passage remarqué cette année au Hellfest, quoi de mieux qu’une prestation aussi au Motoc’ avec Diego, Yann, et Etienne, car Karras, ça défouraille toujours en live comme sur album. En veut pour preuve leur second LP We Poison Their Young (M-Theory Audio) sorti en 2023 qui résonne encore dans nos cages à miel. Si les deux premiers titres mettent un peu de temps à avoir un impact sur la foule dans le pit à cette heure relativement tôt d’ouverture du festival, très vite l’ambiance monte d’un cran. Diego ouvre son perfecto et se déchaîne sur sa basse Rickenbacker tout en criant à la mort. Quant au guitariste que tout le monde reconnait à gauche, Yann Heurtaux, il est bel et bien présent cette fois (car souvent remplacé quand il doit jouer avec son groupe principal Mass Hysteria), il lâche vite les chevaux sur sa Gibson SG. Quant à Etienne Sarthou (ex-Aqme), présent ici-même l’an dernier avec son autre groupe de sludge/post black progressif Deliverance, il impulse le rythme, alternant avec énergie et classe les blasts beats et des mosh parts bien méchantes. Diego chauffe la foule et les premiers circle-pits ne tardent pas alors que le crachin breton rafraichit l’ambiance qui chauffe. Si sur une grande scène comme la Dave Mustage l’impact est bien présent et Karras met le feu, on préfère cependant les voir live en club pour la proximité et la convivialité (comme avec Blockheads en 2022).
Tellement excité, Diego fit tomber un pré-ampli de retour de la grande scène qui aurait pu blesser un agent de la sécurité trop occupé à surveiller les premiers rangs car les pogos comment à être importants et les slams aussi. Tout simplement énorme !
Pendant ce temps-là, Les Compagnons du Gras Jambon séduisent un autre public sous la tente de la Bruce Dickinscène avec leur musique folklorique festive d’inspiration médiévale qui attirera de nombreux fans au stand de dédicaces plus tard dans la journée. Entre-temps, nous croisons un elf gothic égaré, en attente de Faun (folk-Allemagne) qui se produira dans la soirée…
A présent nous restons dans le gras mais celui qui tabasse encore, après Karras, voici le grindcore des vétérans alsaciens d’Inhumate. C’est parti pour une leçon de grind ! Son chanteur préviendra en faisant les présentations avec les festivaliers : « le grind, c’est que de l’amour. C’est simple : vous bougez quand ça joue et qu’il y a du bruit. Quand ça s’arrête, vous arrêtez de bouger ». Simple, non ? Et sans fioriture, ça cogne dans tous les sens, ça hurle à la mort et vomit dans le micro, les blasts tabassent à la batterie, et les riffs de guitares s’enchaînent à une vitesse d’exécution supersonique. Dans un registre moins crossover que leurs camarades de Blockheads mais tout aussi percutant, Inhumate détruit tout sur scène et le public en redemande, car oui, le grindcore, ce sont des morceaux toujours courts (moins de deux minutes en général), mais intenses !! Merci Inhumate ! Comme le Synthol, ça fait toujours du bien par où ça passe. Leur dernier LP Eternal Life est disponible depuis 2021 (Grind Your Soul Productions).
D’autres Français vont livrer un show imparable dans un genre musical totalement différent, et c’est ça que l’on apprécie au Motocultor. Beaucoup plus accessible et mainstream, il s’agit de Resolve (notre interview à retrouver ici). Grâce notamment à son incroyable talent de chanteur en la personne d’Anthony Diliberto, le quatuor ravit les fans de metalcore, mais pas que. A revoir en tournée un peu partout en France et en Europe, le succès de leur dernier opus Human (Arising Empire Rec.) étant au rendez-vous.
On passe au death metal d’Incantation et la voix d’outre-tombe de son leader (et seul rescapé du line-up originel) John McEntee, ravi d’être une nouvelle fois au Motocultor. Les Américains de Pennsylvanie ne font pas semblant et enchaînent les morceaux plus lourds et violents les uns que les autres. Le son est fort mais bon. Si ça reste old school et relativement linéaire dans le genre, dirons certains, les derniers morceaux font plus d’effets, avec quelques extraits de leur dernier méfait, le réussi Unholy Deification (Relapse Rec.). Luke Shively, la dernière recrue à la seconde guitare, effectue un sacré boulot au côté du doyen grisonnant qui communique plutôt bien avec le public, habitué à ce festival. Nous les croiserons dans les coulisses après leur set, satisfaits de leur performance et de l’accueil avant de profiter un peu du festival avant leur retour chez l’Oncle Sam. (interview de John McEntee à propos de leur dernier album à retrouver ici)
Avec une importante différence de volume sonore et de type de son, les Moldaves d’Infected Rain montent sur la Dave Mustage devant un public de fans communs à ceux de Jinjer que nous verrons sur la même scène le lendemain. Dans un premier temps, on vient à se demander si le guitariste dreadlocké Vadim « Vidick » Ozhog a bien branché sa guitare ! Qu’importe, finalement le show est plutôt visuel, avec sa chanteuse Elena Cataraga alias « Lena Scissorhands », habillée dans une tenue moulante en jaune zébré et qui headbangue sur sa plateforme en véritable frontwoman au côté du guitariste co-fondateur. Si elle n’a pas la voix aussi puissante et versatile (growls/voix claire) que Tatiana Shmayluk (Jinjer), la dame s’en sort plutôt pas mal, conditions live oblige… Elle remerciera chaleureusement le public car il s’agit d’un gros concert pour cette formation d’Europe de l’Est montante. Sinon, leur set est parfaitement rodé, et les zicos font le boulot. Ça jumpe même dans le pit car Infected Rain évolue en fin de compte dans un registre new metal/metalcore. Leur dernier album Time est disponible (Napalm Rec.). A revoir indoors lors du prochain warm up du Motocultor en France et en Europe en 2025.
On change radicalement d’ambiance et part sous la tente (la Bruce Dickinscène de mémoire) pour découvrir Eihwar qui sort à la rentrée son premier opus Viking War Trance (Season of Mist). Quelle belle surprise néo-folk alors que Faun nous attend en interview et live ce soir !! Grâce aux percussions électroniques du discret chanteur Mark en fond dans sa tenue noire faussement médiévale avec un casque viking à lunettes, et surtout l’énergie folle de sa chanteuse et tambourine nommée Asrunn, vêtue d’apparats shamaniques avec un crâne de loup sur la tête, les festivaliers vont véritablement rentrer dans une transe guerrière folle ! Si la majorité des instruments est samplé ici (ils ne sont que deux sur scène), et c’est là le bémol que nous émettrons de cette prestation du duo français, cela est compensé par la communication et la gestuelle, mais aussi bien sûr le superbe chant, d’Asrunn. Définitivement un moment fort du festival.
Et plutôt que de vous montrer une mauvaise vidéo live prise au Motocultor 2024, voici leur tout nouveau clip pour la chanson « Berserkr » qu’ils interprètent au festival dans la communion la plus totale avec la foule en délire. A (re)voir en tournée cet automne un peu partout dans l’Hexagone.
Puis c’est au tour de Hexis de tout détruire sur la Supositor Stage avec leur sludge metal/hardcore moderne teinté d’influences black par moment, black de par sa noirceur mais aussi le chant de Filip que nous croiserons après avec un sourire au coin de la bouche. Enorme surprise que cette bande danoise formée à Copenhague en 2010 tout de même ! On vous recommande vivement de jeter une oreille attentive à leur dernier LP Aeternum (Debemur Morti Productions) sorti en 2022.
L’ambiance va encore monter d’un cran à Carhaix ce vendredi avec voir l’incroyable show des fausses sœurs londoniennes de Nova Twins (elles sont simplement des amies d’enfance au départ) sur la Dave Mustage. Evoluant dans un registre rock fusion/crossover très groovy avec sa basse omniprésente bourrée d’effets (mais c’est pour la bonne cause) tenue par Georgia South, et la formidable voix de la guitariste/chanteuse, Amy Love, tantôt soul/r’n b, tantôt rock, elles vont littéralement faire danser les spectateurs dans le pit, que ce soit un fan de Burzum, Opeth, Exodus, ou Alan Stivell. Tout le monde headbangue à l’unisson, les slammers donnent enfin un peu de boulot à la sécu. Le son est parfait et quelle énergie ! Si à la longue, leurs rythmes peuvent devenir un peu répétitifs, et ce, malgré la présence d’une vraie batterie acoustique, il y a beaucoup de samples et effets dans l’ensemble, le trio british assure vraiment. On sent l’expérience scénique depuis leurs jeunes débuts en 2014, puis une participation au remarqué festival des Trans Musicales de Rennes en 2016 (où un certain Nirvana passa quasi incognito en 1990…). Ce n’est pas pour rien que Tom Morello, alors en plein lancement de Prophets Of Rage (à défaut de RATM), les prit en première partie de sa tournée en les encensant l’année suivante… Un show sobre mais totalement jouissif. Une nouvelle étoile est née assurément outre-Manche. Et plus que d’écouter Supernova (Marshall Rec.), leur dernier album en date, il vaut mieux les voir en live car les Nova Twins ont ça dans le sang. Quelle claque !
L’atmosphère devient plus lourde et belliqueuse à présent avec, enfin, les Ukrainiens de 1914. Enfin car par trois fois ses musiciens (tous en tenue plus ou moins militaire d’époque sauf son chanteur) furent contraints d’annuler leur venue en France, et notamment au festival Motocultor. D’abord à cause du covid-19, puis à cause d’interdiction de sortie du territoire et l’impossibilité d’obtenir des papiers administratifs à cause de la guerre qu’ils connaissent sur leur territoire étant donné que ses membres sont tous réservistes, comme nous l’expliquera en entretien son chanteur Dimitri (à venir très bientôt sur notre site). Puissant, heavy, sombre, voilà l’atmosphère qui s’est dégagé du concert tant attendu et inédit de 1914 ici en France. Si globalement on est plutôt dans un registre black metal, il y a des influences doom qui assombrissent un peu plus le tableau, voire death old school avec quelques relents à la Bolt Thower parfois sur certaines rythmiques. Nous ne sommes pas déçus, même s’il faut plusieurs écoutes pour vraiment pénétrer dans leur univers basé, vous l’aurez deviné, sur la Première Guerre Mondiale. Un comble pour ses protagonistes qui subissent tristement la guerre chez eux actuellement. Son chanteur Dmytro expliqua rapidement le contexte de son pays et conclura par un : « Fuck Russian imperialism, and fuck Poutine ! ». Le message est clairement passé, et n’a rien entaché le set musclé et réussi de 1914 ce jour en territoire français.
Sur la Dave Mustage, c’est tout aussi heavy, mais disons heavy metal comme ambiance, avec Beast In Black. Les amateurs du genre power metal vont être gratinés avec ces cinq Finnois durant cinquante petites minutes, avant le show à venir de KK’s Priest sur cette même scène une heure plus tard.
De retour au Motocultor après une prestation remarquée, Amalie Bruun nous fait l’honneur de nous rendre visite une seconde fois avec Myrkur. Si l’ex-mannequin américano-danoise n’accorda ici aucune interview (notre dernier entretien remontant à 2017), nous étions néanmoins très curieux de découvrir son nouveau show pour son dernier album en date, le très hybride (et critiqué) Spine (Relapse Rec.). Si clairement les parties black metal et surtout folk ont disparu, la chanteuse se moque bien des critiques et compte bien faire ce qu’elle entend musicalement et évoluer au gré de ses inspirations, mais aussi de ses racines premières et ce qu’elle affecte le plus, c’est-à-dire non pas le black metal ni le folklore (même si elle apprit les instruments traditionnels durant son enfance), mais la pop indie comme au temps de son précédent projet à New-York Ex Cops avec lequel elle publia deux albums en 2012 et 2013. Sauf qu’aujourd’hui, la belle sirène de Copenhague a grandi, mûri, et se permet en toute liberté de retranscrire des influences plus dark et new wave dans sa pop metal moderne et atmosphérique, entre quelques rares passages de furie black metal où elle reprend alors sa guitare BC Rich. Fini le temps où elle tournait en compagnie du guitariste de session live Teloch (guitariste de Mayhem et leader de Nidingr). Les synthés sont omniprésents avec une guitare assuré par un illustre inconnu sur la gauche. Pour le côté folk, elle nous gratifiera quand même en avant-dernier morceau du magnifique titre « Leaves of Yggdrasil » (tiré de Folkesange) quasiment a capela en duo avec sa nouvelle bassiste/claviériste Maja Shining (Forever Still), avant de conclure ce sombre bal enchanteur devant un public captivé, fait de connaisseurs mais aussi de néophytes, par « Ulvinde » issu de Mareredidt (2017), album où elle commença progressivement à changer de cap. Un pur instant de grâce où le temps semble s’être suspendu durant cinquante minutes magiques. A quand un retour au black metal d’antan et une reprise de Bathory ?
Wargasm et Left To Die, vont simultanément, quant à eux, mettre le feu avec respectivement leur punk/hardcore électro pour le duo londonien d’une part et une Milkie Way enragée et toujours court vêtue comme à son habitude ; et un hommage de pur death metal à la légende Death et son regretté Chuck Schuldiner (R.I.P.) d’autre part, à défaut de pouvoir continuer sous le nom de Death D.T.A. pour des raisons juridiques, comme ils étaient venus le faire (du moins une partie de ses membres dont le bassiste Terry Butler) il y a quelques années au Motocultor pour un concert d’anthologie.
Pour Left To Die, à cause d’un mix sonore un peu trop étouffé par la basse et des guitares moins limpides qu’avec Death D.T.A. (=Death To All), nous ne pouvons pas totalement appréciés les soli retranscrits malheureusement, même si la fin du show, avec notamment le classique « Pull The Plug » nous fit vibrer avec ses mosh parts et son petit lead de gratte, histoire de dresser un peu les poils…
Après un hommage à Death donc, voici un autre hommage sauf que celui-ci est encore vivant : KK’s Priest, avec son guitariste KK Downing qui a quitté Judas Priest (encore en vie parallèlement) pour former son propre groupe avec le talentueux chanteur Tim « Ripper » Owens (ex-Judas Priest, ex-Iced Earth…). S’ils ne reprennent pas du Judas Priest mais bel et bien leurs propres compos issus de leurs deux très bons albums, Sermons of the Sinner et The Sinner Rides Again (2023), ils livrent un show formidable même si classique. Dommage toutefois que Tim « Ripper » Owens, s’il chante admirablement bien, ne bouge pas davantage sur la grande Dave Mustage et ne communique pas avec la foule, ni ne harangue les premiers rangs d’un public acquis, certes, à la cause heavy metal. Bon, même si par mesure de sécurité, mieux vaut ne pas s’approcher trop près à cause des efets pyrotechniques…
Dans une veine toujours heavy metal mais plus orientale celle-ci, c’est avec toujours grand plaisir que nous assistons au show propre et carré du groupe franco-tunisien Myrath qui se produit souvent live par chez nous. Avec ses influences orientales donc, mais aussi parfois progressives, c’est dans la liesse que les musiciens et son chanteur partagent leur musique avec le public français. On aura même droit à l’habituelle danseuse avec un sabre sur la tête, pour la danse, non pas du vente, mais du sabre. Un instant magique encore au Motocultor.
Grosse concurrence ensuite entre les Suédois d’Opeth, et Faun dont nous rencontrerons les deux chanteurs respectifs auparavant, Mikael Åkerfeldt, plutôt de mauvais poil en coulisses, alors en pleine promotion de son nouvel album The Last Will and Testament (Reigning Phoenix Music), et un Oliver « Sa Tyr » Pade en pleine forme et jovial, malgré l’absence de sa chanteuse principale Laure Fella pour cause de maternité.
Dans les deux cas, nous assistons à deux très bons spectacles mais quelque peu décevant pour la barde teutonne. En effet, pour Opeth, la grosse artillerie est de sortie (lumières led sur toute la longueur de la scène, son aux petits oignons) par rapport à leur précédente prestation au Motocultor plus sobre il y a déjà quelques années. Et la setlist, si elle s’avère plutôt classique avec divers extraits de leur répertoire passé et seulement six titres (dont un bref « You Suffer » de Napalm Death maintes fois repris par d’autres artistes), on est déçu de ne pas découvrir en version live le tout nouveau single « §1 » qui vient de paraître, extrait du prochain album, mais bon. Il faudra attendre la tournée 2024-2025. A la batterie, le petit nouveau, Waltteri Väyrynen (ex-Paradise Lost, ex-Strigoi) fait des prouesses.
Pour Faun, le show manque un peu de percussions et de puissance. Et l’absence de la principale chanteuse donc, Laura Fella, a beau être compensée par une plus grande intervention vocale d’Adaya Lancha Bairacli (également flutiste, joueuse de lyre, cornemuse, etc.), les chansons sont essentiellement assurées par Oliver. Du coup il manque quelque chose même si l’alternance voix féminine/masculine n’est pas systématique chez Faun, le groupe possédant une large discographie pour palier à cette absence. Un bon concert, mais pas le meilleur. A revoir avec des conditions idéalement réunies. (entretien à venir avec Oliver Pade très bientôt ici-même).
La nuit devient froide. Aura Noir en profite alors pour prolonger la soirée avec son thrash/black metal direct et froid comme l’hiver en Norvège. Le groupe d’Apollyon et Agressor assure avec des morceaux directs et sans fioritures sur la Supositor Stage sous fond de lights essentiellement rougeâtres. Blasphemer (ex-Mayhem) est de la partie malgré son emploi du temps dernièrement chargé avec Vltimas (mais nous verrons David Vincent en bassiste le surlendemain en compagnie de Terrorizer, donc ils sont tous occupés ailleurs) et le prochain album d’Earth Electric avec sa douce Carmen Simões… Derrière les fûts, c’est un certain Kristian Valbo qui remplace Agressor sur scène, étant donné que ce dernier est à la basse et au chant sur le devant.
Enfin, Igorrr clôturera le bal sur la Dave Mustage avec cette fois sa chanteuse (absente la fois dernière au Motocultor) au côté de JB-Le Bail (ex-Svart Crown), et si l’on voulait de la vraie musique classique (et non synthétique) avec du metal, à l’instar d’un Therion mais en plus authentique, il fallait veiller tard pour voir la troupe allemande rare en France, Hagggard, sous la tente de la Bruce Dickinscène.
Bonne nuit les petits…
SAMEDI 17/08 et DIMANCHE 18/08/2024
=> Rendez-vous ici pour retrouver la suite & fin de notre live report du Festival Motocultor 2024 : partie II.
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